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Suite italienne

Suite italienne

Titel: Suite italienne
Autoren: Juliette Benzoni
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prit le nom d’Innocent VIII.
    Un nom bien mal porté. Innocent était tout ce qu’on voulait sauf, justement, innocent. Plus débauché encore que Borgia, père d’une vraie collection de bâtards, il courait déguisé les rues de Rome la nuit, jouait gros jeu avec les plus jeunes de ses cardinaux et passait son temps à organiser de grandes fêtes pour les différents mariages de ses enfants. Sous son règne, on trafiqua des indulgences, on vendit des bulles pontificales, on en fabriqua même de fausses et l’on découvrit, avec quelque stupeur tout de même, que la fabrique était installée au Vatican même. Les consistoires furent autant de bagarres et un jour, l’on vit même le cardinal Borgia sauter à la figure du cardinal français La Balue {4} en le traitant de tous les noms. Il fallut séparer ces deux enragés…
    Mais le démon de midi guettait le vice-chancelier.
    Adriana Mila avait fait choix pour son fils Orsino d’une jeune fille de quinze ans appartenant à une grande et ancienne famille à peu près ruinée. En 1490, Giulia Farnèse arrivait à Rome pour épouser le jeune Orsino et Borgia ne connut plus le repos.
    Il avait accepté que le mariage eût lieu dans le plus beau salon de son palais, le « salon aux étoiles », mais quand il vit s’avancer Giulia, éblouissante dans sa parure de mariée, il comprit que cette belle enfant allait fixer à jamais son cœur et sa sensualité effrénée.
    Qu’il eût soixante ans et elle quinze ne faisait rien à la chose, qu’elle fût éprise de son jeune fiancé, pas davantage : Borgia savait qu’il n’aurait ni trêve ni repos tant qu’il n’aurait pas tenu dans ses bras et soumis à son désir cette blondeur lumineuse, ce corps déjà épanoui, cette chair nacrée qui semblait frissonner sous l’éclat des cierges.
    Pour l’heure, témoin du mariage, il lui fallait attendre, attendre une autre heure. Peut-être, s’il arrivait à la puissance suprême, Giulia accepterait-elle de se donner à lui ?… Bientôt peut-être : le misérable Innocent avait une si mauvaise santé…
    L’année 1492 débuta par un coup de tonnerre : en Espagne, les Rois Catholiques venaient de prendre Grenade, dernier bastion des Maures. La reconquête était terminée et la lourde férule d’Isabelle et de Ferdinand allait peser sur le royaume avec l’aide toute-puissante de l’Inquisition, que Sixte IV avait ranimée d’un long sommeil pour leur service.
    Puis, en avril, Rome apprit la mort de Laurent le Magnifique. Le médiateur de l’Italie, le modérateur des princes-forbans, le maître bien-aimé de Florence n’était plus, et déjà des prophètes de malheur couraient les rues de Rome, annonçant les temps de l’Apocalypse… Et le destin parut leur donner raison.
    En juin, le pape tomba malade, et fut très vite à toute extrémité. Il était si bas qu’il ne pouvait plus supporter que du lait de femme et tétait deux fois par jour une nourrice. Pour tenter de lui rendre vigueur, un médecin juif acheta trois enfants de dix ans et lui fit absorber leur sang… mais rien n’y fit. Début août, le triste règne d’Innocent VIII s’achevait dans l’horreur.
    Alors, Borgia jura que le prochain serait le sien, et tandis que, le 3 août, trois caravelles : « La Santa Maria », la « Nina » et la « Pinta » quittaient Palos de Moguer aux ordres d’un illuminé nommé Christophe Colomb, le conclave entrait en séance une fois de plus.
    Borgia avait surtout deux rivaux : La Rovere d’abord, naturellement, puis le jeune cardinal Ascanio Sforza, frère de Ludovic le More. Il savait qu’en tant qu’Espagnol, il n’était pas aimé. Alors, distribuant tous ses biens avec une folle prodigalité, il acheta littéralement les voix dont il avait besoin. À Sforza, il promit son palais de Rome et son château de Nepi, à Colonna, le monastère de Subiaco, à Orsini, plusieurs places fortes, au patriarche de Venise, 5000 ducats… et ainsi de suite.
    Tant et si bien qu’à l’aube du 11 août, la fenêtre du conclave s’ouvrit pour que fût proclamé le nom du nouveau pape. Et la foule qui attendait apprit que le cardinal Borgia venait d’être hissé au trône de Pierre, d’où il allait régner sous le nom d’Alexandre VI… Et toutes les cloches de Rome se mirent à sonner en même temps.
    Au palais de Monte Giordano, Lucrèce tomba dans les bras d’Adriana en pleurant de joie. Juan courut les tripots toute la nuit et
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