Bücher online kostenlos Kostenlos Online Lesen
Gondoles de verre

Gondoles de verre

Titel: Gondoles de verre
Autoren: Nicolas Remin
Vom Netzwerk:
répondit-il d’un ton sec.
    — Quelques quoi ?
    La mâchoire inférieure du médecin pendait dans le vide. Et tiens ! Il ne l’attendait pas, celle-là. Tron lui adressa un sourire aimable.
    — Des photographies du lieu du crime constituent un instrument précieux pour la recherche de preuves, déclara-t-il. Il s’agit d’établir des chaînes d’indices. Ces méthodes ont été mises au point par la police parisienne.
    C’était du moins ce que le sergent Bossi avait prétendu pour l’inciter à faire acheter du matériel photographique par le commissariat de Saint-Marc. Il lui devait aussi les termes de recherche de preuves et de chaîne d’indices qui faisaient toujours beaucoup d’effet. Le sergent Bossi, futur inspecteur âgé d’une bonne vingtaine d’années, tenait à tout prix à être à la pointe du progrès en matière d’investigation policière. Investigation policière , encore une expression à la mode. Tron se tourna vers son subalterne : — Où est le domestique qui a découvert le corps ?
    Bossi releva la tête qu’il s’apprêtait à introduire sous le tissu noir de son appareil photographique et tendit le menton au-dessus de son épaule.
    — Dans la cuisine, commissaire. Deuxième porte à gauche.
    — Est-il sous le choc ?
    Le sergent eut besoin de réfléchir. Tenant le tissu noir à deux mains comme s’il s’agissait d’un linceul, il roula des yeux en fixant le plafond d’un air rêveur.
    — Non, finit-il par répondre, il ne m’a pas donné cette impression.
    Tron s’était attendu à trouver un domestique d’un certain âge. En fait, le serviteur de Kostolany se révéla être un garçon d’une quinzaine d’années. Assis à la table de cuisine, il feuilletait le Giornale di Padova . Quand le commissaire entra, il posa le journal sur le côté et se leva avec lenteur.
    Grand et mince, il avait des yeux noisette avec de longs cils épais et une peau hâlée, lisse comme de la porcelaine. Les filles devaient en être folles, se dit Tron. Et pas uniquement les filles sans doute, poursuivit-il. Lui-même, pourtant assez conservateur en matière d’érotisme, n’était pas insensible à son charme. Comme ce gamin avait de beaux yeux ! Moins troublé qu’amusé par sa propre réaction, Tron sourit.
    — Je suis le commissaire Tron.
    Le jeune homme s’avança de derrière la table et lui tendit la main.
    — Andrea Manin, se présenta-t-il.
    Sa voix claire et en même temps un peu voilée, comme s’il venait de lui faire une confidence, s’accordait bien au regard, lui aussi à peine voilé, qu’il décocha entre ses cils épais et qui s’arrêta sur le commissaire… quelques instants de trop. Tout cela était des plus troublant. Le gamin savait-il que son charme n’agissait pas que sur les femmes ? En usait-il à la moindre occasion ?
    D’un geste de la main, Tron lui fit signe de se rasseoir.
    — Mon sergent m’a dit que vous avez découvert le corps. Quelle heure était-il ?
    Le jeune homme haussa les épaules.
    — Un peu plus de onze heures. Il gisait par terre. Les yeux grands ouverts, le regard fixe.
    Si la mort de Kostolany l’avait choqué, il n’en laissait en tout cas rien paraître.
    — Pensez-vous qu’on a dérobé quelque chose ? Un tableau par exemple ?
    Andrea secoua la tête sans hésiter une seconde.
    — Non, je connais toutes les œuvres ici. S’il manquait quoi que ce soit, je l’aurais vu aussitôt.
    — Qu’avez-vous fait après avoir trouvé le corps ?
    — J’ai refermé à double tour et me suis rendu au poste de police sur la place Saint-Marc.
    — Où avez-vous passé la soirée ?
    — J’ai rendu visite à ma mère à Padoue et suis rentré sans tarder de la gare.
    — Quelqu’un vous a-t-il vu dans le train ?
    — Oui, le contrôleur. Il me connaît.
    Le jeune homme s’appuya contre le dos de sa chaise et fronça les sourcils. Ses yeux de velours couleur noisette scintillaient comme des paillettes.
    — On me soupçonne ?
    Au fait, pourquoi pas ? Le cadavre que Bossi était en train de photographier dans la pièce voisine était encore chaud. Le domestique aurait très bien pu le tuer à son retour et se présenter au commissariat une dizaine de minutes plus tard. Il ne fallait pas être très fort pour passer un collet au-dessus de la tête de quelqu’un et tirer. D’un autre côté, Tron avait du mal à imaginer cette créature gracieuse, qui avait maintenant posé un coude sur la table et appuyait avec
Vom Netzwerk:

Weitere Kostenlose Bücher