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Un jour, je serai Roi

Un jour, je serai Roi

Titel: Un jour, je serai Roi
Autoren: Jean-Michel Riou
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aigris. La cavalerie des crédits durera ce qu’il faut afin qu’il comble le trou de la manufacture de fer-blanc. Si fait, il rentrera dans l’ordre. Et se séparera de Delaforge.
    Ce jeune est attirant, adroit, charmant, fidèle dans la gredinerie. Pas une fois, Le Vau ne l’a surpris en train de prendre plus que sa part. Son second tient les comptes, et ils sont justes. Pour autant, le jeune homme va trop loin. « Un jour, je serai roi ! » répète-t-il. Le mot est venu aux oreilles de l’architecte. Mais se moque-t-il de lui ou parle-t-il sérieusement ? Sa cupidité semble sans limites, si bien que les fraudes deviennent par trop visibles. Louis Le Vau lui a expliqué que ce qui compte ce n’est pas ce qu’on vole mais ce que l’on voit ! Il est des choses que l’on peut faire, comme tailler plus court des poutres, creuser moins, jouer sur l’épaisseur des murs, il n’en est pas de même quand l’escroquerie consiste à rançonner les fournisseurs. D’aucuns se plaignent, raillent que les méthodes du manchot sont connues et ont fait crever le maçon Pontgallet. Delaforge sent le soufre… Allez, oust ! Et que viendra-t-il reprocher à l’architecte ? N’a-t-il pas profité pleinement de son statut ? Oui, cela pourrait finir sur une bonne séparation.
    Mais il existe ce carnet noir dans lequel les turpitudes des deux compères sont soigneusement consignées. Une bombe si quelqu’un tombait dessus. Le Vau songe à le récupérer. Et sait comment s’y prendre.

    À l’approche de l’hiver, Louis XIV devient impatient. La saison n’est pas bonne pour Versailles qui s’endort, hiberne, jusqu’au printemps prochain. Les travaux ralentissent, les hommes rentrent chez eux, la terre ne donne rien. Même Le Nôtre devient impuissant. S’il faut se forcer au casernement, prendre ses quartiers comme les soldats, cela n’interdit pas de préparer la prochaine campagne, de corriger les erreurs des manœuvres précédentes. Mais qu’il est dur pour ce roi jeune et fougueux d’accepter les résistances du temps !
    Il voudrait que la grotte de Thétis soit déjà achevée, et ne lâche pas Colbert et Le Vau, sommant les deux de réfléchir à l’agrandissement capital du château de son père. Ses idées se précisent. Il désire que la taille soit doublée, triplée, même. Le surintendant des Bâtiments écarquille les yeux ! Mais le roi n’en a pas fini.
    À quoi occupera-t-on l’hiver, puisque rien ne doit s’arrêter, pas même un jour ? Si les gelées empêcheront bientôt les travaux dans les jardins, il y a sûrement une vitre fêlée, une planche déclouée, un verrou rouillé méritant la plus grande attention. Et qu’en est-il des essais de tenture pour sa chambre ? Où en est-on à propos de ce tableau dont les finitions souffrent d’un retard, et encore de ce peu de filet d’or manquant aux croisées de l’antichambre de la reine ?
    Il faut voir cela avec Le Brun, à qui il est rappelé qu’on attend de lui des projets de statues en plâtre afin de décider de celles qui embelliront les allées au printemps prochain.
    Le Vau retient un soupir. Est-ce à ce grand roi de se préoccuper de ces détails ? L’architecte ne connaît pas son bonheur : Louis XIV n’en est qu’au début de la longue liste des doléances qu’il réserve à son trio de génie. Il veut plus d’arbres et des grands, hâte la pose d’une cheminée, s’agace, s’emporte, s’inquiète du descellement d’une pierre dans l’une des assises de l’Orangerie. Il faut que passe l’hiver, freiner l’impatience. Louis a tant d’idées nouvelles pour le printemps prochain !
    *
    À Versailles, Marguerite Pontgallet s’attend à trois ou quatre mois difficiles. Le 12 novembre, la première neige est tombée. Le maudit froid est précoce. Bientôt, le chantier s’arrêtera, Bergeron n’aura plus de travail à offrir, et il faudra tenir. Le gros de la troupe de Limousins a regagné ses pénates. Peu après la Toussaint, il y a eu une veillée, un grand feu, un bon repas, des chants, des rires, une ou deux engueulades à cause du vin, mais ce petit monde s’est quitté en se promettant d’être là début mars. Marguerite a l’hiver pour s’organiser. Bergeron lui a parlé de la grotte de Thétis et compte sur elle et sur ses troupes pour s’emparer de ce chantier qui plaît à Louis XIV. Il faut aussi s’attendre à la construction d’un réservoir près du château et aussi d’une tour d’eau à
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