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Azteca

Azteca

Titel: Azteca
Autoren: Gary Jennings
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l’entendre.
    « On pourrait se remettre à l’eau, suggérai-je, et faire le tour
de l’île à la nage, en restant suffisamment au large.
    — Fais-le si tu veux, dit Chimali. Pour moi, je suis si trempé et
si essoufflé que je suis sûr de couler tout de suite. Et si on attendait qu’il
fasse nuit pour rentrer ? »
    Je lui répondis : « Le jour, tu risques de rencontrer un
prêtre qui remarquera ta mèche rebelle ; mais la nuit, tu pourrais bien
tomber sur un monstre bien plus terrible, comme Vent de la Nuit. Mais c’est toi
qui décides, je ferai comme toi. »
    Nous nous assîmes pour réfléchir un moment, attrapant distraitement des
fourmis à miel. A cette saison, il y en avait des quantités ; elles
avaient l’abdomen gonflé de nectar. Nous ramassions les insectes et les
mordions pour en sucer le doux miel. Mais c’étaient des gouttes infimes et même
si il y en avait beaucoup, nous commencions à avoir faim.
    « J’ai trouvé ! » dit enfin Chimali. « Je vais me
mettre la courge sur la tête, pendant tout le chemin. »
    Aussitôt dit, aussitôt fait. Evidemment, il ne voyait pas très bien à
travers le trou, aussi je dus le guider, et nous étions tous deux
considérablement handicapés par notre charge de canards morts, lourds et
mouillés. Chimali trébucha et tomba plusieurs fois ; il se heurtait aux
arbres et dégringolait dans les fossés. Par chance, sa courge ne se brisa pas.
Mais je me moquai de lui tout le temps, et les chiens aboyaient à son
passage ; et comme le crépuscule tomba avant notre arrivée à la maison,
Chimali lui-même aurait pu épouvanter ou terrifier quiconque l’aurait aperçu
dans la pénombre.
    Pourtant, il n’y avait pas de quoi rire. Chimali avait de bonnes
raisons de surveiller de près sa chevelure rebelle. Car, voyez-vous, ceux qui
étaient pourvus de cet épi étaient choisis de préférence par les prêtres quand ils
avaient besoin d’un jeune garçon pour un sacrifice. Ne me demandez pas
pourquoi. Jamais un prêtre n’a pu me le dire. En effet, quel prêtre a jamais pu
donner des raisons plausibles aux règles déraisonnables auxquelles nous sommes
soumis, ou à la peur, au sentiment de culpabilité et de honte que nous
ressentons lorsque parfois, nous les tournons ?
    Je ne voudrais pas donner l’impression que nous vivions tous, jeunes et
vieux, dans une inquiétude constante. A part quelques lubies arbitraires, comme
la prédilection des prêtres pour les garçons aux cheveux en désordre, notre
religion et les prêtres qui la servaient ne nous imposaient pas de servitudes
trop lourdes. Les autorités, non plus. Bien sûr, nous devions obéir à nos chefs
et à nos gouvernants, nous avions certaines obligations envers les nobles pilli
et nous devions suivre les avis de nos sages tlamatini.
    Je faisais partie de la classe moyenne de notre société, les
macehualli, « les chanceux », ainsi appelés car ils sont à la fois
déchargés des lourdes responsabilités de la classe supérieure et de la
propension de la classe inférieure à être maltraitée.
    En ce temps-là, les lois n’étaient pas nombreuses, de façon que chacun
puisse les garder en tête et dans son cœur et ne les tourne pas sous prétexte
d’ignorance. Nos lois n’étaient pas écrites, comme les vôtres, ni affichées sur
la place publique pour que les citoyens consultent les longues listes d’édits,
de règles et de règlements afin de voir si la moindre de leurs actions
correspond bien aux « Il faut » et « Il ne faut pas ». Pour
vous, nos quelques lois peuvent paraître imprécises et fantaisistes et les
pénalisations encourues, injustement sévères. Mais nos lois étaient établies
dans le bien de tous – et tout le monde y obéissait, en en connaissant les
rudes conséquences. Ceux qui ne s’y pliaient pas étaient éliminés.
    En voici un exemple. Selon les lois que vous avez apportées d’Espagne,
les voleurs sont punis de mort. Il en allait de même chez nous. Mais, d’après
vos lois, un homme affamé qui vole quelque chose pour manger est un voleur. Pas
pour nous. Une de nos lois dit que dans chaque champ de maïs en bordure de la
route, il doit y avoir quatre rangées de plants à la disposition du passant.
N’importe quel voyageur avait le droit de prendre autant d’épis qu’en réclamait
son ventre vide. Mais si on surprenait quelqu’un qui cherchait à s’enrichir
avec avidité et qui pillait le champ de maïs à pleins sacs
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