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La Fausta

Titel: La Fausta
Autoren: Michel Zévaco
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lui plaqua une de ses formidables mains sur la bouche, l’autre sur la gorge…
    La Simonne se débattit deux secondes… Soudain, elle eut un bref soupir, une petite secousse, et elle se tint immobile, tandis que son bras décharné, tordu comme un sarment, tendu vers la fenêtre, semblait montrer encore l’homme dans la foule… l’envoyé de Fausta ! le prince Farnèse ! l’amant de Léonore de Montaigues !… Le père de Violetta !
    L’enfant, rudement poussée, était tombée s’écorchant le front ; elle n’avait rien vu de la hideuse tragédie : Belgodère, accroupi sur la poitrine de la malheureuse Simonne, ses doigts de fer incrustés à sa gorge… Lorsqu’elle se releva, déjà le sacripant debout, sombre, étonné de son crime, reculait et grommelait :
    — J’ai serré un peu fort, peut-être ! Et puis, je n’ai rien tué, moi ! La mort était là qui rôdait, je l’ai aidée… Voilà tout !
    Le premier regard de Violetta fut pour la Simonne blanche comme cire.
    — Morte ! râla-t-elle. Ma mère est morte !…
    — Elle dort, grogna le bohémien. Allons, dors bien, la Simonne, dors ton grand sommeil…
    — Morte ! répéta l’enfant dont les larmes tombaient une à une sur le cadavre.
    — Et moi, je te dis qu’elle dort ! ricana Belgodère. Dehors, la chanteuse, dehors ! Au travail.
    Violetta s’abattit sur ses genoux et se prit à sangloter :
    — O pauvre, pauvre maman Simonne, vous n’êtes donc plus ! Vous abandonnez donc votre petite Violetta ! Mère, vous ne me prendrez donc plus dans vos bras ? C’est vrai que tout est fini ? Vous me laissez donc seule devant la douleur et l’effroi ?… Quand je me réfugiais sur vos genoux et que nous pleurions ensemble, il me semblait que moins amères étaient mes larmes et que votre sourire me protégeait contre le mauvais sort de ma vie ! Et vous n’êtes plus !… Je n’avais plus de père… Voici que je n’ai plus de mère !…
    A ce moment, la bohémienne Saïzuma, spectre rigide, apparut à l’entrée de la roulotte. Drapée dans les plis sculpturaux de son costume étoilé de médailles de cuivre, masquée de rouge, sa rayonnante chevelure blonde dénouée sur ses épaules, Saïzuma entra de son pas toujours égal, et sans paraître voir ni Belgodère, ni Violetta, ni la morte, alla s’asseoir dans le fond. Alors un long frisson l’agita, et elle murmura :
    — Pourquoi cet homme m’a-t-il regardée ?… Pourquoi l’ai-je regardé, moi ?… Au fond de quel enfer ai-je déjà éprouvé la brûlure de ses yeux noirs fixés sur moi ? Oh ! déchirer ce voile funèbre qui recouvre ma pensée ! Percer l’opaque brouillard de mes souvenirs !… Seigneur ! quelles visions d’horreur palpitent sur le cadavre de mon âme morte !…
    D’un geste de folie, elle pressa son front à deux mains ; et comme si son masque lui eût pesé, elle le dénoua, le laissa tomber sur ses genoux… son visage fut visible ! Etrange, avec ses traits qui paraissaient pétrifiés, immuables, sa pâleur de lys qui meurt, ses yeux sans vie où brûlait seulement la flamme d’un insondable désespoir, ce visage gardait une beauté qui n’était semblable à aucune autre beauté, avec on ne savait quoi de tragique, de mystérieux, d’infiniment doux et d’inconcevable…
    Violetta, de sa voix pure brisée de pleurs, répandait sa douleur. Elle sanglotait doucement, sans bruit, les lèvres collées sur la main glacée de celle qu’elle nommait sa mère. Belgodère allait et venait, mâchonnait de sourds jurons, stupéfait de sa propre hésitation. Brusquement, il décrocha la guitare dont Violetta s’accompagnait d’habitude et grommela :
    — En voilà assez ! Si tu pleures tant, tu ne pourras plus chanter. Allons, la chanteuse, on t’attend ! Des seigneurs, des ducs, des princes : noble compagnie, bonne récolte !
    Violetta se releva, sans paraître avoir entendu.
    — Adieu, murmura-t-elle, adieu, pauvre maman Simonne ! Je ne vous verrai plus ! Vous allez vous en aller toute seule au cimetière. Toute seule… Sans une fleur sur votre cercueil… puisque votre enfant n’a que des larmes à vous offrir…
    Cette pensée soudaine qu’on allait dans quelques heures, emporter sa mère et qu’elle était trop pauvre pour déposer seulement un bouquet sur la tombe, cette idée du cercueil s’en allant par les rues sans une malheureuse rose de souvenir, comme un cercueil de pestiférée ou de damnée, cette
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