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la tondue

la tondue

Titel: la tondue
Autoren: Marie de Palet
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plus précises à mesure que l’on approchait du gerbier.
    Le champ vers lequel se dirigeait l’engin était très pentu et le passage fort étroit. Il fallut un certain temps pour que la machine puisse seulement s’engager sur le petit pont qui enjambait le fossé.
    « Il va falloir élargir les chemins », lança un rigolo.
    Les hommes présents joignirent leurs efforts et apportèrent des plateaux pour élargir le passage. Un jeune homme, avec de grands gestes, guidait le chauffeur qui avançait, lentement, un peu au jugé… Et puis tout finit par s’arranger et la machine s’engagea dans le champ. Elle s’arrêta face au premier gerbier ; les hommes préparèrent les sacs, graissèrent quelques orifices et le travail commença…
    Le ronronnement s’intensifia, libérant une nuée de poussière qui entoura d’abord la machine avant de s’élever tranquillement vers le ciel calme. Grimpés sur le tas, deux hommes déliaient les gerbes et les lançaient dans la gueule du monstre qui les avalait avec un ahanement de satisfaction. En un tour de main, le premier gerbier fut fini ; on s’avança vers le second qui subit le même sort, et ainsi de suite jusqu’au quatrième…
    Leur première curiosité satisfaite, les hommes examinèrent soigneusement le blé et constatèrent, avec plaisir, qu’il n’était pas coupé et qu’il ne contenait aucune impureté. « C’est quand même un bel engin ! Faire tout ça, en une heure, alors qu’il y en avait pour plusieurs jours de travail… »
    Le père demeurait sceptique :
    « Heureusement que ce blé est en gerbiers ! Car si on le bat à mesure qu’on le coupe, il ne peut pas sécher… »
    Le patron de la moissonneuse le reprit :
    « D’habitude, on le fait sur pied. Il faut attendre qu’il soit bien mûr et on n’a pas de problèmes.
    — Vraiment ? Alors, il faut l’étendre, sinon, il moisira !…
    — Mais non, on fait les moissons partout de cette façon et personne ne se plaint qu’il moisit… »
    Le père ne répondit rien, mais on sentait qu’il n’était pas convaincu pour autant.
    Jacques tournait et retournait autour de la machine. Il était enthousiasmé. Il s’en était fait expliquer le mécanisme et, maintenant, surveillait attentivement le déroulement des opérations. Le progrès, dans la vallée, le transportait de joie.
    Yvette aussi était venue. Elle appréciait à sa juste valeur l’avancée vers le modernisme et s’en réjouissait. Mais il ne la concernait pas. Elle portait toujours sa souffrance comme un boulet qu’elle n’arrivait pas à soulever. Elle laissa les curieux contempler le champ en pleine effervescence et repartit lentement, seule, vers le village. Le soleil dardait ses rayons et lui chatouillait la peau. Les criquets stridulaient et les hirondelles se poursuivaient haut dans le ciel, en criaillant. Elle ne s’en apercevait pas et, pour la première fois, se sentait étrangère à l’euphorie générale.
    «  Mais qu’est - ce que je fais ici ? Il serait temps que je m’ en aille… »
    Cette pensée lui était venue spontanément et elle en fut toute étonnée… Partir ? Pourquoi pas ? Mais, pour aller où ?

XXXIV
    Partir ?
    Quand l’automne arriva, les longues soirées s’attardèrent sur la vallée, teintant le crépuscule et traînant des écharpes de brume qui s’élevaient de la vallée de la Nize jusqu’aux hauteurs de Balduc, sentinelle vigilante face au village.
    Il faisait délicieusement doux. Les gens s’oubliaient fréquemment sous l’auvent des portails pour faire un brin de causette, histoire de profiter jusqu’au bout de cette tiédeur langoureuse qui enveloppait toute chose… C’est pendant ces crépuscules mauves qu’Yvette se sentait de plus en plus abandonnée. Elle respirait l’automne et la douceur de l’air avait, pour elle, un arrière-goût de fruits blets que l’on laisse pourrir sous les arbres… Cette tiédeur qu’appréciaient tant les villageois lui donnait le vertige et ces nuits qui n’en finissaient pas de tomber faisaient resurgir en elle les peurs oubliées des années noires.
    Et pourtant, Jacques était là. Il était revenu définitivement. Pour lui, l’épisode de l’armée était du passé. Il était redevenu le feu follet d’avant son service militaire, nais maintenant, ce n’était plus les copains qu’il partait trouver, mais Paulette… Les amoureux se perdaient dans la brume, sous l’œil complice de tout le
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