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Fiora et le Pape

Fiora et le Pape

Titel: Fiora et le Pape
Autoren: Juliette Benzoni
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salpêtrés, la voûte que l’été bourguignon
ne parvenait pas à sécher et la paille à demi pourrie qui couvrait le sol. Il
doit y avoir longtemps ?
    – Sûr
qu’ç’a fait un bail, mais moi qui vous cause, j’ai connu c’te prison sans rien
d’autre que d’la paille. Les chaînes étaient vieilles et rouillées et les rats
couraient comme chez eux. Pourtant j’ai vu, là-dedans, une pauv’ fille mettre
au monde un enfant. Elle avait commis le péché de chair avec son frère et aussi
celui d’adultère mais elle était toute jeunette, toute mignonne, et de la voir
se tordre dans les douleurs pendant des heures, ça m’a serré le cœur.
    Philippe
avait pâli et regardait avec horreur, à présent, cette prison qui jusqu’alors
ne lui avait pas semblé bien différente de celles qu’il avait pu connaître.
    – Elle
s’appelait Marie de Brévailles, n’est-ce pas ? murmura-t-il. Et elle est
morte cinq jours après...
    – C’est
ça tout juste ! fit le geôlier éberlué. Vous la connaissiez ?
    – Non,
mais j’ai connu son frère autrefois, au service de monseigneur de Charolais. C’est
une triste histoire, en effet.
    – Eh
bien, pas si triste que ça, au fond !
    – Comment ?
    – J’vous
explique. Pendant qu’elle faisait son enfant, c’était rien d’autre qu’une pauv’chair
souffrante, mais vous auriez dû la voir quand elle est partie pour l’échafaud
avec son frère ! Comme ils étaient nobles, on leur avait permis de faire
toilette, de revêtir leurs plus beaux habits et ils étaient superbes tous les
deux. Avant d’monter dans l’tombereau, il lui a pris la main et ils se sont
souri. Z’avaient l’air aussi heureux qu’s’y ils allaient à leur noce. Et si
beaux ! Tout l’monde pleurait d’les voir mourir.
    – Pourtant,
ils laissaient un enfant ?
    – Oui.
Une p’tite fille qu’on avait portée à l’hospice. C’était l’plus triste parce
que c’était un enfant d’péché mortel, mais on raconte que l’Bon Dieu a eu pitié
d’elle. Un étranger, un riche marchand, passait par là. Il a vu mourir la mère
et il a voulu prendre la p’tite. On sait pas ce qu’elle est devenue, par
exemple...
    Selongey
retint un sourire. Il se demandait quelle tête ferait le bonhomme s’il lui
apprenait que l’enfant en question était devenu sa femme. Mais il n’avait pas
envie de parler davantage. Puisque le hasard voulait qu’il passât ses dernières
heures dans ce cachot où Fiora avait vécu ses premiers instants, c’était pour
lui un signe du destin. Il n’aurait pas, comme Jean de Brévailles, la joie de
mourir avec celle qu’il aimait et de partager sa tombe, mais il partirait avec,
au cœur, l’image de sa belle Florentine. Essayer de la chasser comme il tentait
de le faire ces derniers temps était bien inutile. On n’échappait pas au
souvenir de Fiora, aux grands yeux de Fiora, au sourire de Fiora. Peut-être qu’en
pensant à elle il trouverait la mort moins amère. Au fond, elle avait eu raison
de refuser la vie qu’il lui offrait. Que deviendrait-elle, à présent, si elle
avait accepté de se laisser conduire à Selongey ? Une veuve désespérée et
irritée par la présence d’une belle-sœur aussi sotte que Béatrice, une femme
que les gens d’armes chasseraient de chez elle comme il arrive le plus souvent
quand il s’agit des biens d’un condamné ? Qui serait peut-être molestée,
emprisonnée ? Philippe haïssait de tout son cœur le roi Louis, onzième du
nom, et pour rien au monde il n’accepterait de le servir, mais, en cette
occasion, mieux valait que Fiora eût choisi de rester auprès de lui et d’accepter
le petit château qu’il lui avait offert. Ainsi, même sa mort de rebelle ne
porterait pas tort àcelle qu’il aimait.
    Le
geôlier était sorti depuis longtemps, chassé par le mutisme du prisonnier et la
nuit qui commençait à tomber. Philippe prit le pain qu’on lui avait apporté et,
après avoir, du pouce, tracé un signe de croix sur la croûte brune, il en
arracha un morceau et mordit dedans. Il n’avait pas faim, mais, sachant ce qui
l’attendait le lendemain, il voulait l’aborder en pleine possession de ses
forces. D’ailleurs, pour une fois, le pain était frais et il prit à le mâcher,
à le respirer quelque plaisir. L’odeur du pain tout chaud sorti du four avait
enchanté son enfance ; elle était restée l’une des senteurs qui lui
étaient le plus agréables. La moitié de la
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