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Il suffit d'un amour

Il suffit d'un amour

Titel: Il suffit d'un amour
Autoren: Juliette Benzoni
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Si vous voulez dire que vous brûlerez ma maison, je ne pourrai vous en empêcher. Mais vous ne me ferez pas marcher contre ma conscience. Je ne suis pas Armagnac, pas plus que Bourguignon. Je suis bon Français de France, craignant Dieu et servant son roi. Jamais je ne lèverai les armes contre lui !

    Laissant aux mains de ses compères l'obstiné orfèvre, Caboche s'était alors approché de Loyse. Contre son propre corps, Catherine avait senti se raidir celui de sa sœur quand l'écorcheur s'était planté devant elle. A cette époque où il était courant, dans les grandes familles, de marier les filles à peine formées, les treize ans de l'adolescente pouvaient comprendre bien des choses.
    D'ailleurs Simon Caboche ne cachait nullement le goût qu'il avait pour Loyse. Il ne manquait pas une occasion de la poursuivre quand, par hasard, il pouvait la rencontrer. Ce qui n'était pas toujours facile car Loyse, hormis pour se rendre aux offices à la proche église Saint-Leufroy, située au bout du pont, ou bien pour aller porter des secours à la recluse de Sainte-Opportune, ne quittait pratiquement jamais la maison de ses parents. C'était une fille silencieuse et secrète dont les dix-sept ans avaient plus de gravité que bien des âges mûrs. Elle allait et venait dans la maison, à pas légers, sans faire plus de bruit qu'une souris, ses yeux bleus continuellement baissés, le béguin de toile toujours étroitement serré sur les nattes d'un blond pâle, menant déjà auprès des siens la vie du cloître à laquelle, depuis son plus jeune âge, elle aspirait.
    Catherine admirait sa sœur mais la craignait un peu et ne la comprenait pas du tout. Loyse eût été jolie et fraîche si elle n'avait tant aimé les mortifications et si elle avait su sourire. Mince sans maigreur, avec un joli corps souple et flexible, elle avait des traits fins, le nez un peu trop long mais une bouche bien dessinée et un teint très blanc, presque transparent. Catherine, qui éclatait de vitalité, qui n'aimait que le bruit, le mouvement, la gaieté et les chansons, ne s'expliquait pas ce qui pouvait, en cette future nonne, attirer le gigantesque, le tonitruant Caboche si visiblement jouisseur et matérialiste. Quant à Loyse elle- même, il était bien évident que Caboche lui faisait horreur et qu'elle n'était pas loin de voir en lui l'incarnation du Diable. Elle se signa d'ailleurs précipitamment quand il vint vers elle. Caboche fit la grimace.
    — Je ne suis pas messire Satan, ma belle, pour qu'on m'accueille de la sorte. Et vous auriez meilleur temps en persuadant votre père de mettre sa main dans la mienne.
    Les yeux rivés à la pointe de ses souliers, Loyse murmura :

    — Je ne saurais ! Ce n'est point à une fille de conseiller son père.
    Ce qu'il fait est bien fait...
    Dans la poche de son tablier, elle cherchait furtivement son chapelet sur lequel ses doigts se refermèrent. Puis elle se détourna pour secouer les bûches dans l'âtre, faisant bien comprendre à Caboche qu'elle ne souhaitait pas poursuivre l'entretien. Un éclair de colère brilla dans les yeux pâles de l'écorcheur.
    — Demain à pareille heure, on sera peut-être moins fière, la Loyse, quand mes hommes viendront vous arracher à votre lit pour s'amuser de vous ! Mais soyez tranquille, c'est moi qui serai le premier...
    Il recula subitement parce que Gaucher Legoix l'avait saisi au collet pour le tirer dehors. L'orfèvre était blanc de colère et la rage décuplait ses forces. Sous sa main maigre Caboche chancela.
    — Hors d'ici, cria-t-il la voix tremblante d'indignation, hors d'ici vil pourceau ! Et que je ne te voie plus rôder autour de ma fille !
    — Ta fille, ricana Caboche, je l'aurai demain à mon plaisir... et bien d'autres après moi si tu n'entends pas raison.
    A la grande terreur de Catherine, Gaucher fou de rage lui sautait déjà au visage mais Cauchon interposa sa robe noire entre les deux hommes, les séparant de toute la longueur de ses grands bras.
    — Assez ! fit-il froidement. L'heure n'est pas à ce genre de dispute.
    Caboche est trop brutal et Legoix trop impulsif, trop entêté aussi.
    Nous allons nous retirer. La nuit, sans doute, portera conseil à chacun.
    Et toi Gaucher Legoix, j'espère que tu entendras la voix île la raison.
    Assis sur une borne, Landry avait écouté Catherine sans l'interrompre. «
    Cette histoire lui donnait à penser et troublait le cours de ses idées.
    Il admirait profondément Caboche mais
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