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La jeune fille à la perle

La jeune fille à la perle

Titel: La jeune fille à la perle
Autoren: Tracy Chevalier
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certaine crainte. Elle lâcha les cailloux.
    Un chaland arrivait sur le
canal, il se dirigeait vers l’hôtel de ville. Je reconnus l’homme qui le
guidait, je l’avais croisé plus tôt ce matin-là. Déchargé de ses briques, le
chaland flottait beaucoup plus haut. L’homme sourit en m’apercevant.
    Je rougis. « S’il vous
plaît, monsieur, commençai-je. Pourriez-vous m’aider à récupérer ce broc ?
    — Tiens, tiens, tu me
regardes maintenant que tu as besoin de moi ! En voilà un
changement ! »
    Cornelia m’observait avec
curiosité.
    Je ravalai mon orgueil.
« Je n’arrive pas à l’atteindre, peut-être que vous pourriez.. »
    L’homme se pencha, repêcha le
broc, le vida et me le tendit. Je descendis les marches en courant pour le
prendre.
    « Oh ! merci, je vous
en suis tellement reconnaissante ! »
    Il ne le lâchait pas.
« Est-ce tout ce que ça me vaut ? Pas même un baiser ? »
    L’homme me saisit par la
manche. D’un geste vif, je lui arrachai le broc.
    « Pas cette fois »,
lançai-je, d’un ton aussi désinvolte que je le pouvais, ce genre de
conversation n’étant pas mon fort.
    Il se mit à rire. « Chaque
fois que je passerai par ici, je guetterai les brocs à la dérive, n’est-ce pas,
ma petite demoiselle ? » Il adressa un clin d’oeil à Cornelia.
« Les brocs et les baisers. » D’un coup de gaffe, il éloigna le
bateau.
    En remontant les marches menant
à la rue, je crus entrevoir un mouvement à l’étage, derrière la fenêtre
centrale, celle de la pièce où il se tenait.
    Je regardai avec attention mais
je ne vis rien d’autre que le reflet d’un coin de ciel.
     
    *
     
    Catharina revint au moment où
je dépendais le linge qui séchait dans la cour. J’entendis d’abord ses clefs
tinter dans le couloir. Réunies en un imposant trousseau, celles-ci pendaient
au-dessous de sa taille, rebondissant contre sa hanche. Si peu confortable cela
fût-il, elle les portait avec grande fierté. Je l’entendis à la cuisine donner
des ordres à Tanneke et au jeune garçon qui avait rapporté les courses. Elle
leur parlait d’un ton cassant.
    Je continuai à dépendre et à
plier draps, serviettes, taies d’oreiller, chemises, chemisiers, tabliers,
mouchoirs, cols et coiffes. Ils avaient été accrochés sans soin, entassés les
uns contre les autres, aussi étaient-ils encore humides par endroits. On ne les
avait pas secoués avant de les accrocher, d’où les nombreux faux plis. Il me
faudrait repasser pendant toute la journée ou presque si je voulais que le
linge soit présentable. Catharina apparut sur le seuil. Elle avait chaud et
paraissait lasse, bien que le soleil ne fût pas encore très fort. Son chemisier
ressortait de sa robe bleue et son peignoir vert était tout froissé. Ses mèches
blondes étaient plus folles que jamais, d’autant qu’elle ne portait pas de
coiffe pour les dompter. Ses boucles se rebellaient contre les peignes qui les
retenaient en un chignon.
    À la voir, on aurait dit
qu’elle avait besoin d’aller s’asseoir un moment au bord du canal, afin que la
vue de l’eau l’apaise et la rafraîchisse.
    Je ne savais comment me
comporter à son égard, je n’avais jamais été servante et nous n’en avions
jamais eu chez nous. Il n’y en avait pas non plus dans notre rue, personne
n’ayant les moyens de s’en offrir une. Je rangeai le linge dans une corbeille
au fur et à mesure que je le pliais puis je la saluai. « Bonjour,
Madame. »
    Elle fronça les sourcils, je
compris que j’aurais dû la laisser parler la première. Il me faudrait être sur
mes gardes.
    « Tanneke vous a montré la
maison ? demandât-elle.
    — Oui, Madame.
    — Très bien, vous savez
donc quelles sont vos tâches et je compte sur vous pour vous en acquit ter. » Elle hésitait, comme si elle ne
trouvait pas ses mots, il me vint alors à l’esprit qu’elle n’en savait
guère plus long sur son rôle de maîtresse que moi sur mon rôle de servante.
Sans doute Tanneke avait-elle été formée par Maria Thins, dont elle suivait
sûrement encore les ordres, sans tenir compte de ce que Catharina pouvait lui
dire. Je devrais l’aider sans en avoir l’air. « Tanneke m’a expliqué qu’en
dehors de la lessive vous souhaitiez que j’aille chaque jour acheter la viande
et le poisson, Madame », insinuai-je discrètement.
    Le visage de Catharina
s’éclaira. « Oui, elle vous emmènera au marché sitôt la lessive
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