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Le Bal Des Maudits - T 1

Le Bal Des Maudits - T 1

Titel: Le Bal Des Maudits - T 1
Autoren: Irwin Shaw
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d’affichage et que Michael n’avait pas encore lue ; la seconde était la réponse, signée des dix noms. Michael secoua la tête, ahuri, et relut soigneusement les deux notes.
    –  Et que veux-tu que j’y tasse ? demanda-t-il, exaspéré.
    –  J’aimerais que tu me serves de second, dit Noah.
    Sa voix était morne et sans timbre, mais ses mot s étaient si mélodramatiques que Michael dut se tenir à quatre pour ne pas lui éclater de rire au nez .
    –  Second, répéta-t-il, incrédule.
    –  Oui, dit Noah. Je veux me battre avec eux. Et je ne veux pas arranger moi-même les combats. Je vais perdre mon sang-froid et me créer des ennuis. Et je veux que ce soit absolument correct.
    Michael écarquilla les yeux. De toutes les choses qu’il avait imaginées avant d’entrer dans l’armée, celle-ci était bien la dernière qui lui serait venue à l’esprit.
    –  Tu es fou, dit-il. C’est une plaisanterie !
    –  Je commence à être fatigué des plaisanteries, dit Noah.
    –  Qu’est-ce qui t’a fait penser à moi ? s’informa Michael.
    Noah respira profondément, et Michael entendit l’air pénétrer en sifflant dans les narines du jeune homme. Il paraissait tendu et décidé, et, dans la chiche lumière, son visage possédait une sorte de beauté poignante, archaïque et tragique.
    –  Tu es le seul en qui j’aie confiance dans toute la compagnie, dit Noah.
    D’un geste brusque, il s’empara des deux feuilles de papier.
    –  O. K., dit-il, si tu ne veux pas m’aider, va te…
    –  Attends une minute, dit Michael.
    Il sentait vaguement qu’il lui fallait empêcher cette ridicule et sauvage plaisanterie d’aller jusqu’au bout.
    –  Je n’ai pas dit que je ne voulais pas t’aider.
    –  O. K., dit Noah d’une voix rauque. Alors, rentre tout de suite et arrange-toi avec eux.
    –  Comment cela ?
    –  Ils sont dix. Qu’est-ce que tu veux que je fasse ? Que je les rencontre tous la même nuit ? Il faut espacer les combats. Trouve lequel veut se battre le premier, le second, etc. Je m’en moque.
    Michael reprit les deux feuilles de papier et étudia les deux colonnes de cinq noms. Lentement, il identifia les dix soldats auxquels ils appartenaient.
    –  Tu sais, dit-il, que ce sont les dix hommes les plus forts de la compagnie.
    –  Je sais.
    –  Pas un seul d’entre eux ne pèse moins de quatre-vingts ou quatre-vingt-cinq kilos.
    –  Je sais.
    –  Combien pèses-tu ?
    –  Soixante-deux kilos.
    –  Tu vas te faire tuer.
    –  Je ne te demande pas ton avis, dit sèchement Noah. Je te demande d’arranger les combats. C’est tout. Le reste me regarde.
    –  Je ne pense pas que le capitaine le permette, objecta Michae l.
    –  Il le permettra, dit Noah. Ce salaud-là ne ratera pas une aussi belle occasion, sois tranquille.
    Michael haussa les épaules.
    –  Comment veux-tu que j’arrange ça, demanda-t-il. Je peux me procurer des gants et convenir de rounds de deux minutes, et trouver un arbitre…
    Je ne veux pas de rounds ni d’arbitre, coupa Noah. Quand l’un des deux ne se relèvera plus, le combat sera fini, c’est tout.
    Michael haussa les épaules, une seconde fois.
    –  Et les gants ?
    –  Pas de gants. Les poings nus. Rien d’autre ?
    –  Non, dit Michael.
    –  Merci. Donne-moi leurs réponses le plus tôt possible.
    Il s’éloigna sans dire au revoir, et Michael le regarda disparaître, droit et raide, dans l’obscurité. Puis il secoua la tête et retourna à la chambrée, en quête du premier homme, Peter Donnelly, un mètre quatre-vingt-trois, quatre-vingt-dix kilos, qui avait participé, en 1941, aux rencontres poids lourds des « Gants d’Or » et n’avait été envoyé au tapis qu’à l’avant-dernière reprise.
    Un direct de Donnelly envoya Noah rouler à terre. Noah bondit sur ses pieds, et sauta pour atteindre le visage de Donnelly. Donnelly se mit à saigner du nez, le sang lui coula jusque dans la bouche et une expression de colère incrédule remplaça le masque professionnel qu’il avait arboré jusqu’alors. Il plaça sa main gauche sur les reins de Noah, et, sans s’occuper des poings rageurs qui lui martelaient le visage, pesamment, l’attira à lui. Puis, sa droite se détendit, et les spectateurs firent : « Ah ! » Donnelly frappa Noah une seconde fois, au cours de sa chute, et Noah s’écroula, dans l’herbe, aux pieds de Donnelly.
    –  Ça suffit comme ça, dit Michael en se plaçant
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