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Le Glaive Et Les Amours

Le Glaive Et Les Amours

Titel: Le Glaive Et Les Amours
Autoren: Robert Merle
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Louis XIV…
    Une clause originale, et qui s’avéra dangereuse, fut
introduite dans le contrat de ce mariage. Marie-Thérèse recevrait de son père
une dot de cinq cent mille écus d’or et moyennant cette somme, à la mort de son
père elle renoncerait à ses droits sur la couronne d’Espagne. En effet, la loi
salique qui excluait les femmes du pouvoir royal n’existait pas en Espagne,
tant est qu’à la mort de son père, sa fille Marie-Thérèse, reine de France
aurait pu devenir aussi reine régnante d’Espagne. Voilà qui était bel et bon,
mais qu’arriverait-il si la dot de cinq cent mille écus d’or n’était pas
versée, ce qui était fort probable, étant donné la faiblesse du Trésor
espagnol. Ce renoncement de la reine de France aux droits de la couronne
serait-il alors valable ? Vous verrez, lecteur, que ce problème va se
poser bientôt.
     
    *
    * *
     
    — Monsieur, un mot de grâce. Pour parler à la franche marguerite,
je suis mécontente.
    — De moi ?
    — Nenni. De la reine. Je trouve qu’elle a fort mal agi
avec Mademoiselle de La Motte Argencourt, primo en l’accusant
mensongèrement d’avoir un amant, secundo en la serrant au couvent aux
seules fins de la séparer de son fils.
    — Belle lectrice, vous adressez-vous au duc d’Orbieu ou
à l’auteur ?
    — À l’auteur.
    — Eh bien, l’auteur partage entièrement votre
réprobation. Mais le duc d’Orbieu lui, étant de son siècle, ne trouvait rien à
blâmer à l’absolutisme royal, ni les injustices, ni même les iniquités, qu’il
ne pouvait qu’entraîner. Est-ce tout ?
    — Monsieur, je trouve aussi que le stratagème de la
fausse union de Louis avec la fille de la duchesse de Savoie était quelque peu
puéril.
    — Nenni, m’amie ! Ce qui réussit n’est jamais
puéril. Permettez-moi de vous le rappeler. Le prétendu mariage de Louis avec
Marguerite Yolande de Savoie effraya le roi d’Espagne et le fit sortir de ses
lanternements.
    — Certes, mais songez au chagrin de Marguerite Yolande
qui n’est plus rien après avoir cru qu’elle allait devenir reine.
    — Mais elle ne l’a jamais cru. Elle savait d’avance que
ce « mariage » n’était que comédie. En outre, pour la remercier
d’avoir si bien joué son rôle, on lui fit de beaux cadeaux et on la maria avec
le duc de Parme, lequel, ne se contentant pas d’être duc, était aussi un homme
immensément riche. Essuyez vos pleurs, belle lectrice. Aux Grands de ce monde,
tout n’est que roses. Il leur suffit de naître.
     
    *
    * *
     
    Ce n’était pas la première fois que France et Espagne
mariaient leurs enfants. Le lecteur n’a pas oublié qu’en 1612 l’infant épousa
Isabelle de Bourbon, et Louis XIII l’infante Ana, sœur du roi espagnol.
L’échange des princesses se fit sur la Bidassoa, ce qui rendit ce fleuve
célèbre, ainsi que l’île des Faisans où Français et Espagnols se réunirent. Ne
croyez pas que ce double mariage fut un bonheur pour les épousées. Car elles
allaient vivre loin de leur famille et de leur patrie, dans un pays dont elles
ne connaissaient rien, à peine la langue, et dont elles ne pourraient plus
jamais revenir.
    Car c’était la règle, rois et reines ne se visitaient jamais
d’un État à l’autre.
    Lectrice, encore que vous ne me posiez pas la question, je
suppose que vous voudriez en savoir plus sur la Bidassoa dont le nom sonne si
sinistrement à nos oreilles. Voici pour vous satisfaire. La Bidassoa est un
fleuve côtier pyrénéen, il naît en Espagne et sert de frontière à la France
pendant les dix derniers kilomètres de son cours. Son estuaire, passablement
envasé, commence à Béhobie, et c’est là que se trouve la fameuse île des
Faisans dans laquelle France et Espagne, après des guerres acharnées, signaient
leurs traités de paix et mariaient leurs enfants.
    Ce n’est pas, certes, la paix qui m’afflige – encore
qu’entre ces deux royaumes elle ne dure jamais bien longtemps – mais l’exil
définitif de ces princesses, qu’elles soient Françaises ou Espagnoles, et, bien
entendu aussi, le fait qu’on ne leur demandait jamais leur avis, qu’elles
étaient traitées comme des pions qu’on bouge d’un point à l’autre sur
l’échiquier, au mieux des intérêts des rois, frères ou pères.
    Plaise à vous de vous souvenir que dans cette partie de mes
Mémoires intitulés L’Enfant-Roi, cette cruelle séparation ne fut que
soupirs et sanglots entre Louis
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