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Le poursuivant d'amour

Le poursuivant d'amour

Titel: Le poursuivant d'amour
Autoren: Pierre Naudin
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nez.
    – Regracie-moi !
    – Jamais !… Traître ! Tu devais me le laisser… Pour qui me prends-tu ?
    Il se retint à temps d’attaquer le Charlot. Guesclin les observait tout en criant son enseigne. Des bassinets, des barbutes brillaient çà et là, méduses de fer ballottées dans cette tempête qui n’en finissait pas. Des corps sur l’herbe. Des corps dans l’eau soyeuse et argentée de la rivière.
    – Holà !
    Guesclin reculait devant un homme plus haut, plus épais que lui. Des léopards sur sa cotte d’armes. Jouel. Ils s’étaient trouvés. Il n’y avait plus que Jouel : il venait d’être rejoint par un homme. Un autre. Un autre.
    – À la rescousse !
    Tristan bondit. Rejoignit le Breton, taillant, estoquant, criant. Un homme s’affala. Mort. « As-tu vu que je sais occire ? » Il ne pouvait supporter la pensée que s’il ne se battait pas pour délivrer Guesclin de la meute ennemie, celui-ci le prendrait pour un couard.
    – On les aura.
    Essoufflement. Le Breton riait, à présent, trouvant leur aventure plaisante. Aisément, il trancha l’épaule d’un homme qui s’affala et se tordit sur le sol, parmi d’autres malheureux de toute appartenance.
    – T’as vu ?
    – Prends plutôt garde à ton dos !
    D’autres Goddons. Les yeux de Tristan se brouillaient. Périr dans cette échauffourée serait indigne de lui. Il évita un taillant. Une ombre dansotait devant lui, redoutable. Il ne voyait pas son visage entre les jouées de fer d’une barbute où il semblait à l’étroit. Une ombre encore, cette fois pour Guesclin. Avant que le Breton l’eût entrevue, une épée scintilla. La Floberge l’immobilisa et rejeta.
    – Tu m’as épargné une entaille !
    Guesclin ne disait pas : « Tu m’as sauvé la vie. » Il écumait de rage, sans doute, d’avoir été secouru. Un mouvement de jambes, une esquive : un autre Goddon tomba.
    – Qu’on en finisse !
    Mais les bidaus 388 et les goujats d’Angleterre, les sergents et les gens du commandement se battaient bien. Où était Jouel ?
    – Notre-Dame, Guesclin !
    « Qu’on en finisse ! Le sol en est jonché ! Qu’ils ne résistent plus ! »
    Tristan se sentait brisé. Lassitude. Répulsion. Le sang empoisonné de fiel. Il détestait, il abhorrait cette attaque nocturne. Le prodigue Bertrand, d’un coup, faisait éclater une tête. Assez. Les Anglais tenaient bon. Pour l’honneur. Une poussée. Derechef se battre. Épées. Il vacillait. Le courant l’emportait. Reculer… Il n’était point effrayé : il se défendait à la perfection et les cris de haine à lui adressés rafraîchissaient son cerveau.
    Le vent d’une épée. Bon sang : ses cheveux s’en étaient soulevés ! Mourir ici, c’était mourir sans gloire. Pour rien… Non pas pour rien : pour Guesclin dont l’enseigne montait au-dessus des autres, au-dessus des cris, au-dessus des plaintes.
    –  Notre-Dame, Guesclin !
    Tristan repoussa un vouge, une épée. Il recula.
    – Notre-Dame, Guesclin !
    « Canta comm un païrol traoucat (543)  » L’écume des souffles assemblés fouettait son visage. Il était à l’apogée de l’exaltation et de la fureur, empêchant une lame d’atteindre son cou, déviant une autre de son épaule. Seul. Et Paindorge ?
    – Ils partent !
    Qui avait dit cela ? C’était vrai : des Goddons s’enfuyaient. On entendait des plongeons dans la rivière. Quelques sagettes grê lèrent en sifflant. Vols inutiles : les flammes rétrécissaient, la nuit récupérait sa place et son mystère. Un éclair de lame et une course : l’Anglais rejoignait ses compères. D’autres levaient les bras en signe de soumission. Certains, en titubant, s’approchaient des vainqueurs. Paindorge apparaissait. Heurtant un corps, il chuta et jura.
    – Messire !… Ah ! Messire. On les a eus !
    – Oui. Robert.
    Tristan frémissait. Son estomac et ses entrailles semblaient en feu. Le manque d’air et l’odeur du sang, les viscères épars devenaient oppressants. Des torches sautillaient.
    – Ça va, messire ?
    – J’ai cru affronter des fantômes.
    – Voyez ce qu’ils font des gars qui se sont rendus ! Tristan ne regarda pas : il savait. D’ailleurs, des cris, des râles, des supplications accompagnés de rires exprimaient ce qui se passait. En grand état d’ébriété haineuse, les Charlots administraient leur loi. La voix de Guesclin retentit :
    – Es-tu là, Jouel ?
    – Je suis
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