Bücher online kostenlos Kostenlos Online Lesen
Les joyaux de la sorcière

Les joyaux de la sorcière

Titel: Les joyaux de la sorcière
Autoren: Juliette Benzoni
Vom Netzwerk:
qu’elle.
    Ce jour-là le débat semblait rouler autour d’une invitation sur laquelle on n’était pas d’accord. La parole était à Madame de Sommières :
    — Vous n’êtes pas un peu malade, Plan-Crépin ? Que voulez-vous qu’à mon âge, j’aille faire chez les sauvages ?
    — Toujours des exagérations ! Nous n’avions cependant pas l’air, l’été dernier à Baden-Baden, de considérer Mrs Van Buren comme échappée d’un tipi iroquois ? Il me semble me souvenir que nous la trouvions d’un commerce agréable et je ne vois pas pourquoi une invitation de sa part nous fait monter sur nos grands chevaux ? clama l’interpellée qui ne s’adressait jamais à la marquise autrement qu’à la première personne du pluriel. Ce qui l’avait d’abord agacée mais qui, à la longue, finissait par lui convenir.
    — Commerce agréable ? Où allez-vous chercher des formules pareilles ? Nous ne sommes plus sous Louis XIV que je sache ?
    — Nous sommes surtout de mauvaise humeur… et de mauvaise foi ! Il est plus facile de chipoter mon langage que d’admettre que j’ai raison.
    — En quoi ?
    Estimant qu’il en avait assez entendu, Morosini fit son entrée découvrant ce à quoi il s’attendait : « Tante Amélie » trônant dans son grand fauteuil de rotin blanc garni de coussins en chintz imprimé de roses devant une table légère où s’entassait le courrier du matin – infatigable épistolière elle entretenait des relations postales avec une bonne moitié de l’Europe – et Marie-Angéline, arpentant le sol de marbre couvert de nattes fines en brandissant une lettre d’épais papier crème.
    — Eh bien ? de quoi disputons-nous aujourd’hui ? lança Morosini en allant embrasser sa grand-tante. Un point de l’Ecclésiaste ?
    La marquise lui offrit un sourire ravi :
    — Ne me dis pas que tu n’as pas entendu, mauvais sujet ? Alors ne me fais pas répéter. Ce que Plan-Crépin brandit comme un zoulou sa sagaie, est une invitation de Mrs Van Buren à séjourner dans sa villa de Newport pour la Saison.
    — Savez-vous que la villa en question est une sorte de palais tirant vaguement sur Versailles ?
    Elle lui jeta un regard noir bien que ses prunelles eussent gardé à travers la vie leur fraîche couleur d’herbe neuve. À près de quatre-vingts ans, elle conservait droite sa haute taille maigre et aristocratique, son long cou maintenu par une guimpe de tulle baleiné assortie à ses robes et soutenant une collection de sautoirs d’or et de perles agrémentés d’ambre, de corail rose, d’améthystes, d’aigues-marines ou d’opales dont elle savait jouer d’inimitable façon autant que du petit face-à-main qui s’y pendait. Selon une mode qu’elle chérissait toujours, elle portait en une sorte de coussin haut relevé sur la tête ses cheveux blancs où se mêlaient encore quelques mèches rousses et ses robes « princesse » la faisaient ressembler selon l’éclairage à Sarah Bernhardt ou à la reine Alexandra d’Angleterre. Elle avait l’esprit aussi vif que l’œil, la dent dure, le cœur généreux et Aldo l’adorait.
    Beaucoup moins décorative quoique dotée d’une échine aussi raide était Marie-Angéline du Plan-Crépin qu’elle appelait parfois son bedeau. Vieille fille – elle n’avait cependant pas plus de trente-huit ans – montée en graine sommée d’une mousse de cheveux pâles qui lui donnaient l’air d’un mouton jaune, elle avait le nez, les os et l’esprit pointus, possédait une culture quasi encyclopédique ainsi que des talents divers qui dans les années passées en avaient fait souvent pour Morosini une assistante des plus efficaces.
    En voyant entrer Aldo sa figure s’était illuminée :
    — Alors ? demanda-t-elle, vous avez vu le portrait ? Qu’en pensez-vous ?
    — Le plus grand bien en tant que portrait. Vous ne m’aviez pas dit que c’était un Boldini ?
    — J’ai voulu vous réserver une surprise agréable parce que je me doutais bien que le propriétaire ne vous plairait pas.
    — Ce n’est pas un modèle unique, tant s’en faut mais sa femme méritait mieux !
    — C’est aussi mon avis, soupira Madame de Sommières. Quand je pense qu’on l’a mariée à ce ladre sous prétexte qu’il a une belle situation ! Vos cousins Mercantour n’ont vraiment aucun sens des réalités, Plan-Crépin.
    — Ils tirent surtout le diable par la queue et nous le savons bien. Pour eux un chef de
Vom Netzwerk:

Weitere Kostenlose Bücher