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Requiem sous le Rialto

Requiem sous le Rialto

Titel: Requiem sous le Rialto
Autoren: Nicolas Remin
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logique.
    Il afficha alors un sourire avenant.
    — La baronne, j’en suis sûr, sera fière de vous.
    — Violetta, enchaîna Spaur dont les yeux prirent soudain une expression rêveuse, s’intéresse beaucoup à mon travail. Peut-être cette distinction sera-t-elle suivie d’une invitation à la Hofburg ?
    Il se redressa sur sa chaise et remit en place sa serviette comme s’il s’agissait d’une queue-de-pie.
    — La baronne serait ravie d’y être reçue, précisa-t-il.
    — À Vienne ?
    — La Hofburg se trouve à Vienne depuis plus de cinq siècles, en effet, répliqua le commandant non sans un certain agacement. À ce propos, d’ailleurs, poursuivit-il sur un ton à nouveau affable, elle s’est beaucoup réjouie de votre invitation et s’est empressée de répondre à madame votre mère.
    Exact, la baronne Spaur avait déjà répondu. Sur un papier cuve de couleur lilas, avec une bordure dorée et le lion de la famille. La comtesse Tron avait eu une mimique d’approbation.
    Le commandant regarda son subalterne d’un air tendu.
    — Aurons-nous l’occasion de rencontrer le comte de Chambord à votre soirée ?
    — Son Altesse a confirmé sa venue.
    — Voilà qui va plaire à la baronne, dit Spaur. Peut-être le comte s’inscrira-t-il sur son carnet de bal.
    Il ferma les yeux et fredonna quelques mesures de valse.
    — Peut-être serons-nous ensuite conviés au palais Cavalli.
    — Les Chambord ne reçoivent que tous les deux mois, observa Tron.
    — Je sais. Et leurs hôtes sont triés sur le volet. C’est précisément cela qui agace la baronne.
    Spaur se rembrunit.
    — Elle ne se sent toujours pas acceptée par la haute société. Comme si c’était une honte d’avoir joué sur les planches du Malibran. Violetta a renoncé pour moi à une grande carrière. Elle était l’étoile montante de la scène italienne.
    Hum… Tron se demanda si le commandant croyait lui-même à ce mensonge. Mlle Violetta n’avait jamais été l’étoile montante dans le ciel du théâtre italien, mais plutôt un ver luisant qui courait sans cesse le risque de passer inaperçu au milieu de ses collègues. Même s’il s’agissait – il fallait le reconnaître – d’un ver luisant tout à fait charmant. Et doublé d’une femme énergique, bien résolue à conquérir sa place dans le monde.
    — Quoi qu’il en soit, poursuivit le commandant de police, hier, la baronne a choisi nos costumes pour votre bal.
    Il se pencha au-dessus de la table et baissa la voix pour murmurer :
    — Nous incarnerons un couple célèbre de l’histoire romaine.
    — Lequel ?
    Spaur prit une mine embarrassée.
    — Elle ne me l’a pas encore dit. La baronne est parfois si…
    Il s’interrompit tandis que ses yeux prenaient une expression de surprise. En se retournant, Tron aperçut le sergent Kranzler, son factotum, qui s’approchait de leur table. Il tenait à la main une enveloppe de format papier ministre qu’il tendit à son chef par-dessus l’épaule du commissaire. Spaur l’ouvrit à l’aide de son couteau à dessert et en sortit une feuille aux lignes serrées. À mesure qu’il lisait, les rides entre ses sourcils se creusaient. Enfin, il releva les yeux.
    — Stumm von Bordwehr. Ce nom vous dit-il quelque chose ?
    — C’est ainsi que ce fou furieux, hier au commissariat, a prétendu s’appeler. Je doute que ce soit son vrai nom.
    — Détrompez-vous. Ses autres affirmations aussi sont exactes.
    — Vous plaisantez ? Il a dit être un officier de Sa Majesté.
    Le commandant ferma les paupières, comme au supplice.
    —  C’est un officier de Sa Majesté, commissaire. Pour être exact, un colonel du quartier général de Vérone en mission à Venise depuis quelques mois. À ce propos, ajouta-t-il, nous nous connaissons.
    — Vous vous connaissez bien ?
    Spaur secoua la tête.
    — Voilà des années que nous nous sommes perdus de vue. J’étais son supérieur dans le régiment de dragons Maria Isabella à Vienne. À l’époque, il était aspirant.
    Les commissures de ses lèvres s’abaissèrent.
    — Un jour, j’ai dû le mettre aux arrêts pour une histoire de femme.
    — Que s’était-il passé ?
    — Il avait des ennuis avec une dame du troisième arrondissement qui avait tenté, paraît-il, de lui dérober son portefeuille…
    Spaur s’interrompit un instant et fit une grimace indécise.
    — L’affaire, reprit-il enfin, n’a jamais été résolue. Leurs
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