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Mon témoignage devant le monde-Histoire d'un Etat clandestin

Mon témoignage devant le monde-Histoire d'un Etat clandestin

Titel: Mon témoignage devant le monde-Histoire d'un Etat clandestin
Autoren: Jan Karski
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j’ai fait mes études.
    — Ça alors ! Il boit le whisky comme un Écossais mais préfère Lviv à Edinburgh.
    J’avais rarement joui d’une compagnie aussi sympathique ; aussi avons-nous longuement parlé et bu un bon nombre de verres. Au moment d’aller me coucher, j’étais de joyeuse humeur.
    Je me réveillai le matin avec une sensation de luxe. C’était si agréable de ne pas avoir les pieds transformés en blocs de glace à la minute où on les exposait à l’air. Il était bien agréable également d’espérer un meilleur petit déjeuner qu’un morceau de pain noir à la sciure et une tasse d’ersatz de café froid. Ce qu’on me servit, ce matin-là, valait la peine de tout le voyage !
    Tard dans la soirée, nous partîmes pour l’Angleterre à bord d’un bombardier lourd américain Liberator.
    Le lendemain, après un agréable vol de huit heures, nous atterrissions en Angleterre. Il me fallut pas mal de temps pour me retrouver à travers la complexité des services britanniques de contre-espionnage. Ce n’est que deux jours après que je fus remis aux autorités polonaises clxviii . Mon premier devoir était de me présenter devant Stanislas Mikolajczyk, alors vice Premier ministre et ministre de l’Intérieur du gouvernement Sikorski. Son ministère avait juridiction sur les activités de la Résistance et sa tâche principale était de maintenir le contact avec les organisations clandestines de Pologne, de leur assurer une aide financière et, si besoin était, des directives.
    Le rapport qu’il me fallait faire sur toutes les sections de la Résistance en Pologne et sur la situation générale sous l’occupation allemande me prit beaucoup de temps. L’impression que j’étais à l’étranger, libre, disparut lorsque je commençai à faire mon compte rendu. Alors tout mon esprit et mes sentiments furent ramenés en arrière, en Pologne. Et cela demeura vrai pour tout le travail qui suivit. Durant tout le temps où mon activité consista à communiquer ce que je savais des événements intérieurs de Pologne, je revécus les jours passés comme si je me trouvais encore dans l’atmosphère douloureuse de la Résistance, hantée par le spectre de la Gestapo.

Chapitre XXXIII Mon témoignage devant le monde
    Mon rapport préliminaire terminé, je fus reçu par le général Sikorski, alors Premier ministre clxix . L’admiration que j’avais pour lui, comme celle de tout notre peuple en Pologne, était immense et ne cessait de croître. C’était un des rares grands hommes qui n’écrasaient pas une nation de leur personnalité. Il ne cherchait pas à imposer sa volonté à la Pologne, bien que sa qualité de chef du gouvernement et de commandant en chef de toutes les forces armées – y compris les forces de la Résistance – lui donnât toute latitude d’exercer un pouvoir illimité.
    J’eus avec lui un long entretien au sujet des plans des chefs de la Résistance relatifs à la future organisation de la Pologne. Je lui déclarai qu’ils avaient en commun la même volonté de faire de notre pays une véritable et indestructible démocratie – une démocratie qui assurerait la justice et la liberté à tous ses habitants. Je dis à Sikorski quels espoirs le peuple avait mis en sa personne et voyait en lui le chef naturel de la Pologne libérée ; que les Polonais étaient prêts à tous les sacrifices pour atteindre ce but suprême qu’est la libération de la Pologne.
    Sa réponse fut celle-ci : « Les Polonais ne devraient pas oublier que le général Sikorski a déjà plus de soixante-deux ans et que c’est un homme très fatigué. Sa seule ambition est de pouvoir contribuer à la résurrection d’une Pologne souveraine et indépendante. »
    Il était évident que Sikorski n’avait pas l’intention de s’imposer comme dictateur de la Pologne. Son unique désir était de servir sa nation du mieux qu’il pouvait.
    Je comptais, à ce moment-là, retourner très rapidement en Pologne. J’ai donc demandé au général Sikorski de m’indiquer quel était son programme politique pour le temps de la guerre.
    — Avant tout, me répondit-il, je veux contribuer à maintenir l’unité entre les Nations unies. Seule cette unité pourra délivrer le monde du joug maudit d’Hitler ; elle seule peut nous apporter une paix durable. Il est indispensable de bien nous pénétrer de l’idée qu’après cette guerre il n’y aura plus de place pour aucun impérialisme,
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