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C’était le XXe siècle T.3. La guerre absolue

C’était le XXe siècle T.3. La guerre absolue

Titel: C’était le XXe siècle T.3. La guerre absolue
Autoren: Alain Decaux
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tableau terrifiant : si la guerre se prolonge, ce sont des centaines de milliers, peut-être même des millions de victimes qui périront. De façon à triompher de la surdité de son interlocuteur, il enfle la voix et martèle les syllabes. Au bout de quelques minutes, le Premier ministre est à quia. Kido l’achève en lui demandant s’il oublie que l’empereur lui-même s’est prononcé en faveur de la capitulation.
    Accablé de douleur et peut-être de remords, le vieillard s’empresse de changer de camp. Humblement, il déclare qu’il s’emploiera de toutes ses forces à obtenir de tous les Japonais – sans exception – qu’ils obéissent aux ordres de Sa Majesté Impériale.
     
    Nuit du 12 au 13 août.
    Regagnant son ministère, le général Anami s’arrête un instant. Dans la nuit claire, la silhouette du mont Fuji-Yama, vénéré des Japonais, aimé de lui, se profile sur fond d’incendie. Il rêve un instant. Il revient de sa demeure privée de Mitaka où il a tenu à se retrouver au sein de sa famille. Il lui a fait ses adieux.
    Le ministère de la Guerre ressemble à une termitière en ébullition. Ouvertement, les officiers préparent un coup d’État. Pour commencer, on jettera en prison les « fauteurs de paix » : Suzuki, Kido, Togo, l’amiral Yonai. Après quoi on proclamera la loi martiale et l’on ira s’emparer du palais impérial. On saura « convaincre » l’empereur.
     
    Lundi 13 août, 3 heures du matin.
    Deux des mutins, le lieutenant-colonel Ida et le major Hatanaka, font irruption chez Anami. Ils le supplient de se mettre à leur tête. Déchiré, le général ne refuse ni ne consent. Les mutins se retirent désespérés mais leur démarche a porté. Vers 4 heures du matin, Anami envoie l’un de ses officiers porter un message verbal au général Umezu l’informant qu’il a l’intention d’en appeler à l’empereur pour que celui-ci refuse les conditions de capitulation imposées par les Alliés. Imprévue, la réponse d’Umezu :
    — Je regrette… mais je suis pour l’acceptation de la Déclaration de Potsdam.
    Anami ressent durement ce qu’il considère comme une défection. Il décide de prendre deux heures de repos et de se rendre ensuite au palais impérial.
     
    7 h 10.
    Le général Anami pénètre dans le bureau du marquis Kido. Calme mais ferme, il prend la parole :
    — Le pessimisme n’a jamais gagné une guerre. C’est parce que je suis persuadé que c’est en défendant désespérément notre sol que nous obtiendrons des Alliés des conditions plus favorables que je suis sûr qu’il faut poursuivre les hostilités.
    Kido répond sur le même ton :
    — Sa Majesté a pris une décision. Elle a été communiquée aux Alliés. Si l’empereur revenait sur sa parole, il passerait pour un dément ou pour un demeuré. Comment pouvez-vous envisager de voir l’empereur se couvrir de ridicule ?
    Pour la première fois au cours de l’entrevue, Anami sourit :
    — On voit bien que vous ne savez pas ce qui se passe au ministère…
    Il salue et se retire. Kido reste pensif : il est beaucoup plus informé sur les agissements des fanatiques que ne le croit Anami. Il plaint le ministre de la Guerre. À ses yeux, l’homme reste un soldat qui cherche à servir le mieux possible à la fois son souverain et son pays. Il est aussi le chef de l’Armée. Qui peut prévoir ce que va faire l’Armée ?
     
    9 heures.
    Le Conseil suprême de guerre se réunit dans l’abri du Premier ministre. Nul n’est surpris de voir les Six Grands se diviser en deux camps égaux. À midi, Suzuki lève la séance. Il faut bien déjeuner.
     
    À Washington, le président Truman s’impatiente : pourquoi la réponse japonaise tarde-t-elle tant ? Le secrétariat d’État le rassure en indiquant que, selon les informations en provenance de Tokyo, l’acceptation devrait parvenir dans la journée.
     
    Togo s’est enfermé avec les deux chefs d’état-major qui s’acharnent à lui faire changer d’opinion. Surgit l’amiral Onishi, sous-chef d’état-major de la Marine et père des kamikazes. Son moral est au plus haut :
    — Pour couler un cuirassé ou un porte-avions, il faut huit bombardiers et seize chasseurs. Avec les kamikazes, il nous suffit d’un à trois appareils.
    Avec une courtoisie exemplaire, Togo écoute Onishi développer son argumentation : il suffit de mobiliser vingt millions d’hommes et de les jeter en charges suicides sur
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