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La Religion

La Religion

Titel: La Religion
Autoren: Collectif
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vers les bois où ils ne le trouveraient jamais. L’obscurité qui était désormais son seul guide et conseiller le fit se retourner vers la porte et il regarda à nouveau.
    Un cheval, percé de flèches, était couché sur le flanc, sa grosse tête battant le sol et ses yeux roulant furieusement au-dessus de la mousse rose échappée de ses naseaux. Juste à côté, un villageois était affalé, lui aussi percé comme en plein vol, et à côté de lui, le père Giorgi dans une flaque grandissante. En travers de la carcasse du cheval, comme sur un matelas obscène, sa mère était allongée. Ses cheveux de cuivre s’agitaient en tous sens tandis qu’elle luttait contre les quatre hommes qui juraient et bataillaient pour la maintenir. Sa peau nue était d’un blanc de marbre, lacérée de griffures et marquée des bleus indigo de mains brutales. Son visage était crispé. Ses dents ensanglantées. Ses yeux d’un bleu saisissant étaient enragés. Elle ne voyait pas Mattias, alors qu’une partie de lui cherchait désespérément à croiser ces yeux si bleus. Il comprit que si elle savait qu’il était témoin de cette horreur, elle perdrait tout le défi de sa bravoure, et ce défi était le dernier cadeau qu’elle allait lui faire.
    Quelqu’un la frappa à la tête et cria dans son oreille, elle se tourna, lui cracha au visage et son crachat était écarlate. Un cinquième homme s’agenouilla entre ses jambes, ses hauts-de- chausses baissés. Et ils hurlaient tous – après les autres, après elle, l’un tout en se curant le nez – dans leur langue étrangère geignarde. Ils violaient une femme tirée de son lit à moitié endormie, et pourtant leurs manières étaient celles de bouviers libérant un veau enlisé dans une tourbière : ils gesticulaient, vociféraient, éructaient encouragements et conseils ; leurs visages étaient dénués de malice et vides de pitié. La brute entre ses jambes perdit patience, car elle avait glissé un genou contre sa poitrine et ne le laissait pas la prendre. Il sortit un couteau de sa botte, souleva son sein, visa et l’enfonça dans son cœur. Personne ne tenta de l’arrêter. Personne ne se plaignit. Sa mère cessa de remuer et sa tête retomba en arrière. Mattias voulait sangloter, mais son souffle était gelé dans ses poumons. La brute lâcha son couteau, attrapa son entrejambe, glissa quelque chose de dur en elle et commença à la besogner. Et quelqu’un avait dû dire quelque chose de drôle, car ils se mirent tous à rire.
    Mattias retenait les larmes qu’il n’avait pas méritées. Il avait échoué pour ses sœurs. Il avait échoué envers son père. Le cadavre de sa mère gisait violé par des brutes. Lui seul était encore debout, dépossédé, impuissant et perdu. Il revint à lui en se rendant compte qu’il avait enfoncé la pointe de la dague dans sa paume. Son sang était brillant sur la saleté incrustée dans ses doigts. Sa douleur était propre et vraie et elle éclaircit son esprit. Sa mère leur avait dénié ce qu’ils avaient voulu encore plus que sa chair : sa reddition et son humiliation. Le viol de sa fierté. Le désir de rejoindre son âme le submergea. Le désir de la mort et dans la mort cette compagnie qu’il chérissait plus que la vie. Il colla la dague contre son bras, là où elle serait invisible. Sans hâte – car si la lame était encore chaude, son sang était froid – il marcha vers l’atrocité pour réclamer sa part.
    La première créature frissonna, poussa un cri bestial que les autres acclamèrent, et il se releva, reculant avec ses hauts-de- chausses autour des genoux. Une deuxième bête s’agenouilla pour pénétrer sa mère et les trois autres trituraient ses cuisses et ses seins pour s’exciter en attendant leur tour. Tous avaient aperçu Mattias, sauf le deuxième. Ils ne voyaient rien qu’un garçon miséreux. De la direction du village leur parvenait un bruit de sabots au petit galop et cela les inquiéta quelque peu, mais Mattias se souciait peu des sabots. L’obscurité grandissait en lui et il se sentait libre.
    Il plongea.
    Après le travail du marteau et des pinces, la lame semblait légère et délicate comme du papier, pourtant il la plongea deux fois à travers le dos du premier démon comme si ses côtes n’étaient que paille tressée. La créature soupira, ses hauts-de- chausses enchevêtrèrent ses chevilles et il tomba à quatre pattes, le cul en l’air,
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