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En ce sang versé

En ce sang versé

Titel: En ce sang versé
Autoren: Andrea H. Japp
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sécheresse de cœur, aussi menteuse et manigancière qu’une impie et dont vous vantâtes les magnifiques qualités de future abbesse !
    — Me menacez-vous, monsieur ? contra-t-elle, furieuse.
    — J’ai déjà commis bien pis, madame ma mère. Je veux savoir. J’exige de savoir si nous pouvons lui trouver des atténuations, un baume sur le chagrin de son père.
    Elle le détailla et il sentit sa colère s’éteindre. Elle lui tendit le grand crucifix de bois sombre qui pendait à son cou et exigea :
    — Jurez, votre main droite touchant la Croix. Jurez sur votre âme et votre salut que ce qui suit restera à jamais entre nous.
    L’exécuteur posa la main sur le crucifix et martela :
    — Je le jure. Maudit sois-je si je m’en dédis.
    Mme de Gausbert prit une longue inspiration et commença :
    — Aucune. Aucune atténuation. Aucun baume, et j’en suis désolée pour messire de Tisans. Cependant, je vous ai fait jurer afin de ne pas répandre de sel sur ses plaies. En effet, dans la panique qui suivit la découverte du cadavre d’Henriette, notre bonne Muriette Letoine, aidée de la novice Fouquet, a subtilisé les aumônes qui se trouvaient sous le corps.
    — Pour faire accroire à un meurtre de vil détrousseur de chemin.
    — Hum…
    — Elles ne connaissaient pourtant pas Louis d’Ayon et ne cherchaient point à le protéger.
    — Non. En revanche, elles connaissaient la mauvaiseté d’Henriette. Je m’en veux tant de mon aveuglement. Muriette et Marguerite ont aussitôt songé à une vengeance, méritée selon elles. Elles ont soupçonné certaines de leurs sœurs. Aussi ont-elles brouillé les cartes afin d’aider les vengeresses.
    — De quoi se nourrissaient leurs suspicions ?
    Une autre pénible inspiration, puis :
    — Henriette tenait un carnet très spécial qu’elle noircissait chaque soir dans le scriptorium. À force de ruse, tant elle semblait veiller sur lui, le cachant en un lieu sûr dès sa rédaction terminée, Marguerite a fini par le parcourir.
    — Qu’était-ce ? la poussa Hardouin, sentant que la suite serait odieuse.
    — Un… procès général de toutes et chacune, un tissu d’exagérations et de menteries puisque seule Henriette trouvait grâce aux yeux d’Henriette. Elle y énumérait des péchés, des manquements, des vices d’âme, le plus souvent de sa fabrication. Pis, la page de garde désignait le futur destinataire du carnet.
    — Qui ?
    Elle leva le regard vers lui et il y déchiffra un terrible chagrin. Elle avoua enfin :
    — Au respecté, loué et bienveillant seigneur inquisiteur d’Alençon.
    — Oh, fichtre ! souffla l’exécuteur. Elle allait dénoncer ses sœurs, les livrer à la Question ?
    — Hum… pour des peccadilles travesties en blasphèmes ou en déviances de foi, en débordements de sens, en vilenies, que sais-je ? Inutile de vous préciser que sa mort, si affreuse fut-elle, ne causa aucun chagrin, bien au contraire. Je n’ai commencé à flairer affaire louche que lorsque l’affluence de mes filles à la chapelle Saint-Éloi m’a alertée. Je n’ignorais pas qu’Henriette n’était guère appréciée, ce que je mettais au compte de l’intransigeance de sa foi. Aussi ce soudain recueillement, dans sa chapelle préférée, m’a-t-il intriguée.
    — Elle y cachait l’odieux carnet, déduisit Hardouin.
    — De juste. Il y fut découvert par Marguerite Fouquet, glissé derrière le bénitier, quelques heures avant votre venue en compagnie de messire de Tisans. Confiante, Marguerite me le remit, m’expliquant ce qu’il renfermait et à qui il était destiné. J’ai cru dégorger.
    — En avez-vous pris connaissance, si je puis ?
    — Bien sûr, à mon devoir, pour vérification. Les ravages d’un venin commencent dès qu’il s’insinue en vous. J’ai brûlé le carnet et fait jurer silence à Muriette et Marguerite. Elles emporteront le secret dans la tombe, même si d’autres connaissaient l’existence du carnet et le redoutaient. Cependant, dans quelques semaines lorsque la paix nous reviendra, Henriette de Tisans sera exhumée en grande discrétion et son corps abandonné au creux de la forêt. Je ne pouvais interrompre la cérémonie par moi prévue, par respect pour M. de Tisans. Toutefois, elle ne mérite pas de reposer au milieu des Sourires de la Terre. Ainsi ai-je décidé. À Dieu, mon fils. Qu’Il vous garde toujours, vous, Son étrange créature.
    Ému par la force de cette
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