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Le Serpent de feu

Le Serpent de feu

Titel: Le Serpent de feu
Autoren: Fabrice Bourland
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dernières semaines. Les nazis ont entrepris de mettre un terme aux activités de nombreuses sociétés secrètes à l’intérieur de leurs frontières et de s’emparer par la force de leur matériel de travail 1 . J’ai également eu vent que des agents du Reich seraient sur le point d’être infiltrés jusque sur le territoire britannique pour mener à bien leur mission d’éradication. C’est la raison pour laquelle nous avons décidé de mettre en sommeil notre propre société.
    Kirkby se rencogna au fond de la banquette, sirotant une gorgée de limonade avant de reprendre ses explications.
    — Les reliques les plus précieuses de notre confrérie ont été déposées dans un coffre en bois, expédié il y a deux jours dans une auberge de la côte. Tel que vous me voyez, je m’en vais le récupérer et l’enterrer sur les falaises, entre Selsey Bill et Bracklesham Bay, en face de l’île de Wight. Cette fois, d’une manière que je n’avais prévue, l’existence de l’Aube dorée touche vraiment à sa fin.
    — Ho, ho ! J’imagine que c’est pour cette raison que vous vous montriez aussi peu bavard, la dernière fois que je suis venu m’entretenir avec vous. Au vu de la situation, vous ne teniez pas à vous étendre devant un non-initié sur la nature de vos activités ?
    — Précisément.
    — Soit, mais dans ce cas, pour quelle raison vous êtes-vous décidé à vous ouvrir à moi sur ce chapitre, aujourd’hui ?
    Il me dévoila un bref instant une enveloppe ivoire, portant un timbre-poste français, qu’il conservait dans la poche intérieure de son veston.
    — De la même manière que je l’ai fait pour d’autres anciens membres de l’Aube dorée, j’ai adressé il y a quelques semaines une lettre à Aleister Crowley, dans laquelle je l’alertais des derniers événements. En guise de réponse, j’ai reçu hier matin ce billet, expédié depuis la France, où je gage que Crowley se pavane dans un des palaces de la Riviera. À la fin de son mot, il se vante de la visite, durant son récent séjour londonien, d’une de mes connaissances, détective consultant de son état, qui l’aurait longuement questionné sur l’emploi des drogues astrales. Je sais que Crowley ne perd jamais une occasion de me faire tourner en bourrique, pourtant il m’a semblé qu’il me parlait de vous, Singleton. Ai-je eu tort de le penser ?
    Ignorant dans quelle mesure le célèbre mage était entré dans les détails, je préférais ne rien cacher.
    — Je crains que non.
    Kirkby goûta une nouvelle gorgée tout en ne me quittant pas du regard.
    — Crowley est certes un homme d’une grande intelligence, mais il n’a été tout au long de sa carrière que par trop imprévisible et inconséquent. Je vous déconseille donc de lier relation avec cet olibrius. Vous a-t-il remis un échantillon ?
    — Il l’a fait, oui.
    — Hum… je m’en doutais. Et en avez-vous usé ?
    — Je dois vous avouer que j’en ai effectivement éprouvé les effets, mais ils se sont révélés assez traumatisants. Aussi je me suis empressé de me défaire de la boîte en la précipitant dans la Tamise. Il est seulement à espérer que les poissons n’auront pas l’idée de l’ouvrir pour s’oindre les écailles avec son contenu.
    Le vieil homme parut soulagé.
    — C’est ce que vous aviez de mieux à faire, mon cher. Voyez-vous, le pouvoir de cette drogue fait partie de ces secrets qu’il importe absolument de tenir à l’écart. Il serait catastrophique qu’une telle substance tombe entre les mains d’individus mal intentionnés. Au reste, Crowley n’aurait jamais dû vous la délivrer sans préparation spécifique. Vous avez parlé d’« effets traumatisants ». J’espère qu’il n’est rien arrivé de grave !
    Je bus d’une traite mon verre de porto et m’allumai une cigarette, dont j’aspirai à pleins poumons la fumée avant de l’expulser en d’esthétiques volutes bleues vers le plafond en stuc de la brasserie.
    — Dr Kirkby, votre attention me touche, mais soyez sans crainte ! Je ne me suis jamais senti de toute ma vie aussi incarné qu’en cette superbe journée de printemps ! J’ai la sensation depuis peu d’avoir pris pleinement conscience de la valeur de mon existence, faite de chair, de larmes et de sang.
    — À la bonne heure, Singleton ! Je peux donc partir l’esprit en paix. Au fait, avant mon voyage pour la Hollande, vous désiriez me consulter à propos
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