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Le poursuivant d'amour

Le poursuivant d'amour

Titel: Le poursuivant d'amour
Autoren: Pierre Naudin
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de bruit.
    – Heureusement, dit Guesclin, que nul Goddon ne guette !
    De faibles clartés rougeâtres apparurent à travers les feuillages. Peu à peu, Tristan distingua des tentes, des hommes, des feux. Orriz et Couzic attendaient-ils ? Il se tourna vers le Breton. Ses yeux larges, soudain clairs, cherchaient partout et sa bouche béait, luisante de salive. Les ténèbres rendaient son visage spectral. Il se signa. Sa voix prit une tonalité âpre, un peu sifflante :
    – Le feu que nous bouterons aux trefs nous éclairera.
    Tristan resta coi, serré dans son fer et se réconfortant de son mieux cependant que Paindorge baissait la tête comme un homme accoutumé à de fatales influences et priant pour les dissiper.
    – Avançons encore… dix toises et nous y serons. Lozach, je veux ouïr ta frouée.
    L’homme tira un chalumeau de son surcot. Ses joues se gonflèrent. Un cri de chouette s’éleva et parut onduler dans les branches. Un autre lui répondit. Un autre leur fit écho.
    Notre-Dame, Guesclin !
    L’impétuosité, l’audace avec lesquelles le chef de guerre se porta vers les ennemis, la furie surhumaine de ses compagnons, leurs vociférations et leur unité soudain démembrée arrachèrent à Paindorge un «  Bon sang ! » d’ébahissement. À l’instar de son écuyer, Tristan fut emporté par cette tempête humaine horriblement confuse. Il vit du rouge – des flammes – monter au ciel, de la fumée, des lueurs. Et déjà il était au milieu de la presse, effaré de se sentir seul, séparé de Paindorge et ne sachant encore où diriger ses coups. Le camp, assoupi, s’était éveillé en sursaut. Une trompe mugit. Un moment d’indécision sembla clouer, immobiles, les Anglais au sol ; puis, vivement, ils remuèrent.
    – À l’arme ! hurla l’un d’eux qui brandissait un vouge.
    – Au Charlot ! Au Charlot ! cria Couzic quelque part. Au Charlot tous 387  !
    Au vacarme des assaillants répondaient les commandements d’un Anglais – Jouel, sans doute – et de ses subalternes, tandis que la mêlée se hérissait de tout ce qui tranchait, perçait, assommait. Tristan vit deux Bretons convoiter le même homme, et ce fut, jouant des coudes, à qui devancerait l’autre pour croiser le fer avec lui. Sans avoir eu à manier sa Floberge, il se trouva serré de près par Paindorge en action contre un vougier demi-nu tandis que Guesclin leur jetait un regard mi-moqueur mi- méprisant avant de fondre sur un jeunet désarmé qu’il embrocha sans façon.
    Les Charlots s’étaient répandus dans le camp. Aux flammes des foyers comme attisées par tant de mouvements s’ajoutaient celles des tentes incendiées par des jets de brandons. On entendait parmi ces grondements de bêtes les hennissements des chevaux effrayés. Des membres craquaient, des têtes saignaient, des fléaux s’abattaient sur des chapels de fer coiffés en hâte et qui parfois tombaient pour une mise à mort.
    – Au Charlot !
    – À toi, Penhoët !
    Sous certaines épées pleuvaient des étincelles. D’autres se brisaient à la prise sous un heurt féroce ou tout simplement chanceux. Des Goddons qui étaient allés dormir sous la ramée accouraient, prenant les Bretons à revers.
    – Notre-Dame, Guesclin !… Fils de ribaudes !
    La mêlée se nouait, se dénouait à grands cris et fracas. Tristan put esquiver un coup d’épieu et navrer son agresseur à l’épaule. Paindorge n’était plus là. Les embûches ! La négation de la chevalerie. Force lui était de constater que, pour le moment, les Goddons, bien qu’ébaubis, ne se laissaient point dominer. Des armures et des jaques ouverts sur du sang, des entrailles. Toujours le sang. «  Tue ! Tue ! » Les Charlots crachaient leurs cris. Les lunes vermillonnées des haches et des cognées préféraient la chair tendre aux troncs rugueux.
    Tristan ne pensait plus qu’à défendre sa vie. Sans fureur et sans haine à l’inverse des autres. Une espèce de bon labeur, ni plus ni moins. Comme un soleil fané, la lune, parfois, révélait un homme atterré, immobile, et un autre convulsé dans d’ultimes souffrances. Ne pas leur ressembler.
    « Je vivrai. Il le faut pour revoir… »
    Encore un homme devant lui. Une cuirasse ensanglantée. Une épée, elle aussi baptisée dans du sang. Éviter un taillant. Un autre. La Floberge branlait sous les heurts. Tristan vit Orriz s’approcher de son adversaire et lui trancher d’un coup le crâne jusqu’au
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