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L'épopée des Gaulois

L'épopée des Gaulois

Titel: L'épopée des Gaulois
Autoren: Jean Markale
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mais à l’avoir justifié sans le dire expressément. Quand il parle des druides, il affirme que ceux-ci enseignent les jeunes gens au milieu des forêts pendant une vingtaine d’années au cours desquelles les élèves doivent apprendre par cœur des milliers de vers. Et bien peu de ces élèves sont capables d’aller jusqu’au bout de ces études entièrement orales. La sélection des nouveaux druides (ou tout au moins des bardes et des autres membres de la classe druidique) se fait d’elle-même par élimination de ceux qui n’ont pas eu la volonté, le courage et aussi le talent, d’engranger ces connaissances pendant vingt ans.
    C’est ce contenu de l’enseignement druidique que nous ignorons. Il est plus que certain que ces milliers de vers appris par cœur comportaient non seulement des réflexions religieuses, philosophiques, médicales et juridiques, mais également des récits concernant les temps passés. Or, à cette époque, l’Histoire proprement dite n’avait pas encore été dégagée de l’Épopée, et toute mémoire d’un passé plus ou moins lointain passait à travers les brumes de l’imaginaire, ou simplement du mythe , structure fondamentale de la pensée humaine, schéma primordial signifiant autour duquel s’articulait un récit événementiel. Mais la question du vrai et du faux ne se posait même pas : il était une fois … Cette analyse est valable pour n’importe quelle civilisation. Pourquoi ne le serait-elle pas pour la civilisation gauloise ? On peut donc admettre que les Gaulois, grâce à leurs druides et à leurs bardes, connaissaient de nombreuses épopées remontant aux temps les plus reculés de leur histoire. Mais comme elles étaient véhiculées par voie orale, nous n’en avons pas de traces authentiques comparables à celles laissées par les peuples de l’écriture. Sont-elles perdues à jamais ?
    Apparemment, la réponse est oui . Mais, à la réflexion, on ne peut se montrer aussi péremptoire. Les Gaulois, en effet, – et les Celtes d’une façon générale –, n’étaient pas les seuls peuples d’Europe, et ils ont eu nécessairement des contacts commerciaux et culturels, voire très souvent des conflits, avec leurs voisins, notamment les Grecs et les Latins. Or ceux-ci écrivaient et ils ont pu ainsi nous laisser des témoignages, parfois très brefs mais très éclairants, sur ces barbares turbulents qui les déroutaient grandement par leur attitude insolite et qui leur inspiraient même une crainte justifiée. Et si l’on se lance à la recherche d’une épopée gauloise perdue, c’est bien à travers les auteurs grecs et latins qu’il convient d’aller fouiller pour la retrouver et même pour tenter de la reconstituer.
    Dans son ouvrage essentiel Les Celtes , l’historien Henri Hubert se disait étonné par certains épisodes de l’ Ab Urbe Condita de Tite-Live, ce gigantesque ouvrage sur l’histoire de Rome depuis sa fondation, qui ne nous est d’ailleurs parvenu que fragmentairement. Les épisodes qui attiraient l’attention d’Henri Hubert étaient ceux du livre V relatifs à la prise de Rome par les Gaulois en 387 avant notre ère, ainsi que divers récits concernant les démêlés ultérieurs qu’avaient eus les Romains face aux tribus gauloises de la Cisalpine. « L’histoire des Guerres Gauloises, écrivait Henri Hubert, est quelque chose de bien singulier, d’assez fabuleux et de très épique 1 . » Il n’était pas le seul à s’interroger là-dessus. Dans son Histoire de la Gaule , un autre historien, Camille Jullian, fait part lui aussi de son étonnement : « La défaite des Romains, dit nettement Tite-Live, fut due à l’effroi magique ( miraculum ) que leur inspira le cri de guerre des Celtes. Les récits de Tite-Live, d’Appien et de Plutarque, colorés, détaillés, précis, pleins d’esprit religieux, assez favorables aux Celtes […] m’ont toujours paru inspirés en partie de quelque épopée gauloise , peut-être par l’intermédiaire de l’insubre 2 Cornélius Népos. Les récits de Polybe et de Diodore, plus sobres, plus honorables pour Rome, et plus courts, représentent une tradition différente 3 . » De toute façon, il ne faudra pas oublier que Tite-Live, tout imprégné de culture latine, chantre officiel de Rome, était cependant originaire de la Gaule cisalpine dont il connaissait bien les traditions. Il était en effet né à Patavium , c’est-à-dire Padoue. Au début de son
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