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La Cabale des Muses

La Cabale des Muses

Titel: La Cabale des Muses
Autoren: Gerard Hubert-Richou
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l’homme libéra sa main. Malgré un prompt recul du buste, la lame griffa la gorge de Lebayle qui, en retour, ne retint pas son poing droit. Les cartilages craquèrent contre la mâchoire. Sur cette impulsion, l’agresseur fit un tour sur lui-même, rétablit tant bien que mal son équilibre et, lèvres éclatées, rendu fou de rage, se jeta en avant, le couteau pointé, en beuglant à l’aide. L’alcool avait émoussé ses réflexes mais décuplait sa rogne. Crachant le sang avec un flot d’insultes, il fendit l’air de son arme, sabra plusieurs fois d’un côté et de l’autre. Géraud esquiva, reflua, attendit que le bras soit en bout de course pour le lui retourner dans le dos. D’un coup d’épaule, il coucha son adversaire, la face contre la table au milieu des éclats de vaisselle, fusant en tous sens, et le désarma.
    Alarmés, ses condisciples de la grande table se dressèrent, hagards et menaçants. Ils se répartirent sur un large front pour venir au secours de leur compère. Le lieutenant de Vareuil tira son pistolet et visa le plus avancé :
    — Halte-là ! Plus un pas où je ne réponds de rien ! Vous allez vous disperser et rentrer chez vous, sans provoquer davantage d’esclandre. Mon uniforme devrait vous signifier que je suis au service particulier du roi. Ne m’obligez pas à user de ma position pour appeler à la garde et vous conduire en cellule pour un temps indéterminé.
    Le ton ferme refroidit les élans. Ils se dévisagèrent.
    — Si on peut plus s’amuser, baragouina un rubicond aux yeux globuleux.
    — Il y a des limites que votre ami a franchies. Il n’a reçu que ce qu’il méritait. Emmenez-le avant que je change d’avis et allez vous rafraîchir les idées dans le ruisseau.
    Deux hommes s’avancèrent pour relever le provocateur penaud. Ils se replièrent vers la sortie, non sans que le lieutenant leur rappelle de régler l’aubergiste et de se montrer généreux pour les troubles causés.
    Le calme revint. Les autres soupeurs n’étaient pas mécontents de cette issue et le signifièrent aimablement.
    — Messieurs, s’empressa le patron, je vous remercie d’avoir mis le holà à temps. Je les connais, ils ne sont pas méchants, mais s’emportent facilement. Pour ce service, je vous prie d’accepter d’être mes invités.
    — Nous avions juste l’ambition de passer une nuit paisible, telle que vous nous l’avez promise.
    — Elle le sera, nous y veillerons, elle le sera. Avant de vous retirer, messieurs, vous allez goûter ma petite fine.
    — Une larme de nourrisson, de quoi demeurer lucides.
    En partant, un couple de bourgeois âgés vint saluer les « vaillants défenseurs de l’ordre public » tandis qu’on nettoyait un peu alentour.
    — Lieutenant, intervint Lebayle, notre association commence sous le signe de l’animation. Pourvu que nous en restions à quelques jeux de mains de cet acabit qui entretiennent les réflexes.
    — C’est à souhaiter. À l’aller, je n’ai guère rencontré de difficultés, il faut espérer que cette expérience se révélera l’exception.
    Ils devisèrent de leurs carrières respectives avant de monter se coucher. La chambre à trois lits était exiguë mais propre, ainsi que les draps, ce qui n’était pas souvent le cas. Ils se dépoussiérèrent et s’allongèrent. Ils s’endormirent en quelques minutes.
     
    Ils ne furent dérangés que par le fils de l’aubergiste, venu les réveiller. La soupe était chaude. Ils mangèrent sans échanger un mot, non par manque de courtoisie, mais par entente tacite, puis gagnèrent les écuries. Leurs anciennes montures leur souhaitèrent le bonjour, regrettant de ne pas poursuivre l’aventure avec de tels cavaliers.
    On leur avait sellé-bridé deux napolitains, courts de corps et nerveux qui tenaient la tête droite avec fierté et levaient haut les sabots au pas, comme à la parade. Sans avoir la souplesse de caractère des précédents, ils galopaient avec fougue. C’est tout ce qu’on leur demandait.
    Cambrai, Valenciennes, la frontière, Mons. Il y eut plus de circulation que la veille, mais aucune embûche. Puis, le lendemain, ils traversèrent Charleroi, Namur et Liège où les mouvements de troupes étaient visibles, pour atteindre dans la matinée suivante les sombres fortifications de Maëstricht, ou du moins le camp des armées françaises qui, établies de l’autre côté de la Meuse sur une longue colline, dominaient la ville.
    Des
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