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Gisors et l'énigme des Templiers

Gisors et l'énigme des Templiers

Titel: Gisors et l'énigme des Templiers
Autoren: Jean Markale
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mort pleuvait, déversée par les avions à la croix noire, les sinistres
Stukas, dont les manœuvres en piqué déchaînaient des miaulements infernaux qui
se répercutaient dans le ciel. Cela, je connaissais. J’avais subi les bombes
allemandes en 1940. Je me souvenais de nos errances, ma grand-mère et moi, sur
les routes de Basse-Normandie, dans notre fuite éperdue et totalement inepte
vers une Bretagne inaccessible. Chaque fois que nous entendions le rugissement
des Stukas, nous nous précipitions dans les fossés. Ce bruit est resté dans ma
mémoire, à jamais, comme celui du tir des mitrailleuses, comme aussi la croix
noire qui perçait les ailes de ces oiseaux de cauchemar. Car il s’agit bien de
cauchemar. Et ce n’est que beaucoup plus tard que j’ai su que ces croix noires
étaient celles des Chevaliers teutoniques, ces rivaux des Templiers, et qui
leur survécurent.
    Mais en ce mois de juillet de mes vingt ans, le soleil était
une lumière de paix et d’espoir. Je quittai les ombres de Gisors pour
m’enfoncer à l’intérieur du Vexin normand, en direction de la forêt de Lyons.
Bézu-Saint-Éloi, Étrépagny, Doudeauville, et enfin Puchay, où j’étais
attendu : des paysages calmes où les futures moissons commençaient à
prendre les teintes du pain cuit dans de grands fours, comme autrefois, dans
les villages cernés de haies vives. Il faisait bon vivre. À Puchay, où je ne
savais pas que résidait alors le poète Louis Guillaume qui, depuis, devint mon
ami – encore un Breton exilé ! –, je vis le porche en bois d’une petite
église caractéristique de ces pays de Haute-Normandie : la trace des
Vikings y est évidente, bien que personne ne sache encore évoquer l’ombre de ces
navigateurs venus du nord. Puchay est un village qui émerge à peine d’un flot
de verdure, au milieu d’une plaine maintenant vouée à la culture industrielle.
Ma première impression fut celle d’un enclos où les fleurs jaillissent de tous
côtés, à travers les grilles des jardins et sous les murs des maisons.
    Je me retrouvai au milieu d’un groupe de jeunes dans une de
ces maisons fleuries perpendiculaires à la rue, et qui se prolongeait par un
jardin débouchant sur la campagne. Une vieille femme dont je n’ai jamais su le
nom, mais que nous appelions « grand-mère », officiait à la cuisine,
assistée d’un pauvre garçon nommé Jean, et qui servait d’homme à tout faire. Le
maître des lieux était un Franciscain, homme étrange et remarquable, d’origine
bretonne, le Père Marie-Bernard. Je l’avais connu par hasard, dans d’autres
circonstances, mais je n’ai jamais pu comprendre ce qu’il faisait exactement,
ni quel était son but en nous réunissant de temps à autre dans des maisons où
on lui donnait, en vertu de quels mystérieux accords, pouvoir sur les gens et
les choses. Peu importe d’ailleurs. J’ai vécu des moments intenses au milieu de
cette communauté fraternelle qui n’obéissait à d’autre règle que celle de
l’amitié. Et le soir, après le repas, c’était la veillée : chacun y allait
de son histoire, de la plus grivoise à la plus sérieuse, ou de sa chanson, ou
de ses souvenirs, le tout se terminant par une prière et un cantique en
l’honneur de la Vierge.
    C’est là que j’entendis encore parler de Gisors. On avait
trouvé, me dit-on, un cimetière mérovingien non loin de l’église, avec des
tombes qui renfermaient des objets précieux. Et ces objets n’avaient pas été
perdus pour tout le monde, m’assurait-on. On précisa même que les habitants de
Gisors racontaient, depuis des générations, qu’un trésor était gardé par le
diable. Malheur à celui qui oserait s’engager sous la terre dans le seul but de
dérober le trésor maudit ! Il risquait d’être englouti à jamais dans les
flammes de l’enfer. Mais d’autres, plus prosaïques, prétendaient qu’il n’y
avait pas de trésor : c’était une énorme cuve remplie d’essence que les
Allemands avaient fait construire sous le château pendant l’Occupation,
espérant ainsi la mettre à l’abri des bombardements anglais, la forteresse de
Gisors étant un lieu sacré et historique pour tous les citoyens du Royaume-Uni.
L’histoire de la cuve d’essence est authentique, et c’est l’une des raisons
pour lesquelles, en 1964, on a coulé, sur ordre ministériel, une dalle de béton
dans la cour dudit château. Néanmoins, sans que l’on prononçât le nom
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