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Louis Napoléon le Grand

Louis Napoléon le Grand

Titel: Louis Napoléon le Grand
Autoren: Philippe Séguin
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une sorte de résignation désabusée.
    Napoléon I er était au moins autant le parrain — sans illusions — d'une petite mafia que le chef de la France. Il semble prendre parfois autant de soin à gérer sa famille qu'à conduire le pays. Rien de tel avec Louis Napoléon, qui considérera le fait de bien traiter ses oncles et ses cousins comme procédant plutôt d'un devoir d'État que de liens de solidarité.
    A l'inverse, les traits qui en font surtout un Beauharnais, même s'ils vont s'accentuer dans sa longue intimité avec sa mère, sont perceptibles dès ses premières années à la Malmaison.
    Selon Mlle Cochelet, une des dames d'Hortense, « l'enfant était d'un caractère doux, timide et renfermé, il parlait peu ». Cela lui restera. Doux, il l'est. Gentil et sensible au-delà de l'émotivité et de la nervosité. S'il arrête les frais en Italie après Solferino, oubliant pour un temps les projets formés avec Cavour, c'est parce qu'il est bouleversé — comme l'a été Henri Dunant — par le spectacle des morts et des blessés de cette effroyable boucherie, et qu'il ne peut en supporter davantage.
    Il n'était pourtant pas le poltron que, dans ses jeunes années, sa mère avait craint de découvrir. Tout petit, en effet, la nuit le mettait parfois dans des états convulsifs où se mêlaient insomnies et angoisses. Il paraissait littéralement terrorisé, et les crises de larmes qui l'affectaient alors, crises de rage aussi, étaient comme le pendant de sa frayeur. On y verra la trace de sa naissance difficile.
    Mais il savait se maîtriser, faisant preuve en maintes occasions d'un courage physique qui, en effet, ne lui était sans doute pas naturel. Face aux terribles douleurs de la maladie de la pierre, ce courage atteignit parfois des sommets, notamment pendant la guerre contre la Prusse, qui marqua le paroxysme des souffrances que lui causait la maladie qui l'emporta. Des médecins l'ont dit: tout être normal à sa place serait descendu de cheval, aurait tout planté là, se serait réfugié dans un lit, en espérant trouver ne fût-ce que le début d'un soulagement de ce qui dépassait les limites du supportable.
    En maintes autres occasions, moins dramatiques, il força sa nature, au prix de coûteux efforts de volonté. Comme il força sa nature pour ne rien laisser paraître, sauf en de rares occasions, de ses réactions spontanées, voisines de la sensiblerie.
    A en croire les témoignages dépourvus de toute aménité de ses contemporains, il y réussit au-delà de toute espérance...
    On fera grand cas, en effet, de sa capacité de dissimulation: il n'était pourtant rien moins que sournois. Son repli sur lui-même, son apparente complaisance pour le secret ne s'expliquent pas seulement par son expérience de conspirateur. Ils tiennent d'abord à la solitude, qui aura marqué sa vie: fils unique, c'est-à-dire si souvent livré à lui-même malgré toutes les prévenances de sa mère, il sera rejeté par sa famille, par la cousine même qu'on lui destinait comme fiancée, et devra affronter seul l'exil en Amérique, l'exil en Angleterre, l'emprisonnement. Ses idées, il sera seul à les assumer. Même au temps de sa splendeur, au milieu de son entourage pléthorique et avec une nation à ses pieds, il saura qu'il ne peut compter que sur lui-même, les projets qui lui tiennent le plus à coeur étant considérés par ceux qui ont lié leur carrière à la sienne comme autant de dangereuses lubies.
    Pierre Guiral l'explique mieux que quiconque: « Le secret, c'est sa force, non par machiavélisme, mais parce qu'il sait seul où il veut aller. »
    Peut-être aussi dissimule-t-il parce qu'il est conscient de ses propres limites. Doté d'une exceptionnelle faculté de séduction en tête à tête, il n'était pas toujours brillant en société, et moins encore devant une Assemblée. De là son horreur de la discussion. D'autant qu'il déteste froisser. Et il n'aime pas les phrases. N'a-t-il pas expliqué un jour à son entourage que ses pensées vont habituellement plus vite que ses paroles? Alors, à défaut de pouvoir ou savoir persuader, il garde l'argument pour lui, le conforte, l'améliore, et s'en convainc toujours davantage. Une grande pudeur, un risque permanent de maladresse, des manières héritées de l'exil et qui pouvaient étonner et détonner, la crainte de la faute, tout cela le fait rester sur une prudente réserve. Il lui faut vraiment se sentir en confiance pour se livrer et
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