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Ma mère la terre - Mon père le ciel

Ma mère la terre - Mon père le ciel

Titel: Ma mère la terre - Mon père le ciel
Autoren: Sue Harrison
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installé sur cette terre et avait pris le nom de Premier Homme. Aka, la montagne sacrée, protégeait leur village comme d'autres montagnes protégeaient d'autres villages à l'est et à l'ouest, tout le long d'une bande de terre qui s'étendait jusqu'aux confins du monde, de la glace à la glace.
    Tandis que la mère de Chagak parlait, les loutres aussi semblaient écouter. L'une d'elles s'approcha de l'ik, son bébé cramponné sur son dos, une autre loutre nagea assez près pour que Chagak pût la toucher. Mais lorsqu'elle leva la main, la loutre plongea dans une vague, s'entoura de varech et se mit à flotter, son petit museau pointu juste au-dessus de l'eau, les yeux clos comme si elle dormait.
    Puis Chagak ressentit un picotement sur son bras, un pincement à son ventre car une voix — peut-être celle de l'esprit d'une autre loutre — chuchota : « Bientôt, toi aussi tu auras des bébés, tes propres bébés. »
    Ce soir-là après leur retour, Traqueur de Phoques vint dans l'ulaq. Tout d'abord Chagak fut intimidée. Bien qu'elle ait toujours connu
    Traqueur de Phoques, il était difficile de penser à lui comme à un mari.
    Pendant que le jeune homme parlait de chasse et d'armes avec son père, Chagak resta assise dans un coin sombre, tête baissée, mais le travail qu'elle faisait était de ceux qu'elle exécutait depuis son enfance et ne nécessitait pas la surveillance de son regard, mais seulement l'agilité de ses doigts pour sentir l'épaisseur de la peau. Aussi semblait-il qu'un esprit dirigeait ses yeux vers Traqueur de Phoques et elle vit que tout en parlant à son père, le regard du jeune homme parcourait les murs de l'ulaq, les rideaux séparant la pièce principale de celles où l'on dormait, les niches qui renfermaient les cannes à creuser et les réserves de nourriture.
    Oui, pensa Chagak, Traqueur de Phoques s'intéressait à son ulaq. Lui et Chagak vivraient là avec sa famille, du moins jusqu'à ce qu'ils aient leur premier enfant.
    C'était un bel ulaq sec et solide. L'un des plus grands du village, assez haut pour qu'un homme pût s'y tenir debout, et même Chagak qui avait maintenant atteint sa taille adulte pouvait se tenir droite dans la pièce où elle dormait sans s'accrocher les cheveux aux chevrons. Son père pouvait franchir cinq pas dans toutes les directions, depuis le tronc d'arbre central permettant de grimper sur le toit, avant d'atteindre les épais murs de terre.
    « Nous serons heureux ici », pensa Chagak. Traqueur de Phoques la regarda et sourit ; puis il demanda quelque chose au père de la jeune fille, se leva et vint s'asseoir à côté d'elle. La lampe à huile de phoque dessinait des halos jaunes sur les parents de Chagak. Son père aiguisait la pointe d'un harpon, sa mère terminait un panier.
    Il faisait chaud dans l'ulaq, aussi Chagak ne portait-elle qu'un tablier en herbe tissée, son dos et ses seins nus. Traqueur de Phoques commença à raconter sa chasse, ses yeux noirs brillaient en parlant et ses cheveux voletaient sur ses épaules.
    Soudain il attira la jeune fille sur ses genoux et la serra dans ses bras. Elle en fut surprise et heureuse, mais craignait de se tourner vers ses parents et se sentait trop intimidée pour regarder Traqueur de Phoques.
    Il lui caressa les bras et le dos et Chagak jeta un coup d'œil inquiet vers son père. Mais il ne semblait pas se soucier d'elle et ne même pas remarquer qu'elle était assise sur les genoux de Traqueur de Phoques.
    Alors elle ne dit rien et resta seulement immobile, redoutant que tout mouvement intempestif vienne trahir sa joie et attire l'envie de quelque esprit jaloux.
    Chagak ramassa une autre framboise sauvage et la laissa tomber dans le sac tressé qui était maintenant plein à ras bord au point que les baies du fond s'écrasaient et que le jus dégoulinait sur ses pieds nus.
    Sa mère lui avait accordé une journée de liberté. Aussi Chagak était-elle partie dans la montagne en essayant de retrouver le carré d'ivraie qu'elle avait découvert deux étés plus tôt. L'herbe y était plus sauvage que celle poussant près de la mer et en séchant elle prenait une couleur vert foncé. Chagak l'utilisait pour faire les bordures quand elle tissait les modèles des rideaux et des tapis de sol, faisant ressortir l'herbe blanchie par le soleil qui poussait sur le toit de l'ulaq de son père.
    Elle regarda le ciel ainsi que la position du soleil au nord-ouest et hâta un peu le pas. Son père serait
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