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Hommage à la Catalogne

Hommage à la Catalogne

Titel: Hommage à la Catalogne
Autoren: George Orwell
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n’arrive pas à comprendre pourquoi ils ne quittèrent pas tout bonnement le front ou ne passèrent pas à l’ennemi. Il fut toujours en leur pouvoir de le faire, et à certains moments cela eût pu avoir une conséquence décisive. Cependant ils continuèrent à se battre ; bien plus, ce fut après la suppression du P.O.U.M. en tant que parti politique, et alors que chacun avait encore le souvenir tout frais de cet événement, que les milices – non encore réparties dans l’armée populaire – prirent part à l’offensive meurtrière à l’est de Huesca dans laquelle, en un jour ou deux, plusieurs milliers d’hommes trouvèrent la mort. On se serait pour le moins attendu à des fraternisations avec l’ennemi et à de continuelles désertions. Or, comme je l’ai déjà indiqué, celles-ci furent en nombre exceptionnellement faible. Et on se serait aussi attendu à une propagande pro-fasciste, à du « défaitisme », etc. Cependant, rien de tout cela ne se produisit. Il doit évidemment y avoir eu dans le P.O.U.M. des espions fascistes et des agents provocateurs ; il y en avait dans tous les partis de gauche, mais rien n’autorise à penser qu’il y en ait eu davantage dans le P.O.U.M. qu’ailleurs.
    Il est vrai que, dans certaines de ses attaques, la presse communiste a dit, avec assez de mauvaise grâce, que seuls les leaders du P.O.U.M. étaient à la solde des fascistes, non les simples membres. Mais ce n’était là qu’une tentative pour détacher de leurs dirigeants les membres du P.O.U.M. La nature même de l’accusation impliquait la participation de tous au complot. Celle des simples membres et des miliciens aussi bien que celle des leaders ; car, de toute évidence, si Nin, Gorkin et les autres dirigeants du P.O.U.M. étaient réellement à la solde des fascistes, il était plus que probable que leurs partisans, qui étaient en contact avec eux, devaient être les premiers à le savoir, plutôt que les journalistes de Londres, de Paris ou de New York. Et, en tout cas, au moment de la suppression du P.O.U.M., la police clandestine contrôlée par les communistes agit conformément à l’hypothèse que tous fussent pareillement coupables, et elle arrêta tous ceux, ayant quelque lien avec le P.O.U.M., sur qui elle put mettre la main, y compris les blessés, les infirmières, les femmes des membres du P.O.U.M. et, dans quelques cas, les enfants.
    Finalement, les 15 et 16 juin, le P.O.U.M. fut supprimé et proclamé organisation illégale. Ce fut l’un des premiers actes du gouvernement Negrín qui prit le pouvoir en mai. Une fois le comité exécutif du P.O.U.M. jeté en prison, la presse communiste fabriqua ce qui fut donné comme étant la découverte d’un complot fasciste monstre. Pendant un temps la presse communiste du monde entier publia de façon flamboyante des communications du genre de celle-ci ( Daily Worker du 21 juin), résumé sommaire de plusieurs journaux communistes espagnols :
     
    L ES TROTSKYSTES ESPAGNOLS CONSPIRENT AVEC F RANCO
     
    « À la suite de l’arrestation d’un grand nombre de dirigeants trotskystes à Barcelone et ailleurs... on a appris à la fin de la semaine les détails d’une des plus abominables affaires d’espionnage qui se soient jamais vues en temps de guerre, et eu révélation de la plus vile trahison trotskyste jusqu’à ce jour... Les documents qui sont en la possession de la police, ainsi que les aveux complets de pas moins de deux cents personnes mises en état d’arrestation, prouvent, » etc.
     
    Ce que « prouvaient » ces révélations, c’était que les leaders du P.O.U.M. communiquaient par radio au général Franco des secrets militaires, qu’ils étaient en rapports avec Berlin et agissaient en collaboration avec l’organisation fasciste clandestine à Madrid. On donnait en outre des détails sensationnels sur des messages secrets écrits à l’encre sympathique et sur un mystérieux document signé de la lettre N (mise pour Nin, disait-on), etc.
    Et finalement tout cela se réduit à ceci : six mois après l’événement, au moment où j’écris ces pages, la plupart des leaders du P.O.U.M. sont toujours en prison, mais n’ont jamais passé en jugement, et les accusations d’avoir communiqué par radio avec Franco, etc., n’ont même jamais été officiellement formulées. S’ils avaient été véritablement coupables d’espionnage, ils eussent été jugés et fusillés en l’espace d’une
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