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La mort bleue

La mort bleue

Titel: La mort bleue
Autoren: Jean-Pierre Charland
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tout à fait incorrect. Si nos sentiments ont changé…
    Elle marqua une pause avant de compléter sa pensée :
    â€” La situation sera tout à fait insupportable.
    â€” Nous ne savons rien encore de tout cela, répondit Marie.
    Elle s’arrêta devant l’entrée du Petit Séminaire afin de regarder sa compagne dans les yeux.
    â€” Mathieu ne voudra peut-être pas vivre chez sa mère, après deux ans dans les baraquements militaires. Il m’a déjà fait part de son désir d’offrir ses services dans les bureaux d’avocat cet été, afin de renouer au plus vite avec sa profession. Paul a offert de l’aider à ce sujet. Dans quelques jours, nous discuterons de cela tous ensemble et nous prendrons les meilleures décisions. Je te répète que je ne veux perdre ni ma meilleure vendeuse, ni une très bonne amie à cause de son retour.
    â€” Vous êtes gentille.
    â€” Ma gentillesse compte aussi dans ma décision, mais ce n’est pas mon seul motif, je t’assure. Viens assister à ces cérémonies, même si toutes les deux, nous avons vraiment la tête ailleurs.
    Un instant plus tard, elles pénétraient dans la cathédrale.
    * * *
    Une foule compacte se pressait dans le hall de la gare, débordait sur les quais. Des bouquets de verdure ornaient les murs et chacune des colonnes. Les drapeaux britanniques se trouvaient partout dans le vaste espace.
    Le train cracha un lourd nuage de vapeur. Les hommes en uniforme descendaient les uns après les autres, examinaient les lieux, autrefois familiers pour certains d’entre eux, avec une mine surprise. Plusieurs paraissaient étonnés de les revoir.
    â€” Formez les rangs, hurla quelqu’un en anglais.
    Appartenir au 22 e bataillon – le fameux van doos – ne signifiait pas toujours recevoir des ordres en français. L’attention de Thalie se porta sur les officiers. Mathieu figurait parmi eux. Elle reconnut bientôt la haute silhouette, cria son nom de toutes ses forces une première fois, puis une seconde.
    Le capitaine se tourna, chercha dans la foule. Petite, elle devenait difficilement repérable. Jouant des coudes, balbutiant des « pardon, je m’excuse, pardon » sans conviction, elle s’approcha jusqu’au cordon de policiers destiné à empêcher les civils de se mêler aux militaires.
    Ã€ la fin, Mathieu l’aperçut, s’avança en tendant sa main droite, gantée, jusqu’à toucher celle de sa sœur.
    â€” Je te retrouve enfin, murmura-t-elle. Tu n’as pas changé.
    Elle mentait. Le visage présentait des traits plus accentués, les yeux paraissaient plus creux, les plis à la commissure des lèvres aussi.
    â€” Toi, oui, déclara-t-il. Tu fais plus… jeune femme.
    La voix aussi était différente, un peu éraillée. Heureusement, elle retrouva dans le regard la même affection. Au moment de lui serrer les doigts, le contact du majeur lui parut étrange. Devant son regard intrigué, il dit d’une voix un peu hésitante :
    â€” Les Belges l’ont gardé en souvenir. Je rapporte tout le reste avec moi, je t’assure.
    Elle se pencha afin de pouvoir embrasser la main gantée, se redressa pour bredouiller, les larmes aux yeux :
    â€” Au moins, tu es là.
    Mathieu lui adressa un sourire attristé, se tourna pour constater une certaine pagaille dans les rangs de ses soldats.
    â€” Je ne donne pas le bon exemple. Je dois les retrouver.
    â€” À tout à l’heure.
    â€” Après toutes les singeries prévues au programme, je vous rejoindrai, maman et toi. Je devrai toutefois retrouver le régiment à la Citadelle en soirée. Nous devrons répéter ces simagrées à Montréal demain.
    Thalie hocha la tête quand il s’éloigna d’elle. L’officier aboya des ordres, ses hommes reprirent leur place en maugréant. Des mois après le retour de la paix, ces soldats perdaient l’habitude d’obéir. De nombreuses émeutes, au cours des derniers mois, avaient encore alourdi le nombre des morts et des blessés parmi eux.
    Ã€ la fin, le 22 e bataillon put former les rangs. Des policiers militaires ouvrirent un passage jusqu’aux grandes portes. Dehors, tous se mirent en ordre de marche. Sur les trottoirs, une foule de badauds hurlait son admiration. Une
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