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La bonne guerre

La bonne guerre

Titel: La bonne guerre
Autoren: Studs Terkell
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qu’on
fasse quelque chose, remplir des sacs de sable ou n’importe quoi. Même régime
pour tout le monde. Si on disait qu’on était malade, une infirmière venait
vérifier. Si elle ne trouvait personne, ou qu’on tirait au flanc, on allait en
prison. Il n’y avait plus de libertés civiles.
    Moi, je n’ai jamais entendu parler d’histoires de trahison
dans mon entourage. Il y avait des espions, c’est vrai, mais ils faisaient
partie du personnel de l’ambassade japonaise. S’ils s’étaient mis à arrêter les
Japonais, il n’y aurait plus eu de main-d’œuvre à Pearl Harbor. Il n’y aurait
plus eu de magasins non plus, ni d’hôtels, plus rien. Il n’y aurait plus eu qu’à
fermer la ville. Il y avait 130 000 Japonais sur les îles. Qu’est-ce qu’ils
pouvaient se faire insulter, surtout par les soldats. Et ils encaissaient.
    J’ai essayé de m’engager, mais ils n’ont pas voulu de moi. Mon
boulot était, paraît-il, indispensable à l’effort de guerre. On m’a promu
magasinier, et mon salaire est passé de 32 à 125 dollars par semaine. Mais
pendant un an, j’ai tout fait pour essayer de rejoindre ceux qui se battaient. J’ai
fini par écrire au président Roosevelt, je lui ai dit que j’en avais assez des
bombardements japonais et qu’en plus j’avais perdu pas mal de copains. Alors il
a donné son feu vert, et c’est comme ça que je me suis retrouvé soldat à 21
dollars par mois ! (Il rit.)
    Comme j’avais dix-sept ans, c’est ma grand-mère qui a dû
signer pour moi. Quand je suis parti, elle m’a dit qu’elle ne me reverrait
jamais vivant, et elle ne croyait pas si bien dire, elle est morte la veille de
mon retour, en janvier 1946.
    Ils voulaient m’envoyer dans un camp d’entraînement au Texas.
Alors j’ai repris ma plus belle plume pour écrire au Président. Le Texas, je m’en
fichais complètement, ce que je voulais c’était me battre avec les autres. Alors
la Maison-Blanche a répondu qu’il fallait me mettre dans une unité de combat, et
j’ai récupéré trente jours de plonge pour ne pas être passé par la voie hiérarchique. (Il rit.)
    Quand j’ai été incorporé, ils m’ont demandé : « De
quelle race es-tu ? » Je ne voyais pas du tout où ils voulaient en
venir, parce qu’à Hawaï on ne s’occupe pas de la race des gens. Ils m’ont dit :
« D’où sont tes parents ? » Je leur ai répondu qu’ils étaient nés
à Hawaï. « Et tes grands-parents ? » Ils étaient aussi nés à
Hawaï. « Et tes arrière-grands-parents ? » J’ai dit qu’ils
venaient d’Europe : d’Espagne et du pays de Galles. Ils m’ont dit :
« Donc tu appartiens à la race blanche. » Alors je me suis regardé, et
j’ai trouvé que ma peau était plutôt sombre, tannée par le soleil. Je leur ai
dit : « Vous vous foutezde moi ou quoi ? » (Il rit.) Et ils m’ont classé dans les Blancs et pas avec les autres Hawaïens.
    De nouveaux copains m’ont expliqué qu’il y avait trois types
à qui il ne fallait pas que je parle. Je leur ai demandé pourquoi. Ils m’ont dit :
« Parce qu’ils sont juifs. » Je leur ai demandé : « C’est
quoi un juif ? » Ht ils m’ont répondu : « Tu sais pas ça ?
C’est ceux qui ont tué Jésus-Christ ». Alors j’ai dit : « Ceux-là ?
Ils n’ont pas l’air si vieux que ça. » Ils m’ont dit : « T’essaies
de te rendre intéressant ? » Je leur ai répondu : « Non, mais
il me semblait bien qu’il était mort il y a dix-neuf siècles. »
    J’ai rejoint la 7 e division d’infanterie juste à
temps pour le débarquement de Kwajelein dans les îles Marshall. On a réglé ça
en six jours. Après, on est retournés à Hawaï. Je ne sais pas ce qu’ils avaient
derrière la tête, mais avec d’autres Hawaïens, on ne nous faisait faire que de
l’entraînement à la natation. J’ai dit : « Eleanor va sûrement nous
rendre une petite visite. » Alors je me suis fait emmener au FBI à Honolulu,
et ils m’ont demandé comment j’avais appris que le Président allait venir. J’ai
dit que je n’en savais rien et ils m’ont répliqué : « T’as dit qu’Eleanor
allait venir. » J’ai dit : « Évidemment avec tout ce qu’on nous
fait faire depuis deux mois, j’étais sûr qu’on allait avoir la visite de quelqu’un
d’important. » Ils m’ont dit : « Bon, ça va, mais c’est pas la
peine d’aller le raconter. »
    Et un jour, comme ça, de but en
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