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Marguerite

Marguerite

Titel: Marguerite
Autoren: Louise Chevrier
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grande distinction, veillait { ce qu’on considère la jeune paysanne avec égards, un peu comme une demoiselle de compagnie et non pas comme une parente mal dégrossie de la campagne.
    C’est ainsi que la petite Lareau fréquentait ses cousines en amies. Particulièrement Emmélie, qui avait maintenant dix-huit ans. Les deux jeunes filles éprouvaient une vive affection l’une envers l’autre depuis leur enfance. Pourtant différentes, tant par leur milieu que par leur caractère, elles avaient des personnalités complémentaires. La blondeur ronde de Marguerite et son doux caractère s’harmonisaient à la beauté brune et tranquille d’Emmélie. La vive intelligence de cette dernière, dont le cœur généreux ne s’encomlirait guère de futilités, et son goût prononcé pour la lecture et l’écriture - elle tenait même un journal intime - suscitaient l’admiration de Marguerite. De son côté, Emmélie s’émerveillait du talent inné de sa cousine pour couper une robe et l’orner de dentelles, broder des mouchoirs ou confectionner les plus jolis chapeaux de paille qui soient. Fort habiles, les mains agiles de la jeune fille transformaient une aulne*
    d’indienne ou un simple bonnet en une chose gracieuse.
    Entre elles, il y avait Sophie, la cadette de la famille, qui, du haut de ses seize ans, agissait déjà en grande dame.
    Marguerite se prêtait facilement aux caprices de cette jeune coquette qui avait toujours un chapeau à enrubanner, une vieille robe à rafraîchir ou une tournure de jupe à modifier.
    Ratoureuse et rieuse, Sophie présentait ses demandes avec une telle candeur qu’on ne pouvait lui résister: «Ma belle Marguerite, une catastrophe est arrivée à ma plus jolie câline, disait-elle en tendant un petit chapeau à la cordelette pendante. Tu peux la réparer? Et que penses-tu de ceci ? » ajoutait-elle en sortant de sa boîte à ouvrage un ruban soyeux d’une couleur { la dernière mode que Marguerite s’empressait de le retourner dans tous les sens, le pliant gracieusement, formant une cocarde ou un nœud ravissant qu’elle cousait de quelques points sur la toilette de sa cousine. Elle adorait imaginer de nouvelles fantaisies pour la ravissante Sophie.
    Bien sûr, les visites de Marguerite au village pesaient lourd sur les épaules de Victoire. A la ferme, sa fille accomplissait normalement nombre de tâches, ce qui allégeait le fardeau quotidien des corvées dévolues à la mère. Marguerite s’occupait des plus jeunes enfants et consentait parfois {
    mettre les pieds au poulailler pour nourrir les volailles. En plus de seconder sa mère { la cuisine, elle était l’habilleuse de la famille.
    Mais si Victoire tolérait les absences de sa fille, c’est qu’elle savait que les séjours chez les Boileau valaient en quelque sorte le couvent. Marguerite y avait appris à lire, à écrire et { broder. Et comme il n’avait jamais été question, au grand jamais, qu’une fille Lareau fréquente le couvent, son mari y consentait, mais du bout des lèvres; il aurait préféré que Marguerite reste à sa place, à la maison. Dès qu’il la voyait se préparer { partir au village, François rouspétait, répétant toujours la même ritournelle. Diable !
    S’occuper des poules et des cochons, mettre des enfants au monde, nourrir et habiller son monde, voilà tout ce que devait savoir la future épouse d’un habitant !
    Habituée aux protestations de son mari, Victoire se taisait, mais songeait que l’instruction pouvait toujours rendre service dans un ménage où le mari marquait d’une croix son contrat de mariage. Chez les Lareau, seules Victoire et Marguerite savaient écrire.

    *****
    Le matin qui suivit l’abattage du cochon gras, Victoire demanda { ses fils de chauffer le four { pain situé { l’exté-
    rieur, adossé à un mur de la maison. Une longue journée de cuisine s’amorçait.
    — Aujourd’hui, on fait boulange, annonça joyeusement la mère de famille à sa marmaille. Après la fournée de pains, Marguerite fera des tourtes { la viande, d’autres aux pommes et des croquecignoles* !
    — Des croquecignoles ! Hourra pour les croquecignoles !
    s’exclamèrent les enfants, se réjouissant { l’avance des délicieux beignets au sucre de leur sœur.
    Obéissant à leur mère, ils sortirent en se bousculant dans le froid piquant de décembre. Noël et Godefroi, les plus âgés, fendaient du bois en bûchettes que les plus jeunes, Joseph et Louis, jetaient
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