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Le nazisme en questions

Le nazisme en questions

Titel: Le nazisme en questions
Autoren: Collectif
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Munich étaient telles qu’il aurait fallu risquer la guerre. Car les retombées de la reculade de Munich étaient d’autant plus désastreuses qu’elles survenaient après l’inertie manifestée par les deux démocraties libérales lors de la remilitarisation de la Rhénanie, puis lors de l’Anschluss. En quelques semaines, s’effondraient non seulement le prestige mais encore la crédibilité de la Grande-Bretagne et encore plus celle de la France. Comment pouvait-il en être autrement, dès lors que cette dernière avait abandonné un allié avec lequel elle avait signé un traité en bonne et due forme ?
    Sans doute la thèse (formalisée après coup) du répit nécessaire, qui devait permettre, en contournant plutôt qu’en affrontant, de gagner du temps, de parfaire le réarmement et de préparer une guerre inévitable, n’est-elle pas pour autant dénuée de tout fondement. Car les démocraties allaient bien accélérer leur programme militaire, notamment les Anglais, en accroissant notablement la production de leur aviation de guerre, ce qui allait les sauver lors de la bataille d’Angleterre.
    Mais le côté négatif l’emporte, et de beaucoup. D’autant que la Wehrmacht allait, elle aussi, peaufiner sa machine de guerre, profitant des enseignements tirés de l’examen des fortifications tchèques, qui étaient inspirées de la ligne Maginot et avaient dû être livréesintactes. Ajoutons qu’après le premier coup de Prague, l’armée allemande mettait la main sur des chars de très bonne qualité (un Panzer sur sept au moins était d’origine tchèque) que les Français allaient retrouver lancés contre eux en mai 1940.
    Tous les ambassadeurs français en poste ont noté que le prestige français à l’étranger en avait pris un rude coup. L’influence politique autant qu’économique de Paris et subsidiairement de Londres s’effondrait en Europe centrale et orientale. À Budapest mais aussi à Sofia, à Bucarest, voire à Prague, on se mit à faire sa cour à Berlin, et en tout cas on évita de froisser le Reich. La Belgique, pour sa part, se fit très sourcilleuse sur sa neutralité, s’interdisant de fait toute concertation d’ordre militaire avec ses voisins, en cas d’invasion allemande.
    Quant à l’URSS qui, il est vrai, avait décidé, dès l’automne 1937, d’adopter une position de neutralité dans les conflits qui pourraient opposer le Reich nazi aux démocraties libérales, la capitulation de Munich la confortait dans sa conviction que la Grande-Bretagne et la France n’étaient pas fiables ; Moscou prêta attention à la satisfaction manifestée par nombre de dirigeants britanniques à l’idée que l’URSS, l’une des absentes de Munich, en était de fait l’autre grande vaincue. Staline et son ministre des Affaires étrangères Molotov s’en souviendront dans les journées décisives d’août 1939.
    Le Führer voyait son pouvoir notablement renforcé de cette reculade ; il gagnait sur tous les tableaux ; la fin heureuse du suspense guerrier était portée à son crédit, il apparaissait comme l’homme de la paix, tout en restant le personnage charismatique qui exaltait le nationalisme d’une majorité d’Allemands toujours révoltés par l’humiliation de 1919. Il s’imposait également auxresponsables de l’armée qui avaient jusqu’alors gardé leur autonomie à l’égard du régime et s’estimaient en droit de trancher de manière ultime dans la décision de la paix et de la guerre : les hauts dignitaires de la Wehrmacht ont été muselés voire matés tout au long d’une crise qui a vu le triomphe des « intuitions » du Führer, désormais consacré comme le chef à part entière de l’armée.
    Dernier point digne d’être noté : la déclaration de guerre, en septembre 1939, est dans le droit fil de la reculade de Munich. Pourquoi ? Parce que, dans l’été 1939, Hitler est convaincu que les deux démocraties libérales ne voudront pas mourir pour Dantzig alors qu’elles n’ont pas su défendre Prague en temps utile. Bref, le monde allait payer très cher le triomphe munichois du Führer.

Liste des auteurs
    Fabrice d’Almeida est professeur à l’université Panthéon-Assas. Il est l’auteur notamment de La Vie mondaine sous le nazisme (Perrin, 2006). Son article a été publié sous le titre « Était-il un génie de la propagande ? » dans L’Histoire n o  312 (septembre 2006).
     
    Jean-Pierre Azéma est professeur
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