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Histoire de croisades

Histoire de croisades

Titel: Histoire de croisades
Autoren: Allessandro Barbero
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fit voir l’image de Marie avec le petit
Messie sur les genoux : Voici, dit-il, Dieu enfant. » Ousâma raconte
cette histoire pour faire comprendre à ses lecteurs jusqu’où s’étend l’incroyable
superstition des chrétiens, capables de croire que Dieu, qui est inatteignable
et n’est pas de ce monde, et qui selon l’islam ne peut pas même être représenté,
puisse être dépeint sous les traits d’un enfant. De fait, il conclut :
« Dieu le très-haut est bien plus élevé que ne le prétendent les infidèles ! »
    Et pourtant, chez Ousâma aussi apparaît la même admiration
réticente que nous avons déjà constatée chez l’empereur Alexis Comnène. Bien
sûr, ces chrétiens sont exotiques, grossiers, barbares, mais ils ont une
certaine beauté qui leur est propre. Quand ils apparaissent sur leurs chevaux, en
armure, et chargent tous ensemble, ils sont irrésistibles, et ils font preuve d’un
courage sans égal au combat : Ousâma le répète maintes fois. D’ailleurs, malgré
leurs énormes différences religieuses et culturelles, des hommes tels que lui
ont beaucoup d’affinités avec leurs ennemis-hôtes chrétiens. Ousâma, dans les
périodes de trêve, séjourne souvent chez l’un ou l’autre chef croisé, et même
chez le roi de Jérusalem – le roi Foulque, successeur de Godefroi de Bouillon ;
ils discutent et se découvrent des centres d’intérêt communs, quand ils parlent
de chevaux par exemple, ou de faucons, car la chasse au faucon les passionne
tous et ils s’y adonnent sans réserve. Les Occidentaux de l’époque d’Ousâma s’enthousiasment
pour la chevalerie, au sens technique que le terme a pris en Occident : les
jeunes nobles ne passent pas seulement leur temps à apprendre à chevaucher et à
combattre, ils sont adoubés chevaliers lors d’un rite d’initiation qui confère
aussi un statut juridique privilégié. La chevalerie, sous cet aspect
institutionnel, est inconnue des musulmans, mais ils apprécient les bons
cavaliers, et cela peut susciter des malentendus. Un jour, Ousâma se trouve à
la cour du roi Foulque à Jérusalem, ils bavardent, et le roi lui dit :
« Je me réjouis de savoir que vous êtes chevalier. » Ousâma répond :
« Je suis un chevalier à la mode de chez nous. » De toute évidence, il
sait que pour les Francs être chevalier veut dire quelque chose de plus
complexe, mais le malentendu culturel fonctionne cette fois en un sens positif :
le roi pense que ce prince beau et courageux a été armé chevalier comme on le
fait en Europe.
    Malgré leur volonté farouche de ne pas se comprendre et de
se massacrer mutuellement, les élites turques et croisées finissent donc par
trouver, inévitablement, un terrain d’entente, et tant pis s’il repose sur des
équivoques. Il ne fait aucun doute qu’ils s’admirent ; le chevalier
anonyme qui écrit l’histoire de la première croisade fait à un certain moment
une déclaration très étonnante. Il raconte la première grande bataille, sous
les murs d’Antioche, où les croisés battirent les Turcs à grand-peine après s’être
cru eux-mêmes vaincus ; et notre chevalier commente : « Qui sera
jamais assez sage et savant pour réussir à décrire la prudence, les capacités
militaires et la force des Turcs ? » Autrement dit, il y faudrait la
plume d’un autre, je ne suis pas capable d’expliquer à quel point ces Turcs
sont excellents. Cette appréciation est d’autant plus importante que les Turcs
combattent très différemment des chevaliers occidentaux : ils se battent à
cheval mais avec des arcs et des flèches, ne pratiquent pas la charge visant à
enfoncer les rangs ennemis la lance au poing, mais se tiennent à distance, font
pleuvoir les flèches sur les troupes adverses, s’éloignent et puis reviennent, conformément
à une tactique pratiquée au Moyen-Orient depuis l’Antiquité. Les croisés
commencent par les mépriser, avant de comprendre que cette manière de combattre
est aussi efficace que la leur et exige tout autant d’habileté et de courage. En
effet, poursuit l’auteur, « ils croyaient épouvanter les Francs par la
menace de leurs flèches, comme ils épouvantèrent les Arabes, les Sarrasins, les
Arméniens, les Syriens et les Grecs, mais s’il plaît à Dieu ils ne seront
jamais aussi valeureux que les nôtres », ce qui revient à dire : nous
sommes meilleurs qu’eux, mais c’est un beau défi. Toutefois la partie la
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