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La Légende et les Aventures héroïques, joyeuses et glorieuses d'Ulenspiegel et de Lamme Goedzak

La Légende et les Aventures héroïques, joyeuses et glorieuses d'Ulenspiegel et de Lamme Goedzak

Titel: La Légende et les Aventures héroïques, joyeuses et glorieuses d'Ulenspiegel et de Lamme Goedzak
Autoren: Charles De Coster
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montrer ces Sept dont les cendres jetées au vent feraient
heureux la Flandre et l’entier monde !
    – Homme sans foi, dit Nele, tu les verras par le baume.
    – Peut-être, dit Ulenspiegel montrant du doigt Sirius, si
quelque esprit descend de la froide étoile.
    À ce geste, un feu follet voltigeant autour de lui s’attacha à
son doigt, et plus il s’en voulait défaire, plus le follet tenait
ferme.
    Nele, tâchant de délivrer Ulenspiegel, eut aussi son follet au
bout de la main.
    Ulenspiegel, frappant sur le sien, disait :
    – Réponds ! es-tu l’âme d’un Gueux ou d’un Espagnol ?
Si tu es l’âme d’un Gueux, va en paradis ; si tu es celle d’un
Espagnol, retourne en l’enfer d’où tu viens.
    Nele lui dit :
    – N’injurie point les âmes, fussent-elles des âmes de
bourreaux.
    Et, faisant danser son feu follet au bout de son
doigt :
    – Follet, disait-elle, gentil follet, quelles nouvelles
apportes-tu du pays des âmes ? À quoi sont-elles empêchées
là-bas ? Mangent-elles et boivent-elles, n’ayant pas de
bouche ? car tu n’en as point, follet mignon ! ou bien ne
prennent-elles la forme humaine que dans le benoît
paradis ?
    – Peux-tu, dit Ulenspiegel, perdre ainsi le temps à parler à
cette flamme chagrine qui n’a point d’oreilles pour t’entendre, ni
de bouche pour te répondre ?
    Mais sans l’écouter :
    – Follet, disait Nele, réponds en dansant, car je vais
interroger trois fois : une fois au nom de Dieu, une fois au
nom de madame la Vierge, et une fois au nom des esprits
élémentaires qui sont les messagers entre Dieu et les hommes.
    Ce qu’elle fit, et le follet dansa trois fois.
    Alors Nele dit à Ulenspiegel :
    – Ôte tes habits, je ferai de même : voici la boite
d’argent où est le baume de vision.
    – Ce m’est tout un, répondit Ulenspiegel.
    Puis s’étant dévêtus et oints de baume de vision, ils se
couchèrent nus l’un près de l’autre sur l’herbe.
    Les mouches se plaignaient ; la foudre grondait sourde dans
les nuages où brillait l’éclair : la lune montrait à peine
entre deux nuées les cornes d’or de son croissant ; les feux
follets d’Ulenspiegel et de Nele s’en furent danser avec les autres
dans la prairie.
    Soudain Nele et son ami furent pris par la grande main d’un
géant qui les jetait en l’air comme des ballons d’enfants, les
reprenait, les roulait l’un sur l’autre et les pétrissait entre ses
mains, les jetait dans les flaques d’eau entre les collines et les
en retirait pleins d’herbes marines. Puis les promenant dans
l’espace, il chanta d’une voix éveillant de peur toutes les
mouettes des îles :
    Ils veulent d’un œil bigle,
    Ces pucerons chétifs,
    Lire les divins sigles
    Que nous tenons captifs.
    Lis, puce, le mystère ;
    Lis, pou, le mot carré
    Qui dans l’air, ciel et terre
    Par sept clous est ancré.
    Et de fait, Ulenspiegel et Nele virent sur le gazon, dans l’air
et dans le ciel, sept tables d’airain lumineux qui y étaient
attachées par sept clous flamboyants. Sur les tables il était
écrit :
    Dans les fumiers germent les sèves ;
    Sept est mauvais mais sept est bon ;
    Diamants sortent du charbon ;
    De sots docteurs, sages élèves ;
    Sept est mauvais, mais sept est bon.
    Et le géant marchait suivi de tous les feux follets, qui
susurrant comme des cigales disaient :
    Regardez bien, c’est leur grand maître.
    Pape des papes, roi des rois,
    C’est lui qui mène César paître :
    Regardez bien, il est de bois.
    Soudain ses traits s’altérèrent, il parut plus maigre, triste et
grand. Il tenait d’une main un sceptre et de l’autre une épée. Il
avait nom Orgueil.
    Et jetant Nele et Ulenspiegel sur le sol, il dit :
    – Je suis Dieu.
    Puis à côté de lui, montée sur une chèvre, parut une fille
rougeaude, les seins nus, la robe ouverte, et l’œil
émerillonné ; elle avait nom Luxure ; vint alors une
vieille juive ramassant des coquilles d’œufs de mouettes :
elle avait nom Avarice ; et un moine gloutu goulu, mangeant
des andouilles, s’empiffrant de saucisses et mâchonnant sans cesse
comme la truie sur laquelle il était monté : c’était la
Gourmandise ; vint ensuite la Paresse, traînant la jambe,
blême et bouffie, l’œil éteint, que la Colère chassait devant elle
à coups d’aiguillon. La Paresse, dolente, se lamentait et tout en
larmes, tombait de fatigue sur les genoux ; puis vint la
maigre Envie, à la tête de vipère, aux
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