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Fiora et le Pape

Fiora et le Pape

Titel: Fiora et le Pape
Autoren: Juliette Benzoni
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Bourgogne.
    – Ce
refus vous coûtera la tête !
    Une
heure plus tard, Philippe était écroué dans les prisons de la maison du Singe
et n’en sortit, enchaîné, que pour s’entendre condamner à la peine capitale.
    Une
semaine plus tard, la sentence n’était toujours pas exécutée. Selon le geôlier
qui lui portait sa pitance, ce retard n’était dû qu’à sa qualité. On le gardait
pour la bonne bouche, il serait en quelque sorte le clou du sanglant spectacle
que le sire de Craon donnait à Dijon. Furieux des désordres commis durant son
absence, le Français s’en vengeait en faisant régner la terreur. Depuis son
retour, tout autre pouvoir que le sien demeurait suspendu et les partisans du
roi purent assister au châtiment de ceux qui leur avaient porté tort. On
traquait les moindres suspects et le bourreau pas plus que ses aides ne
manquaient d’ouvrage. Jehan du Poix, le « carnacier » de la ville, ne
cessait de torturer que pour pendre et faire sauter des têtes. Pour varier le
spectacle, on trouva même, par hasard, un faux-monnayeur que l’on mit à
bouillir dans un mélange d’huile et d’eau...
    Décidément,
il était impossible d’attraper les brins d’herbe : les chaînes qui
reliaient le prisonnier à la muraille étaient trop courtes et, avec un soupir,
il revint s’asseoir sur sa planche. Le soir allait tomber. La ville était
étrangement silencieuse, comme si elle éprouvait tout à coup le besoin de se
reposer après tant de violence. Plus de cris, plus de vociférations, plus de
glas sonnant la dernière heure des condamnés ! Philippe pensa qu’il ne
restait peut-être plus personne à tuer hormis lui-même. En ce cas, sa mort ne
devait pas être très loin. Cette nuit serait-elle la dernière ?
    Le
fracas des verrous tirés lui fit tourner la tête. Un geôlier entra, portant une
cruche d’eau et une miche de pain, mais ce n’était pas celui dont le prisonnier
avait l’habitude. Celui-là était un homme âgé qui traînait les pieds et dont la
longue barbe, d’un gris pisseux, descendait jusqu’à son estomac.
    – Qui
es-tu, toi ? demanda Philippe. C’est la première fois que je te vois.
    L’homme
posa sur lui le regard de deux yeux sans couleur bien définie et bordés de
rouge.
    – Bien
obligé ! grommela-t-il. L’Colin qui s’occupait des sous-sols s’est cassé
la jambe en dégringolant d’un toit où il avait grimpé pour mieux voir l’exécution.
Alors, on est venu m’rechercher, mais ces escaliers, ça vaut rien à mes douleurs.
D’autant que les marches sont glissantes et qu’à mon âge...
    – Qui
a-t-on expédié aujourd’hui ? demanda Selongey, peu désireux d’entendre la
liste des récriminations du vieillard.
    – Le
Chrétiennot Yvon. L’a fallu l’porter sur l’échafaud à cause d’ses jambes qu’la
torture a mis en morceaux mais ça a été du beau travail. Maître Jehan du Poix l’a
expédié d’un seul coup de hache et après il l’a coupé en quatre morceaux bien
nets pour qu’on les accroche à des gibeteaux aux portes de la ville. La tête
est à Saint-Nicolas, la jambe droite à la porte d’Ouche, la jambe gauche...
    – Je
n’ai pas envie d’en savoir davantage, coupa Philippe, dégoûté et inquiet pour
la première fois en pensant que l’on venait peut-être de lui décrire son propre
sort.
    Mourir
n’est rien pour un guerrier, mais s’il fallait qu’on le porte à l’échafaud à l’état
de loque brisée par les tourments et débitée ensuite comme viande de boucherie,
cette idée-là le révoltait et lui donnait la chair de poule. Il voulait pouvoir
regarder le bourreau dans les yeux et dominer de toute sa taille la foule venue
là comme au spectacle.
    – Sait-on
quand mon tour viendra ? demanda-t-il d’une voix cependant ferme.
    Le
vieil homme haussa les épaules et regarda le prisonnier avec une vague pitié.
    – J’sais
bien qu’c’est pas agréable à entendre, mais j’crois qu’c’est pour demain. On m’a
donné avis qu’un moine viendrait cette nuit pour vous exhorter. Va vous falloir
du courage.
    – Si
je n’en avais pas, je ne serais pas ici.
    Le
geôlier avait enfin déposé son pain et sa cruche et, comme un bon valet de
chambre, secouait la couverture abandonnée sur la couchette.
    – Vous
avez eu d’la chance jusqu’ici ! On vous a donné la meilleure chambre d’l’étage,
celle qu’on a r’faite.
    – Refaite ?
fit Selongey en considérant les murs
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