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Stefan Zweig

Stefan Zweig

Titel: Stefan Zweig
Autoren: Dominique Bona
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lequel elle forme cependant, selon leur fils, un couple harmonieux et sans nuages. Mais elle a conscience de sa supériorité sociale et ne perd jamais une occasion de rappeler qu’elle est une Brettauer avant tout. Lorsqu’elle veut adresser un compliment à l’un de ses fils, elle lui dit : « Tu es un vrai Brettauer », ce qui est pour elle une sorte de sommet. Socialement, la banque apparaît en effet comme une activité plus noble que le commerce, si florissant soit-il ; elle constitue une aristocratie.
     
    Originairement établie à Hohenems, petite ville allemande à la frontière suisse, la famille de la mère a acquis un caractère tout autre que les Zweig, avec ses racines en Moravie. Dispersée dans le monde, elle offre à Stefan des oncles, des tantes et une multitude de cousins Brettauer à Paris et à Londres, à New York et en Italie où son propre grand-père a fait ses débuts, à Ancône, avant de venir s’établir à Vienne. Si son père incarne à ses yeux d’enfant la ténacité et le labeur, s’il est l’ancre qui tient solidement le bateau, la mère avec ses robes de taffetas, sa pointe d’accent italien et ses cousinages aux quatre coins du monde, apporte le rêve, et avec lui toutes les incertitudes et tous les désirs. Il y a grâce à elle un peu de fantaisie, et presque du vague à l’âme, dans le décor solidement charpenté des Zweig. Encore cette fantaisie n’est-elle qu’impalpable et diffuse, et n’a-t-elle aucune influence concrète sur l’organisation des jours, où préside cette notion essentielle, ce mot clé de la famille : l’ordre. Peut-être faudrait-il l’écrire avec une majuscule !
     
    Du père, Stefan aura hérité – c’est lui-même qui le souligne – le goût d’une discrétion qui va jusqu’à l’effacement, et s’accompagne d’une austérité naturelle. Il raconte par exemple que Moritz Zweig ne se permit jamais d’aller s’asseoir à une table du café Sacher où sa condition de Fabrikant aurait été, selon lui, gênante au milieu des archiducs, comtes et barons, clientèle habituelle du célèbre établissement de Vienne. Stefan aura toute sa vie la même pudeur. Comme son père, il sera le plus discret des hommes et gardera toute sa vie, jusque dans sa célébrité internationale, un style modeste et doux. Même quand le temps sera venu de la publicité et de l’autopromotion il ne recherchera pas les projecteurs. Il sera fidèle à l’image pleine de réserve et de dignité de son père. Fidèle aussi à son orgueil. Moritz Zweig, dans une époque imbue de privilèges, d’honneurs, de récompenses, de palmes de toutes sortes, ne se compromet jamais à quémander quelque faveur que ce soit. Plus encore, il méprise les vanités sociales et se vante de n’avoir jamais rien demandé à un fonctionnaire ou à un ministre, qu’il n’ait pu obtenir de lui-même, par ses seuls mérites ou son travail. Cette exigence, cette rigueur, cette volonté de vouloir être soi d’abord, soi pour soi-même, devant soi-même, il va les enseigner à son fils. Ou les lui transmettre, simplement, par la voie de l’exemple. « De n’avoir jamais rien demandé, écrit son fils, de ne s’être jamais engagé dans la voie des requêtes et des remerciements, il en concevait une secrète fierté, qui lui était plus chère que tous les signes extérieurs de la distinction. » L’orgueil et le goût d’une liberté personnelle : ce sont les cadeaux du père à son plus jeune fils.
     
    Si l’aîné, solide et calme, voire un peu rude, ressemble physiquement à Moritz, Stefan est le portrait de sa mère, en plus mince et plus longiligne. Il a ses traits fins, son sourire et ses yeux noirs, qui pétillent. Il a sa vivacité, sa gaieté et ses sautes d’humeur. Autant Alfred est d’un caractère égal, comme Moritz, autant Stefan se montre enclin aux crises de colère et aux accès de mélancolie. Il peut être tour à tour excité ou abattu, « neurasthénique » comme disent les médecins appelés à analyser son cas. Sensible, comme sa mère, à un nuage qui passe ou à la couleur du ciel, il est nerveux et imprévisible, né un 28 novembre, sous le signe du Sagittaire. Le signe du Feu de l’hiver.
     
    Confié à des nourrices, comme tous les enfants de la bourgeoisie d’alors, confiné dans la nursery puis dans sa chambre, à distance respectueuse de la vie mondaine que mènent ses parents, il souffre d’être un enfant.
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