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Alias Caracalla

Alias Caracalla

Titel: Alias Caracalla
Autoren: Daniel Cordier
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grouper pour sauver la France.
Cette solution présente un avantage : agir immédiatement, tout en gagnant du temps.

    Je rédige un brouillon :

APPEL AUX JEUNES FRANÇAIS
     

    Le traître Pétain demande la paix aux Boches.
Nous leur déclarons la guerre.

    Les jeunes qui veulent bouter les Boches hors
de France doivent se joindre à nous pour les combattre.

    RASSEMBLEMENT

    Haut les cœurs ! La France ne doit pas mourir.

    Fier de mon coup de clairon, je lis en enflant la
voix, ne doutant pas que mes camarades seront galvanisés. Un silence gêné accueille la proclamation.
Après un instant, Marmissolle me considère avec
une gentillesse narquoise  : « C’est pompier. Les gens
vont rigoler. Tu vas nous faire lapider. » Enhardis,
les uns après les autres se déclarent du même avis,
y compris Roy, qui d’ordinaire m’encourage toujours
amicalement.

    Une nouvelle discussion s’engage à partir du
brouillon. Dans la cacophonie, chacun propose ses
modifications. Mot après mot, la correction avance.
À la fin, je lis le nouveau texte :

APPEL AUX JEUNES FRANÇAIS
     

    LES JEUNES font appel à tous ceux de leurs
camarades qui aiment la FRANCE, qui savent
encore ce qu’elle représente et qui veulent SAUVER SON ÂME.

    Ils leur demandent de se retrouver dans ce but.

    GROUPONS-NOUS

    LA FRANCE NE DOIT PAS MOURIR

    Tout le monde applaudit, sauf moi : « C’est vraiment nul. Personne ne voudra mourir pour cette littérature à la noix. » Marmissolle me prend le bras :
« Ne t’inquiète pas, on fera passer ton mot d’ordre :
tuer du Boche. »

    Le plus dur reste à faire : imprimer les tracts rapidement et trouver une salle de réunions. Nous allons
d’abord salle Pétron, une salle de concerts utilisée
pour nos réunions habituelles. Elle est libre mardi,
mercredi et vendredi. Nous consultons l’imprimeur
Marimpouey, qui édite nos tracts. Il ne peut pas
nous les livrer avant mercredi après-midi, ce qui
exclut de tenir une réunion le soir même. Ce sera
donc vendredi.

    Après notre accord, j’ajoute au texte : « Vendredi
soir, à 6 heures, salle Pétron, 14, rue des Cordeliers. »
Il nous semble que la fin de la journée sera favorable à une mobilisation résolue.

    L’imprimeur nous donne quelques conseils de mise
en page et choisit, pour la première et dernière ligne,
un caractère gras du meilleur effet. En le quittant,
je regarde ma montre : 7 heures. Je n’ai pas encore
vu Domino. Sans doute est-elle passée à la permanence après mon départ. J’y retourne : personne.
Elle est donc rentrée chez ses parents, où elle ne
m’a jamais invité. Après une hésitation, je renonce,
trop intimidé à l’idée de la relancer.

    Avant de regagner Bescat, je dois encore porter
notre texte au Patriote et à L’Indépendant 3 , mais je
n’en ai plus le courage et en charge Christian Roy.
Brusquement, Domino me manque affreusement. Je
voudrais lui parler, me confier, partager avec elle mon
chagrin. Qu’en pense-t-elle ? Plus jeune que moi, ellen’a jamais fait de politique. Souffre-t-elle ? Comprend-elle ?

    N’ayant personne à qui confier ma détresse, je
rentre seul à Bescat.

    En route, je pense à mes fiançailles. Ont-elles
encore un sens ? Devant l’inconnu du lendemain,
n’est-ce pas un projet fou ? Jamais, je n’en ai parlé
à Domino, ni même à mes parents. Peut-être est-il
prudent d’attendre la tournure des événements avant
de me déclarer.

    En arrivant, je remets le brouillon de l’appel à
mon beau-père  : « C’est très bien. Mais que comptez-vous faire ? » Je lui rapporte ma première idée et
l’accueil de Marmissolle et des autres. « Ils ont raison : la guerre, c’est fait pour tuer, pas pour se faire
tuer. Du moins autant qu’on le peut. Ton projet ressemble à celui des francs-tireurs de 1871 : glorieux
mais peu efficace. Contre une armée, il faut une
armée. »

    Mon beau-père a raison : ma première idée manquait d’efficacité. L’action héroïque des francs-tireurs
n’a nullement empêché la défaite et l’occupation de
la France en 1871. Il faut inventer une riposte terrible, mais laquelle ?

    « D’ici à vendredi, vous aurez le temps de réfléchir. Il faut observer dans quel sens vont évoluer les
événements. » Il tient les mêmes propos lénifiants
que Marmissolle : ont-ils vraiment l’intention de
combattre les Boches ?

    Tandis que nous finissons de dîner sur la terrasse,
la
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