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Frontenac_T1

Frontenac_T1

Titel: Frontenac_T1
Autoren: Micheline Bail
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prudence les plus élémentaires. Et à l’inverse, le jour fatidique, Vaudreuil se serait terré peureusement avec ses troupes à l’intérieur, alors qu’à l’extérieur, les habitants tombaient comme des mouches. Il aurait même interdit à quiconque de poursuivre l’ennemi retranché en amont sur le Saint-Laurent, alors que les trois quarts des Iroquois étaient déjà saouls morts après avoir bu tout l’alcool de traite entreposé dans les maisons de Lachine. Vaudreuil aurait facilement pu abattre des dizaines de guerriers et libérer les prisonniers s’il avait été plus audacieux et moins bêtement soumis aux ordres.
    Autant de témoignages qui ne faisaient qu’attiser la rage qui couvait déjà dans l’esprit de Frontenac. Et le comble, c’est qu’on lui avait appris le matin même que Denonville avait donné l’ordre de faire raser le fort Cataracoui. Une décision déjà prise par le roi avant son départ de Versailles, semblait-il, mais dont on s’était bien gardé de lui faire part. Outré par ce qu’il considérait comme une terrible erreur stratégique, il venait d’ordonner à ses gardes de se préparer à lancer une expédition de sauvetage. Il fallait faire diligence pour empêcher la destruction de ce fort qu’il chérissait comme la prunelle de ses yeux.
    Aux abords de la place du marché, la foule se fit plus bigarrée. Des Indiens, aux visages peints et aux costumes chamarrés, déambulaient en se mêlant aux curieux.
    Un homme se jeta subitement devant Frontenac en exhibant avec fierté ses mains mutilées. Il avait été fait prisonnier lors du massacre, argua-t-il, traîné en pays iroquois et longuement tourmenté. Il avait pu échapper à ses tortionnaires à la faveur de la nuit et regagner Montréal. Deux doigts manquaient à sa main droite et l’index de sa main gauche avait été cruellement brûlé. Et lorsque, d’un geste théâtral, il enleva son bonnet, des cris d’horreur fusèrent autour de lui. Le « scalpé vivant », dont le crâne nu et violacé était encore couvert de plaies purulentes, s’avérait d’une laideur repoussante. Nullement décontenancé, l’homme ébaucha un sourire et remit précautionneusement son couvre-chef. C’était un coureur des bois endurci, qui avait assez fréquenté les Indiens pour s’estimer chanceux d’être encore en vie.
    â€” Monseigneur, fit-il avec vivacité à l’intention de Frontenac, prenez garde! J’ai surpris des conversations où il était question d’une alliance entre Iroquois, Mohicans * et Anglais, afin d’envahir l’île de Montréal dès le printemps prochain. Ils descendraient ensuite aux Trois-Rivières, puis attaqueraient Québec par terre pendant qu’une flotte anglaise l’assiégerait par mer. Méfiez-vous, ils sont enragés comme des loups affamés. Et ils sont des centaines, embusqués partout le long du Saint-Laurent et de l’Outaouais.
    â€” Merci, mon ami, vous êtes un brave, lui rétorqua Louis en lui enserrant chaleureusement les épaules.
    Puis il s’éloigna, troublé malgré lui par cette révélation à laquelle il accordait cependant peu de foi. Même si une attaque anglaise et iroquoise par terre et par mer était toujours à craindre et risquait de placer la colonie dans une situation périlleuse. «Voilà pourquoi il faut agir vite et tuer la vipère dans l’œuf », se dit-il encore, conforté dans la politique qu’il était en train d’esquisser mentalement.
    â€” Mais il n’y a pas que de mauvaises nouvelles, monseigneur, fit Callières en se penchant à l’oreille de Frontenac.
    La respiration du gouverneur de Montréal était courte et saccadée. Il peinait visiblement à l’effort. Son impressionnante corpulence le forçait d’habitude à se déplacer à dos de cheval, mais comme le comte de Frontenac avait choisi de marcher, il s’était vu obligé d’en faire autant.
    â€” Il ne faut pas oublier, poursuivit-il, que les Outaouais * ont réussi le tour de force de descendre jusqu’ici avec huit cent mille livres de fourrures, malgré les barrages iroquois
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