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Cahiers secrets de la Ve République: 1977-1986

Titel: Cahiers secrets de la Ve République: 1977-1986
Autoren: Michèle Cotta
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« J'ai toujours eu le même adversaire, insiste-t-il, la droite. »
    Quant à son chemin vers le socialisme, il s'irrite devant ce qu'il appelle une « formidable déviation » : « Les socialistes de la SFIO pensaient qu'on n'avait droit au titre de socialiste que si on était dans l'Église socialiste ! Mais, moi, en 1952, j'étais plus socialiste que Guy Mollet ! Je n'avais pas, c'est vrai, jeune, le socialisme à la boutonnière ! »
    Sa voix tremble légèrement, tant il s'énerve à l'évocation des camouflets que lui ont infligés tant d'hommes de gauche à l'idée qu'il n'était pas des leurs. Pense-t-il à ce moment, à ces années 1960 où son adhésion à je ne sais quelle union des forces de gauche lui fut refusée ? Je crois bien qu'il n'a pas oublié, mais je ne le lui rappelle pas : ce n'est manifestement pas le moment !
    « Qu'est-ce que le socialisme ? continue-t-il. C'est, petit a , la conviction que l'action individuelle ne peut s'exercer sans le relais des masses. Et c'est, petit b , la conviction que ce mouvement est forcément composé des travailleurs et des producteurs. Conviction à laquelle vient s'ajouter cette évidence à laquelle je suis arrivé progressivement : qu'il n'y a pas de libération de l'homme qui ne passe d'abord par sa libération économique. Il est vrai que ni ma formation idéologique, ni mon milieu social, ni aucune de mes expériences ne m'auraient permis d'emblée d'adopter une explication rationnelle du socialisme. Il n'empêche : en trente et un ans de vie politique, je n'ai jamais voté avec la droite contre les socialistes ! »
    Je le sens convaincu de ce qu'il dit, et, au-delà, blessé, même s'il ne le dit pas, par le procès que lui font aujourd'hui les communistes, et, dans une certaine mesure, quelques socialistes donneurs de leçons. Il admet avoir pendant longtemps davantage employé les mots de démocratie politique, de liberté, d'égalité que de socialisme. Mais il plaide qu'il a tout au long de sa vie été plus sensible à la justice qu'à toute autre valeur. « J'ai été élevé comme cela, sourit-il, dans ma petite province. » Il ajoute que ce à quoi il a été le plus sensible, depuis son adolescence, c'est à l'injustice de l'argent.
    Il a longtemps placé plus haut que les autres valeurs le sens du droit. « Quelquefois trop, précise-t-il à mon intention, car la vie et l'Histoire sont sans doute plus anarchiques que cela. J'ai été néanmoins nourri dans le sentiment qu'il n'y avait pas de société sans droit. »
    « Je ne vois pas là-dedans d'antinomie avec le socialisme », conclut-il.
    Après tout, c'est son chemin, même si sa stratégie d'union de la gauche n'a pas été seulement le terme naturel de cette évolution. Elle lui a également été dictée par une évidence : l'accession au pouvoir par la droite lui était fermée. Il a donc résolu de passer par la gauche.

    L'incursion dans son passé débouche tout naturellement sur l'évocation des législatives futures. Son objectif : que les socialistes obtiennent une victoire relative au premier tour – il sera satisfait si le PS atteint le chiffre de 7 à 8 millions de voix. Les communistes, distancés et solitaires, seraient, dans ce cas, responsables de l'échec : « C'est leur problème ! »
    « Moi, aujourd'hui, commente-t-il, je ne peux pas bouger, puisque je n'ai pas les clefs en main. »
    Quel est son sentiment vis-à-vis des communistes, quelques jours après la rupture ?
    « Ils sont sortis de ma pensée », me répond-il comme si je pouvais y croire.
    Puis il reprend : « J'aurais échoué, en revanche, si le Parti socialiste ne recueille pas ces 7 à 8 millions. Mais si le PS les obtient, quelle situation ! Ce parti vainqueur, poignardé dans le dos publiquement devant la France entière par les communistes ! Et les autres, à droite, éculés, fatigués, pachydermiques ! Je leur souhaite bien du plaisir pour l'élection présidentielle de 1981. »
    À ses yeux, le Parti communiste n'a pas seulement commis de faute politique, il a commis une erreur psychologique. « Car ils croyaient que le PS exploserait après cet échec : or il a été très solide, au contraire ! Après un tel bouleversement, je n'ai eu à exclure personne, à Trifouillis-les-Oies ou ailleurs. Et d'ailleurs, quand cela aurait été le cas, il aurait suffi de couper une branche, l'arbre aurait survécu !
    « Non, finalement, le PC (auquel il m'a
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