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Marguerite

Marguerite

Titel: Marguerite
Autoren: Louise Chevrier
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fallu toute la force du monde pour se retenir de l’embrasser. Mais René avait choisi' de ne pas connaître tout de suite le goût de ces lèvres adorées. Ce baiser l’aurait obsédé, lui aurait enlevé le courage de partir alors qu’il le fallait. La promesse de Marguerite lui suffisait. Et puis, une année sera vite passée, se disait le jeune homme en chevauchant.
    René ralentit son cheval, peu pressé de rentrer chez lui, profitant de ces dernières heures de solitude pour s’imprégner du paysage de Chambly et, surtout, pour songer à Marguerite.
    Elle n’était encore qu’une fillette que déj{, elle l’émou-vait avec ses jolies boucles sortant de son béguin et ses yeux pailletés d’or rivés sur lui, béats. Lorsqu’il revenait du collège pendant les vacances, il l’observait d’un œil attendri, attendant avec patience qu’elle grandisse. Entre-temps, Marguerite était devenue la compagne de jeu et l’amie intime de ses adorables sœurs Emmélie et Sophie. L’heureux caractère de la jeune fille illuminait l’univers de ce jeune homme taciturne et René avait l’ultime conviction qu’ils étaient destinés l’un { l’autre. Son aimée partageait avec lui ce sentiment troublant, il en était persuadé. Depuis qu’elle était sortie de l’enfance, l’échange des regards et des sourires était suffisamment éloquent, même s’ils ne s’étaient encore jamais avoués leurs sentiments. La certitude de leur attirance mutuelle lui avait cependant toujours suffi.
    L’année suivante, Marguerite allait avoir dix-huit ans.
    René, qui en avait vingt-trois, venait de terminer son apprentissage de notaire. Il avait cru, naïvement, que le temps était venu de confier à ses parents son désir le plus cher : épouser sa petite-cousine Marguerite Lareau.
    Il avait découvert, horrifié, que ses parents s’opposaient violemment à son projet de mariage.
    — Il est hors de question que tu épouses une paysanne !
    s’était exclamée sa mère avec indignation lorsqu’il leur avait avoué ses espoirs.
    Son père, d’ordinaire si affable, avait affiché un air mauvais en serrant les poings, masquant difficilement sa déception.
    — Pense { ton avenir ! Il te faut une épouse d’un rang égal au tien. Ta cousine appartient à une classe inférieure, malgré l’éducation dont elle a pu profiter chez nous. Jamais je ne donnerai mon consentement { une telle union. J’ai dit!
    Effondré, le jeune homme avait tourné les talons. Ce refus lui avait fait l’effet d’un coup de poignard. Epouser Marguerite était pour lui la chose la plus naturelle du monde. Il allait passer outre l’interdiction de ses parents, ouvrir son étude de notaire dans un autre village que Chambly et attendre que Marguerite atteigne ses vingt et un ans pour se marier, voilà tout.
    Mais le lendemain de cette conversation, Monsieur Boileau avait convoqué son fils dans son cabinet et lui avait tendu une lettre cachetée.
    — Prépare tes malles et fais tes adieux. Tu pars pour Québec. Avec ceci, avait-il ajouté en désignant la lettre, tu pourras réserver un passage sur le prochain bateau en partance pour l’Angleterre. Va, mon fils, fais ce voyage que je n’ai jamais pu faire et reviens dans un an pour nous parler des vieux pays. Le temps fera son œuvre et tu seras le premier { constater que Marguerite n’était qu’une amourette de jeunesse, une simple flamme qui se sera éteinte d’ellemême.
    René savait qu’il n’avait guère le choix que d’obéir. Aller contre la volonté de ses parents aurait des répercussions sociales complexes. De toute façon, comment résister à cette chance exceptionnelle que lui offrait son père ? Peu de fils de la noblesse pouvaient se targuer, d’avoir fait un tel voyage, alors que lui, fils de bourgeois, partait pour une année entière ! Quoi qu’il en soit, il n’avait pas dit son dernier mot.
    — Je me plie { votre volonté, père, et j’accepte de partir.
    Mais avec tout le respect que je vous dois, je crois que c’est vous qui aurez changé d’avis { mon retour. Sachez-le: je n’épouserai personne d’autre que Marguerite.
    René était sorti de la pièce en vitesse, faisant claquer la lourde porte de bois.

    Première partie

    La jeune épousée
    1802-1803

    Chapitre 1

    La saignée du cochon

    — Ah ! Sacrédié ! Le gaillard, il m’échappe ! hurla François Lareau en haletant.
    — Attention, Tétrault, vers la grange ! cria Joseph, au voisin
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