Serge Fiori : s'enlever du chemin

chemin, de même que celui
d’écrire un livre tiré de ses réflexions sur Facebook, en
quelque sorte un recueil d’aphorismes, et peut-être enfin
acquiescer à l’idée d’une biographie, d’un portrait. Il sait
qu’il a des choses à dire. Son immersion dans les réseaux
sociaux lui a redonné des ailes, stimulé son goût de s’exprimer, de créer, de renouer avec le public. Facebook a ramené Serge Fiori au sein du monde.
    C’est précisément durant cette période que Serge et moi
avons eu l’idée de cet ouvrage. L’hiver précédent, j’avais
amorcé un projet de livre que je ne parvenais pas à développer   ; je stagnais avec mon sujet. Un soir, Serge m’explique qu’il a reçu, à plusieurs reprises au cours de sa vie, des
offres d’écrivains ou de journalistes prêts à écrire sa biographie. Il se disait alors qu’il préférerait le faire lui-même   :
d’abord parce qu’il se voyait mal raconter sa vie intime à un
inconnu, mais aussi parce qu’il avait été tellement souvent
floué dans sa vie qu’il ne faisait désormais plus confiance à
personne. Par contre, il n’avait pas envie d’écrire lui-même
sa biographie. «   Dommage, me dit-il, que je ne connaisse
pas un auteur en qui j’aurais suffisamment confiance pour
me livrer, quelqu’un qui sache et aime écrire.   »
    Sur ces derniers mots, Serge me regarde en silence. Nous
avons exactement la même pensée et nous la percevons
dans le regard de l’autre. Dans un souffle, je lui demande   :
    «   Et pourquoi je ne l’écrirais pas moi-même   ?
    —
Ben c’est en plein ça   ! C’est sûr, avec toi, je le fais   !
    —
Tu es certain, Serge   ? Parce que moi, je suis très sérieuse   !
    —
On commence quand   ?
    —
Ben… tout de suite   ! Je cherche un éditeur dès demain   !   »
Et dès le lendemain, Marie-Claire et moi avons fait équipe pour trouver un éditeur. Nous avons établi la liste des
personnes à rencontrer, des tâches à accomplir. Ce nouveau projet nous procurait à tous une énergie nouvelle.

    Serge et Hélène développent une grande complicité   :
«   On est comme des jumeaux. On pourrait littéralement
passer vingt-quatre heures par jour l’un à côté de l’autre,
sans rien faire, sans rien dire. C’est un rapport comme je
n’en ai jamais vécu. Notre couple, c’est comme une “musique qui danse”   », confie Serge.
    Leur relation amoureuse, même à cinq cents kilomètres de distance, les comble. Les moments de manque
sont apaisés par une proximité que permet aujourd’hui la
technologie, avec Skype, Facebook ou avec le téléphone   :
quand les deux se retrouvent enfin physiquement, c’est la
fête chaque jour   !
    Hélène, de son côté, a instauré une sorte de rituel   : les
jeudis soirs, même lorsqu’ils sont séparés, ils regardent
ensemble en maintenant une constante communication
l’émission d’affaires publiques Bazzo.tv, à Télé-Québec.
Hélène se réjouit de constater avec quelle fougue Serge retrouve son côté nationaliste, très fleurdelisé, en écoutant
débattre de politique et de culture québécoise. À chaque
émission, un éditorialiste vient donner son point de vue
sur l’actualité et Serge s’enflamme dans son salon   ; il repousse leurs idées, défend les siennes, argumente, tant
et si bien qu’Hélène ne cesse de lui dire   : «   Avec toutes les
idées que tu as – tu en as sur tout – pourquoi tu n’y vas pas,
toi, chez Bazzo, les exprimer   ?   » Cette émission est devenue
une religion pour le duo, mais c’est surtout de voir Serge
de nouveau vibrer qui conforte Hélène   : son homme n’a
jamais été si affirmatif et solide dans ses positions, si intéressé, si vivant   !
    Serge Fiori n’est pas amoureux que d’Hélène, de son
nationalisme et de sa fibre patriotique   ; il l’est aussi de la
région d’où elle vient. Il se reconnaît d’emblée dans cette
population ouverte, souverainiste, qui a eu le coup de foudre trente ans plus tôt pour Harmonium   : Fiori et les Bleuets
se sont mutuellement adoptés. À un point tel qu’il s’essaie
parfois à l’accent de la région   ; puisque c’est un musicien
qui possède une oreille formidable, il a bien «   enregistré   »
l’accent du Saguenay-Lac-Saint-Jean, et il peut l’analyser,
le décortiquer, en expliquer la musicalité, déterminer les
syllabes qui montent, disserter sur les finales de