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Petite histoire de l’Afrique

Petite histoire de l’Afrique

Titel: Petite histoire de l’Afrique
Autoren: Catherine Coquery-Vidrovitch
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partir des années 1880 l’ensemble du bassin du Tchad, installant sa capitale (et, si l’on en croit la tradition, un palais de cent chambres dont il ne reste que les ruines) au Bornou, à l’ouest du lac. L’histoire coloniale française le présente comme un tyran sanguinaire dont la conquête française était venue à bout en1900 grâce à une triple expédition partie d’Algérie, du Sénégal 4 et du Congo. Certes, Rabah ne fut pas précisément un tendre ; il coupa des têtes et fonda sa fortune sur les razzias d’esclaves. Mais c’était à sa façon un homme politique « moderne ». Il fit creuser des puits, planter des vergers, installer une ferme ; il adopta l’artillerie occidentale ; il recevait de la mer Rouge des fusils (c’était l’époque où l’ex-poète Arthur Rimbaud s’adonnait au trafic des armes et des esclaves en Éthiopie) et de Tripoli des boulets de canon et ses lunettes de vue. Rabah entendait régir à son gré son empire, et refusa obstinément de poursuivre les contacts noués, à l’est depuis l’Égypte et à l’ouest depuis la Bénoué (Nigeria oriental), par les Britanniques, qui l’auraient volontiers utilisé pour contrer les ambitions françaises dans la zone. Paradoxe : cinq des fils de ses principaux chefs, tués à ses côtés, furent confiés par les Français à la mission catholique du Gabon. L’un d’entre eux, Ibrahim Babikir, finit conseiller tchadien de l’Union française. Son frère Djama publia en 1950 la biographie de Rabah. Bref, on constate, à la fin du XIX e  siècle, une étonnante symbiose entre les méthodes des aventuriers venus d’Europe et celles des autochtones. Les premiers n’hésitèrent pas à recourir à la politique de la terre brûlée et aux méthodes locales de razzia à des fins de colonisation ; les seconds, ouverts sur le monde extérieur, se révélèrent prompts à s’insérer dans le nouveau système.
    C’est sur l’océan Indien que se mit en place un système véritablement colonial dès la fin du XVIII e  siècle. Un trafic intense entre l’île de Zanzibar, le sud de l’Arabie et Bombay contribua à la croissance des cités côtières swahilies héritées du métissage entre commerçants persans puis arabes et Africains de langues bantoues qui vivaient dans l’immédiat arrière-pays. Dans le premier tiers du siècle, le sultan régnant à Oman, suzerain des lieux, s’installa à Zanzibar dont il fit sa capitale en 1840. Puis, jusque dans les années 1870, il étendit son pouvoir sur l’ensemble de la côte 5 . Les Arabes omani se souciaient peu de politique locale — sauf à Mombasa, où les Shirazi, c’est-à-dire les nobles swahilis de souche locale ancienne, avec à leur tête la grande famille des Mazrui, leur résistèrent pied à pied. Pour se différencier des Omani, les Shirazi, issus de métissages arabes beaucoup plus anciens, s’inventèrent une lointaine mais douteuse ascendance shirazi (perse). Ils s’intéressaient surtout au commerce, qui prospérait grâce à l’alliance des marchands zanzibarites et des financiers indiens. Dans les villes de la côte, les colons arabes dominaient grâce à leurs vastes plantations esclavagistes de canne à sucre et de cocotiers ; ils nouèrent également des alliances avec les commerçants indiens, qui finançaient les expéditions caravanières vers l’intérieur du continent. Cette aristocratie citadine tenait à se distinguer d’une foule urbaine envahissante, celle des gens des caravanes venusde l’intérieur, dont la présence devint majoritaire dans le dernier tiers du siècle. D’où l’« invention » des Mijikenda , populace « africaine » dont les patriciens shirazi se différenciaient par leur mode de pensée — l’islam —, leur statut politique et leur mode de vie — les vêtements et les maisons urbaines à étage en pierre et à toit en terrasse.
    À Zanzibar, l’économie de plantation esclavagiste et la prolétarisation du personnel caravanier (porteurs, chasseurs d’éléphants ou soldats mercenaires) avaient créé de nouvelles conditions de travail, largement financées par des capitaux indiens. Les esclaves étaient plus nombreux que jamais, mais leur situation variait : à côté des esclaves de plantation ou des esclaves domestiques, un certain nombre d’entre eux furent autorisés à exercer leur artisanat ou à organiser des expéditions caravanières pour le compte de leur maître.
    Par
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