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Retour à Soledad

Retour à Soledad

Titel: Retour à Soledad
Autoren: Maurice Denuzière
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livres au White's. Il repose maintenant près de son père. Il n'aura pas été lord Malcolm bien longtemps, murmura Simon Leonard.
     
    – Cela a dû être une épreuve pour Ottilia. Elle aimait Malcolm comme un frère, dit Charles.
     
    – Elle a fait son devoir d'épouse, disons plutôt de sœur, en effet, rectifia Cornfield, qui savait à quoi s'en tenir sur l'étrange union formelle de son neveu avec sa fille.
     
    – Encore un deuil ! Beaucoup de morts en peu d'années. Je perds avec Malcolm un ami, de commerce hasardeux mais fidèle, commenta Charles.
     
    – Ottilia vous reste. Elle annonce son retour dans trois semaines, conclut le lord.
     
    Plus tard, dans la soirée, Charles se demanda si Fish Lady était vraiment sorcière, et si la mort de lord Malcolm Murray pouvait être considérée comme le signe annoncé.
     

    La réponse vint, par un matin pluvieux de novembre, quand lord Simon demanda à l'ingénieur d'aller chercher lady Ottilia à Nassau, où elle était arrivée à bord d'un paquebot de ligne New York-Cuba.
     
    – Nous n'allons pas lui faire attendre le bateau-poste de la semaine prochaine. J'envoie l' Arawak avec Colson, mais j'aimerais que vous soyez à bord, Charles, pour accueillir Rosebud.
     
    – J'allais vous le demander, dit Charles.
     
    Pendant le voyage, quand il ne se tenait pas sur la passerelle, près de Lewis, Charles Desteyrac, vêtu du grand manteau de toile huilée des marins, marchait sur le pont, dans le pizzicato de l'ondée sur le teck. Il se préparait à revoir Otti comme si cette entrevue devait être différente de toutes celles qui l'avaient précédées. La joie de ces retrouvailles, qu'il combattait encore la veille, comme si elle cachait une indécente ambiguïté, il l'accueillait maintenant avec impatience et bonheur. Sur l' Arawak , homme solitaire, il allait au-devant d'une femme de qui il avait pensé autrefois : « Je pourrais l'admirer comme une œuvre d'art, mais non l'aimer. » Or, il percevait maintenant que les exigences de certaines amours ne peuvent être comblées par la chair et que le faisceau de sentiments, à la fois purs et ténébreux, dont sa relation avec Ottilia avait été voilée, cachait une secrète alliance.
     
    Quand, sur le quai, en pleine bourrasque, Charles aperçut Otti dans ses vêtements de deuil trempés par la pluie, il lui ouvrit spontanément les bras. Elle s'y blottit, haletante, ses larmes se mêlant aux gouttes de pluie qui mouillait son visage.
     
    – Vous êtes venu. Ah ! Vous êtes venu ! répéta-t-elle pour se persuader de la présence de l'homme qu'elle aimait.
     
    Plus tard, à bord de l' Arawak , alors qu'ils étaient assis côte à côte sur le canapé, dans le salon dit de l'armateur, elle raconta les derniers jours de Malcolm.
     
    – Il fut joueur jusqu'à son dernier souffle. Un vendredi, il paria cinquante livres – somme énorme ! – avec son médecin, misant qu'il serait encore vivant une semaine plus tard. Cette fois encore, il perdit. Il mourut le mercredi suivant. Sur sa table de chevet, il avait disposé une enveloppe destinée au médecin et qui contenait les cinquante livres, rapporta Ottilia, émue par ce souvenir.
     
    Charles lui entoura les épaules de son bras et lui baisa le front.
     
    – Oh, Charles ! Qu'allons-nous faire et dire, maintenant que tout est clair entre nous ? Pourrons-nous avoir un semblant de bonheur ?
     
    – Le bonheur de chacun dépend de sa capacité d'illusion, dit-il.
     
    – Pour n'y avoir jamais puisé, j'ai une grande réserve d'illusions. Je suis prête à les partager avec vous ! Qu'allons-nous faire ? répéta-t-elle soudain, à la fois gaie et anxieuse.
     
    – Nous allons conjuguer nos illusions, mais aussi nos forces et nos faiblesses, pour vivre ensemble à Soledad, décida Charles.
     
    Au moment de se séparer de Charles pour la nuit, Ottilia sortit de ses bagages un tube de carton, utile au transport des documents fragiles.
     
    – Malcolm m'a dit, une quinzaine de jours avant sa mort : « Le moment venu, vous remettrez ça à mon ami Charles », rapporta-t-elle.
     
    Intrigué, Desteyrac déboucha le tube, d'où glissa une grande feuille de papier. Déroulée, celle-ci révéla le dessin et le plan, étage par étage, d'une maison coloniale de belle allure. Un billet était joint, qu'il lut : « Pour Otti et Charles. Cette maison sera la vôtre à Soledad. Si vous le voulez, en mémoire de moi.
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