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Gauvain

Gauvain

Titel: Gauvain
Autoren: Jean Markale
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la part d’un étranger ! Un autre, peut-être, aurait pu, par faiblesse, faillir à la tâche de protéger la jeune fille, mais que Gauvain n’ait rien tenté alors que mon honneur était en jeu, oh, voilà qui m’accable ! »
    Yder, le fils de Nudd, qui se trouvait tout près, lui dit alors : « Roi, ne te tracasse pas de la sorte. Le sénéchal s’est mis en route, et il saura bien nous laver de l’affront. » Arthur se mit à ricaner. « Kaï ? s’écria-t-il. Je ne suis pas devin, mais je puis affirmer qu’en ce moment même, Kaï a vidé les étriers, Kaï gît à terre, déplorant sa témérité ! » À ces mots, Gauvain se leva. « Mon oncle, dit-il, ne sois pas si sévère à l’égard de Kaï. Il a eu le mérite d’être le seul à relever immédiatement le défi. J’ai beau savoir, comme toi, qu’il est incapable de ramener la jeune fille et son ravisseur, je rends hommage à son courage. Quant à moi, je n’accepte pas les reproches que tu viens de me faire. Je n’ai jamais eu l’intention de rester oisif en face de cette provocation. Mais j’ai tout mon temps. Je vais partir maintenant. Je ne reviendrai, sache-le, que lorsque mon adversaire aura crié grâce et que j’aurai délivré la jeune fille que tu as confiée à ma garde. » Sans plus tarder, il demanda ses armes, son cheval. Dès qu’on lui eut amené Gringalet, il sauta en selle et, muni de sa lance et de son bouclier, s’élança, dédaignant les étriers, en direction de la forêt.
    Il s’étonna d’abord de ne pas trouver trace du ravisseur. Celui-ci ne devait pas avoir eu le temps d’aller bien loin, car Gringalet galopait, plus rapide que la flèche. C’est alors qu’il vit survenir à vive allure le destrier de Kaï. Gauvain le reconnut aisément et profita d’un resserrement du chemin pour l’arrêter au passage. Le cheval se trouvait en piteux état : outre qu’il portait une écorchure sanguinolente au front, l’arçon de sa selle était tellement en miettes, son harnais tellement en pièces que Gauvain, navré, redouta que le sénéchal ne fût prisonnier ou mort. « Dieu tout-puissant ! s’exclama-t-il. Quel crime est le mien, quel malheur m’a frappé aujourd’hui, si, par ma faute, le roi a perdu un chevalier pour lequel il éprouvait tant d’affection ! On me le rappellera sans cesse et j’en serai blâmé tout au long de ma vie ! S’il est mort, c’est parce que j’ai failli à ma tâche, moi qui devais garder la jeune fille. »
    Il en était là de ses réflexions amères quand, regardant un peu plus loin dans le sentier, il vit Kaï en train de se relever péniblement. Il lâcha la bride et piqua des deux jusqu’à lui. « Seigneur, dit-il, me voici fort affligé de ta mésaventure, et je crains fort que tu n’en rejettes sur moi la responsabilité. – En effet, répliqua le sénéchal, tu peux avouer que tu es un pleutre ! Pour sûr, tout ce qui vient de m’arriver, je te le dois ! Tu es fier et plein de morgue quand tu te rends dans les appartements de la reine, mais dès qu’il s’agit d’accomplir des prouesses, on ne te voit plus ! La belle affaire que de prodiguer de beaux discours aux dames si l’on est incapable d’en secourir une – et une de plus qu’on était chargé de protéger ! Et que dire de l’honneur du roi ? Le voici terni parce que tu n’as pas tenu ta parole ! Aujourd’hui, je ne t’ai certes pas vu bien prompt à la riposte !
    — Calme-toi, Kaï, dit Gauvain. Dieu soit loué, tu n’es pas trop mal en point. Je m’en serais voulu toute ma vie si tu étais mort ou même gravement blessé, car je ne conteste pas que j’ai eu grand tort en cette affaire. Mais voici ton cheval que j’ai attrapé par la bride. Mets-toi en selle, je te prie, et reviens à la cour. Pendant ce temps, je m’élancerai à la poursuite du cavalier qui nous a couverts d’opprobre et nous vengerai de belle manière ! – Tais-toi ! reprit Kaï avec colère. Je ne recevrai pas mon cheval des mains d’un lâche ! Tu serais trop content d’aller répéter partout que je suis ton obligé ! » Gauvain répondit calmement : « À ta guise. » Et, sans ajouter un mot, il attacha le cheval de Kaï à un arbre, sauta sur le dos de Gringalet et, abandonnant le sénéchal à ses rancœurs, eut tôt fait de disparaître parmi les arbres.
    Entre-temps, le ravisseur, qui avait eu si aisément raison de Kaï, avait pris le large. Au sortir de la forêt
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