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Marguerite

Marguerite

Titel: Marguerite
Autoren: Louise Chevrier
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morte fort à propos. Enfin, il y a de cela bien longtemps, soupirait-il en admettant qu’on ne pouvait pas défaire ce qui était maintenant chose entendue.
    — Ils ont eu de nombreux enfants, comme dans les contes ? demandait naïvement Marguerite.
    Tout en lui adressant un regard bienveillant, Monsieur Boileau opinait:
    — Le sieur Hertel et sa dame ont eu une bonne douzaine d’enfants, dont de nombreux fils. Tous furent des guerriers habiles à comprendre les langues indiennes et à faire la guerre à la mode des premiers habitants de ce pays.
    A ce stade du récit, Monsieur Boileau faisait une pause et Sophie en profitait pour demander :
    — Parlez-nous de la famille Rouville qui possède de nombreux fiefs dans la partie de Chambly-Est. Est-ce vrai que monsieur de Rouville descend directement d’un des fils Hertel ?
    Monsieur Boileau hochait gravement la tête pour acquiescer et reprenait, narrant alors un épisode sanglant de l’histoire de la Nouvelle-France.
    — Un jour, Jean-Baptiste Hertel de Rouville, à la tête d’une petite troupe de Français et d’indiens, a laissé perpé-
    trer le terrible massacre des colons anglais du village de Deerfield, en Nouvelle-Angleterre. C’était en 1704, au moment où les Français et les Anglais se faisaient férocement la guerre. Ce Rouville-là était le grand-père du nôtre.
    — Les Anglais devaient avoir drôlement peur, répliquait Marguerite en frissonnant.
    — Je vous jure, mes enfants, que ces fameux raids Hertel étaient terrifiants ! Ils ont hanté les Anglais pendant près d’un siècle !
    —Heureusement que notre monsieur de Rouville n’est Pas comme son ancêtre, ajoutait Emmélie.
    —C'est
    vrai,
    reprenait Monsieur
    Boileau,
    admiratif.

    Melchior de Rouville est un héros, le plus beau fleuron de cette noble famille canadienne. Il a passé sa jeunesse à cheval, guerroyant vaillamment sur deux continents. Né en Nouvelle-France, il a été incorporé très jeune dans le régiment du Languedoc, en France, et a combattu le rebelle corse pour le roi français, récoltant les honneurs. De retour au pays, il s’est dévoué pour la couronne britannique avec la même ardeur en luttant contre les révolutionnaires américains en 1775.
    —Ce sont de belles histoires, mon oncle, disait Marguerite, fascinée.
    —Et véridiques ! s’exclamait le conteur. Mais de ces vieilles histoires, aujourd’hui oubliées, les descendants des Hertel n’en ont retenu que l’essentiel: une noblesse acquise par des faits d’armes largement récompensés par l’octroi de terres. Quant à la seigneurie de Chambly, morcelée en plusieurs fiefs entre les fils Hertel, elle forme dorénavant un réeseau compliqué d’apanages échangés, vendus ou reçus par le jeu des mariages et des héritages. Inutile de vouloir en démêler l’écheveau, les héritiers eux-mêmes s’y perdent encore ! Tout cela se passait à la belle époque de la Nouvelle-France, rappelait avec nostalgie le conteur, heureux de trouver chez les jeunes filles un public captivé. Mais rassurez-vous, mes chères petites, de nos jours, nous vivons tous en paix et de manière fort civilisée.
    Le soleil grimpait lentement { l’horizon lorsque la charrette des Lareau arriva au village de Chambly. Au tournant du chemin
    de
    la
    Petite
    Rivière,
    avant
    de
    prendre
    le chemin du Roi, apparut la maison rouge des Boileau.
    Marguerite songea qu’elle verrait bientôt ses cousines chez monsieur de Rouville, mais que René, leur frère, n’y serait pas. Il y avait déj{ plusieurs semaines qu’il était parti pour Québec afin d’embarquer sur un navire en partance pour l’Angleterre, un de ces grands voiliers comme elle n’en avait jamais vus. Depuis, Marguerite n’avait plus entendu parler de son cousin et n’osait pas demander de ses nouvelles, de peur de trahir leur secret.
    Le plaisir d’arriver au village dissipa rapidement le chagrin que lui causait cette absence et, maintenant, elle n’avait de cesse d’admirer le paysage magnifique qui se déployait autour du bassin de Chambly, décor somptueux qui changeait suivant le rythme des saisons. L’été, lorsque le soleil se levait au-dessus du fort, l’étendue d’eau arborait des reflets argentés et alors, on ne pouvait que croire aux vieilles légendes qui racontaient qu’une Dame Blanche, ou quelque fée des eaux, avait ordonné à la rivière de s’élargir { Chambly, comme pour faire une révérence aux montagnes de
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