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La colère du lac

La colère du lac

Titel: La colère du lac
Autoren: Anne Tremblay
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François-Xavier. Tu vas-tu être correct ?
    — T’es fine sans bon sens, Marguerite ! Julianna te fait dire un gros merci pis
     moé aussi.
    — C’était naturel, sourit la jeune femme. J’t’attends dehors, Ti-Georges.
     Marguerite, lasse, sortit nonchalamment de la maison retrouver ses deux garçons
     à elle qui attendaient sagement sur le perron.
    — Comment allez-vous l’appeler ? demanda Ti-Georges, tardant à suivre son
     épouse.
    — Pierre, répondit François-Xavier, avant de demander abruptement : Que c’est
     qui te tracasse, Ti-Georges ?
    — Rien, pourquoi ? se défendit celui-ci.
    François-Xavier répliqua :
    — J’te connais assez pour savoir quand y a quelque chose de sérieux qui te
     chicotte. Y a-tu un problème à la fromagerie ?
    — Ben non, pis c’est pas le moment de parler de ça de toute façon.
    — Envoye Ti-Georges, crache le morceau, s’impatienta François-Xavier.
    — Ben… les turbines de la centrale sont prêtes à tourner, dit son ami.
    — Y ont fini la construction du barrage !
    « Y sont allés vite » songea François-Xavier.
    — Bateau, c’est la plus grande usine d’électricité en Amérique du Nord, tu te
     rends compte ! s’énerva Ti-Georges.
    — De toute façon, on y a vu… Y ont pas le droit de monter leseaux avant deux ans pis pendant ce temps, on va continuer à se battre, pis à
     envoyer des requêtes au gouvernement. Y sont pas des idiots à Québec ! Chus sûr
     que tu t’en fais pour rien, Ti-Georges !
    Devant la moue de son beau-frère, François-Xavier renchérit :
    — Y ont promis de respecter nos terres. C’est supposé être du monde intelligent
     pis plus instruits que nous autres, les Anglais ? Bon, ben, y doivent savoir ce
     qu’y font, c’est comme rien ! le rassura François-Xavier.
    — C’est ben ce qui m’inquiète. On est pas grand-chose pour les Anglais…
     marmonna Ti-Georges.
    — L’industrie c’est important, mais l’agriculture aussi. Y ont besoin de nous
     autres, voyons, pour nourrir leurs familles. Les Anglais aussi, ça mange ! Pis
     moé qu’y avais peur que quelque chose aille mal à la fromagerie ! Viens, viens
     voir comment est beau ton neveu et futur filleul, mononcle Ti-Georges.
    — Filleul ?
    — Ben oui, tu pensais pas te sauver des honneurs ?
    — Bateau, moé parrain, ah ben, chus ben content… ben content.

    Ti-Georges fit taire ses appréhensions, mais elles lui revinrent à la mémoire,
     quand, presque deux mois plus tard, le 24 juin 1926 exactement, il s’aperçut que
     l’eau montait sur ses terres, noyant sa future récolte. Sans avertissement, la
     compagnie de la centrale hydroélectrique avait fermé les vannes de ses barrages,
     élevant ainsi le niveau du lac Saint-Jean au maximum. Sans rien dire. Tout
     autour du lac, les basses terres furent inondées. Le coin le plus durement
     touché fut la Pointe-Taillon. Sur la Pointe, l’eau pourrissait les pieds des
     arbres, créant de véritables ruisseaux entre les cultivateurs et leurs vaches.
     Les chemins furentemportés, les puits devinrent inutilisables.
     La maison de François-Xavier, qu’il avait construite sur une hauteur, se
     retrouva complètement entourée d’eau. La situation était cauchemardesque.
     François-Xavier devait prendre le canot pour se rendre à sa fromagerie, qui
     elle, était construite plus bas et avait beaucoup souffert du baignage des
     terres. De fait, il était devenu impossible de continuer la production. Celle
     qu’il avait commencée risquait d’être gâtée par l’eau qui était devenue non
     potable. François-Xavier ne pouvait croire que la compagnie avait fait exprès.
     Il devait y avoir une erreur. Ils allaient s’en rendre compte et tout
     redeviendrait normal. Il n’était pas possible qu’ils noient dans la misère des
     familles entières, sans sourciller, telle une portée de chatons indésirables !
     Mais il dut donner raison à Ti-Georges qui ne cessait de lui dire d’arrêter de
     se leurrer, que la compagnie et le gouvernement étaient de connivence et qu’ils
     avaient sciemment inondé leurs terres sans se soucier le moindrement de ce que
     pensaient de pauvres petits colons comme eux autres ! On forma d’urgence un
     comité de défense avec pour chef le fameux Onésime Tremblay. La compagnie promit
     d’indemniser tout le monde, mais ce qu’elle offrit fut dérisoire en comparaison
     de ce que les habitants
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