Bücher online kostenlos Kostenlos Online Lesen
Le médecin d'Ispahan

Le médecin d'Ispahan

Titel: Le médecin d'Ispahan
Autoren: Noah Gordon
Vom Netzwerk:
vers la rive sud,
longèrent les entrepôts et les demeures des riches commerçants. Rob reconnut
celle du négociant en broderies pour qui Mam avait travaillé. Il n'avait jamais
été plus loin.
    « Maître
Croft ? »
    Son compagnon
fronça les sourcils.
    « Non,
non. On ne m'appelle jamais Croft, on dit : Barbier, à cause de ma
profession.
    – Oui,
Barbier », répondit Rob. Ils avaient dépassé Southwark, et il s'affolait
en entrant dans ce monde inconnu et déroutant.
    « Barbier,
où allons-nous ? » demanda-t-il sans pouvoir retenir ses larmes.
L'homme sourit et, reprenant les rênes, mit son cheval au trot.
    « Partout »,
répondit-il.

4. LE BARBIER-CHIRURGIEN

 
    Ils campèrent à la nuit, sur une colline près d'un ruisseau. Le brave cheval gris
s'appelait Tatus.
    « L'abréviation
d'Incitatus, à cause du coursier de l'empereur Caligula, qui l'aimait au point
de l'avoir fait prêtre et consul. Le nôtre est un assez bel animal pour un
pauvre diable à qui on a coupé les couilles », dit le Barbier, et il
expliqua comment soigner le hongre, le bouchonner avec des poignées d'herbe
sèche et douce, le mener boire et paître avant de s'occuper d'eux-mêmes.
    Ils étaient
dans une clairière, assez loin de la forêt, mais le Barbier expédia Rob
chercher du bois pour le feu et il dut faire plusieurs voyages. Bientôt les
flammes crépitèrent ; il se sentit défaillir à la bonne odeur de cuisine.
Dans un pot de fer, le Barbier avait mis d'épaisses tranches de lard fumé et
faisait revenir dans la graisse un gros navet, des poireaux, avec une poignée
de mûres sèches et des herbes. Rob n'avait jamais rien mangé d'aussi bon ;
il en avala une grosse portion et son compagnon, qui avait lui-même un solide
appétit, le resservit. Ils essuyèrent leurs écuelles avec des quignons de pain
d'orge et, de lui-même, Rob alla nettoyer le pot et les bols dans le ruisseau
en les frottant avec du sable. Quand il eut rapporté les ustensiles, il se
soulagea derrière un buisson.
    « Seigneur !
Quel remarquable zizi ! » s'écria le Barbier surgissant près de lui.
Rob resta en suspens et cacha son sexe.
    « Quand
j'étais petit, j'ai eu quelque chose là. On m'a dit qu'un chirurgien avait
enlevé, au bout, le capuchon de peau...
    – Il a ôté le
prépuce, dit le Barbier. Et te voilà circoncis comme un païen. »
    Rob s'écarta
légèrement, troublé et sur ses gardes. L'humidité de la forêt les gagnait. Il
ouvrit son sac, prit sa chemise de rechange et l'enfila par-dessus celle qu'il
portait. Le Barbier sortit deux fourrures de la carriole et les lui jeta.
    « Nous
coucherons dehors, le chariot est déjà bourré. »
    Dans le sac
ouvert, il aperçut la monnaie romaine et la chipa d'un geste vif. Il ne demanda
pas d'où elle venait.
    « Avec
mon père... on a pensé qu'il s'agissait de la première cohorte romaine arrivée
à Londres.
    – En
effet », dit l'homme en examinant la pièce. Manifestement, il connaissait
les Romains et les estimait, à en juger par le nom du cheval. Rob craignait
qu'il ne lui vole son bien.
    « Sur
l'autre face il y a des lettres », dit-il d'une voix rauque. Le Barbier
lut, à la lumière du feu :
    « IOX. 10 signifie " hourra ", X, c'est le nombre dix. Un cri de victoire
romain : " Dix fois hourra ! "«
    Rob reprit la
pièce avec soulagement et installa son lit près du feu. Les fourrures, une peau
de mouton et une peau d'ours, étaient vieilles et sentaient fort mais elles lui
tiendraient chaud. Le Barbier se coucha de l'autre côté du feu, son épée et son
couteau à portée de la main contre un éventuel agresseur – ou contre un jeune
fugitif, songea Rob avec appréhension. Il avait retiré de son cou la corne
saxonne qu'il portait attachée à une lanière, en ferma le fond avec un bouchon
en os, la remplit d'un liquide sombre et l'offrit à Rob.
    « C'est
l'alcool que je fabrique. Bois tout. »
    Rob n'en
voulait pas, mais n'osait refuser. Un fils d'ouvrier, à Londres, savait très
tôt ce qu'on devait attendre des marins et des dockers qui offraient des
sucreries près des entrepôts déserts. Il savait aussi que l'ivresse en est le
prélude ordinaire.
    « Bois,
répéta le Barbier, fronçant les sourcils en le voyant s'arrêter. Cela te fera
du bien. »
    Il ne se
montra satisfait qu'en l'entendant tousser violemment après deux grandes
gorgées. Reprenant la corne, il finit sa bouteille, puis une autre, lâcha un
pet prodigieux et
Vom Netzwerk:

Weitere Kostenlose Bücher