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No Angel

Titel: No Angel
Autoren: Jay Dobyns
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surexcité. C’était un mouchard – je te l’ai raconté –, il avait envoyé des anciens en cabane et j’ai décidé de remettre les compteurs à zéro… mais, mec, j’étais surexcité.
    Il eut un rire étouffé et reprit :
    — Sur la route, en allant à la rencontre de ce type, je passais cette chanson de Metallica, « Nothing else matters ».
    Il se tut, plongé dans des souvenirs sanglants ; puis il poursuivit :
    — Enfin, je l’ai fait, et je n’ai eu mon insigne des Filthy Few que des mois plus tard. Alors que c’était dans le journal le lendemain. Ce que je veux dire, c’est qu’on peut pas précipiter ces choses. T’en fais pas. Tu auras tes trucs. Faut qu’on voie comment ça va se passer, c’est tout.
    — J’ai pas envie d’attendre six putains de mois.
    — Faut qu’on voie. Tu sais, les fédéraux, l’ATF, le service de la sécurité publique, tous ces connards nous surveillent. Si on te donne les insignes ce soir, et si tu sors avec demain, ils voudront savoir ce qui se passe. Faut pas qu’on attire l’attention.
    Je gardai le silence. J’allumai une nouvelle cigarette.
    — Écoute, si toute la côte ouest – si tout les États-Unis – décidaient de t’accepter, le Conseil mondial pourrait casser la décision. Ces cons d’Européens nous emmerdent depuis des années et ils aiment pas qu’on donne les insignes trop vite. Faut qu’on reste cool. Faut que tu restes cool.
    — Merde, Bobby.
    — Sois patient.
    — Merde.
    Je prononçai le mot avec moins de conviction. Pourquoi Bobby me disait-il ça ? Pour me réconforter ? pour m’impressionner ? Nous tentions de lui coller ce meurtre sur le dos depuis qu’il l’avait avoué, à Vegas, mais nous n’avions pas trouvé d’affaire non résolue qui correspondait. Cela ne signifiait pas que ce n’était pas vrai, mais nous ne pouvions éviter de nous interroger… Bobby Reinstra racontait-il des conneries ?
    Je décidai que c’était sans importance. Bobby posa une main sur mon épaule et on rentra. Il m’entraîna jusqu’au bar, où je m’assis et bus un Jack Daniel’s sec. J’avais l’impression d’être vaincu. En moins de deux heures, j’étais passé de l’assurance à la peur, de l’euphorie à la déception, à la nausée. J’avais envie de traiter Bobby d’hypocrite. J’avais fait ce que je devais faire en tant que Hells Angel, et au lieu d’obtenir mes insignes – pour moi c’était tout ce qui comptait, ayant pratiquement renoncé à ma famille, désobéi à Slats… – je me retrouvais en plein merdier politique. J’eus envie de demander à Bobby : « Qu’est-ce qu’on est, des hors-la-loi ou des avocats, parce que j’en connais un rayon sur les deux. » J’eus envie de hurler : « J’emmerde les flics, j’emmerde le Conseil mondial et j’emmerde les autres chapitres ! » Je compris, à cet instant, que la fraternité à laquelle les Hells Angels affirmaient appartenir n’était qu’un groupe de solitaires incompris réunis par la haine et l’argent. Tout tournait autour des moyens de gagner de l’argent et de la protection du club contre ceux que nous haïssions. Nous haïssions les autres clubs, la population, la police. Nous haïssions le travail, nos épouses, nos petites amies, nos mômes. De temps en temps, nous nous haïssions nous-mêmes. Je dis « nous » parce que moi aussi j’en étais arrivé à haïr ces personnes et ces choses.
    J’étais infiltré depuis presque deux ans dans la peau de Jay « Bird » Davis. Pendant tout ce temps, j’avais cru que je contrôlais la situation, que je me transformais en Hells Angel. Et j’avais cru que c’était moi qui les infiltrais.
    Je voyais les choses à l’envers désormais. C’était eux qui m’avaient infiltré.
    On était tous des hypocrites.
    Teddy s’immobilisa derrière nous et dit :
    — Venez. Foutons le camp.
     
    On alla boire un autre verre au clubhouse. Tandis que Rudy nous donnait nos bières, Joby posa quelque chose sur mes épaules. C’était un blouson… son blouson. Il le drapa sur moi comme si j’étais un prince. Je me tournai vers lui. Il dit, d’un air contrit :
    — Bird, tu es un des nôtres, mec. Tu es un Hells Angel. Porte celui-là avant d’avoir le tien.
    Il se tourna vers Timmy et ajouta :
    — Teddy en a un qui t’ira.
    J’ôtai le blouson, me tournai vers Joby et le lui rendis.
    — Merde, Joby, pas question. Je porterai pas le blouson de
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