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Emile Zola

Emile Zola

Titel: Emile Zola
Autoren: Edmond Lepelletier
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ce sanglant chemin de 1870, jalonné de nos morts. Nous aussi, après lui, nous avons retourné cette triste terre rouge, pèleriné à ces champs de bataille qui virent l'écroulement d'un empire et le chancellement d'une nation. Et nous pûmes nous convaincre, en contrôlant historiens, faits, détails, souvenirs, témoins, de quelle scrupuleuse vérité, de quelle exacte et sévère documentation témoignait, pour le romancier méconnu, ce livre douloureux, mais probe : la Débâcle.
    La postérité appréciera plus justement, plus loyalement que beaucoup d'entre nos contemporains, admirateurs et contempteurs, l'œuvre littéraire de Zola. Elle s'occupera un peu moins de l'auteur de J'accuse et un peu plus du romancier historien de la Fortune des Rougon, du psychologue et du paysagiste de la Page d'Amour, du robuste peintre de la vie ouvrière dans Germinal et Travail.
    Nous pouvons, cependant, porter déjà un jugement, moins partial, moins passionné, dégagé des mesquines préoccupations de l'actualité et de la polémique, sur cet écrivain génial qui, avec Victor Hugo, Balzac et Renan, personnifiera les lettres françaises au XIXe siècle.
    Un tri se fera dans le nombre considérable des écrits de Zola. C'est forcé, et la postérité ne recueille jamais tout ce que laisse après lui un grand producteur. Déjà on n'accepte que sous bénéfice d'inventaire l'héritage de Balzac et d'Hugo.
    Une sélection se fera dans l'ensemble des Rougon-Macquart. L'Assommoir, Germinal, Nana, la Terre, dont la vogue, à leur apparition, fut considérable, conserveront leur retentissante notoriété. Ce sont des livres qu'il faudra avoir lus. Par contre, Son Excellence Eugène Rougon, la Conquête de Plassans, l'Argent, Pot-Bouille, le Ventre de Paris, le Bonheur des Dames, et oeuvres analogues, perdront de l'intérêt, au moins aux yeux du grand public. Les descriptions et les longueurs feront négliger les belles qualités de couleur et de style de ces ouvrages, au caractère technique et presque didactique. Mais, comme cela est arrivé pour Balzac, dont Eugénie Grandet, la Cousine Bette et d'autres études d'une humanité profonde et d'une psychologie éternelle ont gardé toute leur fraîcheur, toute leur vigueur native, ce sont les oeuvres de demi-teinte et de facture douce, comme Une Page d'amour, l'oeuvre, et la Joie de vivre, qui seront, tant qu'il y aura une langue française, lus, relus et admirés. Enfin, la Débâcle, tableau d'histoire, épopée douloureuse et véridique, mieux comprise, plus justement jugée, demeurera l'oeuvre maîtresse du génial et puissant écrivain.
    Le gouvernement de la République vient de donner à la dépouille de Zola, non sans quelque résistance, la sépulture glorieuse du Panthéon. On peut répéter, à propos de cet hommage national, ce que Zola disait de l'Académie française, et déclarer que, «puisque la France reconnaissante a un temple où elle reçoit les ossements des grands hommes», la place de ce grand ouvrier de lettres, qui fut aussi un grand artiste, s'y trouvait indiquée.
    Du moment qu'il existe un Panthéon, Zola devait y être. Sa place est dans la glorieuse nécropole où reposent les célèbres citoyens, hommes d'action ou hommes de pensée, qui ont illustré la nation. Sans doute, l'intention de la plupart de ceux qui ont réclamé et obtenu ce posthume triomphe visait moins l'homme de lettres, le romancier des Rougon-Macquart, que l'homme départi, l'auteur de la lettre J'accuse, le défenseur de Dreyfus. On peut regretter cette interprétation. Mais qu'importe cette satisfaction d'un instant, et cette équivoque destinée à s'effacer dans l'apaisement du temps ? Qui donc, dans les rangs, encore invisibles, inconnaissables, des admirateurs qui nous suivront, se préoccupera de l'intervention de Zola dans un procès d'espionnage, autrement que comme d'un épisode de sa vie, d'une anecdote ? Est-ce qu'on se souvient aujourd'hui que Balzac s'est fait l'avocat officieux d'un assassin, nommé Peytel, réputé, lui aussi, innocent ? La postérité pourra-t-elle s'intéresser au procès oublié, confus, inexplicable presque, de ce militaire, condamné et innocenté sans grandes preuves décisives, dans les deux cas, qui fut le client de Zola ?
    Le public, qui acclame aujourd'hui l'entrée solennelle d'Émile Zola dans les caveaux majestueux du Panthéon, ne constitue pas, dans sa majorité du moins, sa vraie clientèle, celle pour laquelle il a écrit
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