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La Cabale des Muses

La Cabale des Muses

Titel: La Cabale des Muses
Autoren: Gerard Hubert-Richou
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la freinerait pas. Elles auraient tôt fait de visiter la capitale et d’explorer les quartiers les moins fréquentables. Pourvu que, naïves provinciales, elles ne fassent pas de mauvaises rencontres ! Il les avait arrachées à la gueuserie ; pour l’heure, il ne pouvait rien leur apporter de mieux. À la grâce de Dieu, donc !
    Saint-Quentin, carrefour de la Picardie, se profila comme le soleil effleurait l’horizon. Dans un crépuscule serein où s’irisait un dernier quartier de lune, présageant d’un lendemain agréable, ils atteignirent le relais de poste.
    1 - Lire, même auteur, même éditeur, Complots à la Corderie royale .

II
    L’ AUBERGE ÉTAIT BONDÉE et des tréteaux pour quatre personnes avaient été ajoutés dans l’angle de la cheminée. Les deux voyageurs furent accueillis par le propriétaire qui les orienta vers une table réservée en permanence, à l’écart, dans une sorte de demi-tourelle qui dominait un ruisseau babillard.
    — Demain, c’est jour de foire et nous sommes complets, s’illumina-t-il. Mais ne vous tourmentez pas, messieurs, notre maison est réputée pour ses nuits paisibles. Vous dormirez comme des anges. Votre chambre donne sur la forêt.
    — Vous nous ferez préparer des chevaux pour six heures et nous réveillerez en conséquence.
    — Sans faute. Vous serez en route avant le lever du soleil, service du roi !
    L’heureux hôtelier leur adressa un sourire qui se voulait de connivence, comme s’ils appartenaient au même cercle privé. Deux serveuses, charpentées comme leur père, s’empressèrent de leur apporter les plats tandis que l’un des garçons d’écurie qui avait réceptionné les coursiers déposait leurs sacoches de selle près d’eux contre le mur.
    — Buvons à la santé de Sa Majesté, invita Géraud en levant son verre.
    — À Sa Majesté et à la fin de cette guerre qui n’a que trop duré 1 .
    — À ce propos, vous serez assez aimable de me renseigner un peu car voilà plusieurs semaines que je n’ai pu m’informer des événements du royaume.
    — À votre service.
    D’un bon appétit, ils entamèrent le plat des salaisons : terrine de sanglier aux airelles, jambon fumé, saucisson d’âne, pâté de linotte…
    Une vaste et bruyante tablée accaparait le centre de la grande salle, exclusivement masculine. D’ailleurs, alentour, comme de coutume, les couples étaient peu nombreux. Géraud Lebayle avait l’habitude d’observer les lieux et de sentir l’ambiance avant de se détendre.
    — Reprenons, puisque vous le souhaitez, la genèse de ce conflit contre nos voisins et concurrents acharnés pour la jouissance des mers… À l’origine – nul ne l’ignore – le roi voulait briser la triple alliance de La Haye entre les Provinces-Unies, l’Angleterre et la Suède. Ce qu’on sait moins, c’est que Charles II, par le traité de Douvres – et une pension annuelle de trois millions de livres – promit d’aider la France.
    — À ce prix-là, persifla Lebayle, on devait escompter un dévouement inconditionnel !
    — N’oublions pas qu’il s’agit tout de même de l’Angleterre.
    — Vous avez raison… Je crois que ce vin s’accordera avec le moelleux du cuissot de chevreuil dont le fumet annonce des délices. Poursuivez, Vareuil, tandis que je découpe le chef-d’œuvre du maître queux. Je ne vous interromprai plus.
    — De même, je pense que cette viande vaut un coup de chapeau… En juin 1672, l’ambassadeur français Arnauld de Pomponne obtient – voilà tout juste un an – la neutralité de l’empereur Léopold I er de Suède. Hélas, sur mer, l’alliance franco-anglaise essuie un échec à la bataille de Solebay et l’amiral De Ruyter protège ainsi ses côtes.
    Géraud, par civilité et parce qu’il avait la bouche pleine, se garda d’objecter qu’il n’ignorait rien des événements de l’année passée. Il prit de la garniture et l’arrosa d’un filet de sauce.
    — En revanche, poursuivit le lieutenant, la campagne terrestre de Hollande était une réussite ! Appuyé par ses grands généraux : Turenne, Condé et Luxembourg, le roi franchissait le Rhin 2 . À la vue de cette puissance déployée, les Hollandais abandonnèrent le terrain, leurs retranchements, les ponts, les places fortes et, en trois semaines, perdirent quarante villes !...
    Des éclats de voix couvrirent le résumé du lieutenant. Celui-ci en profita pour combler son handicap sur le terrain
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