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La Guerre et la Paix - Tome III

La Guerre et la Paix - Tome III

Titel: La Guerre et la Paix - Tome III
Autoren: Léon Tolstoï
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où il l’accomplit, sans le rattacher à aucune cause, en admettant même un résidu infinitésimal de nécessité égal à zéro, jamais nous n’arriverons à comprendre la liberté complète de l’homme. Car un être hors de toute influence extérieure, hors du temps et indépendant de toute cause n’est plus un homme.
    De même, il nous est impossible de nous représenter une action humaine d’où soit absente la liberté et qui soit soumise à la seule loi de la nécessité.
    1) Si étendue que soit notre connaissance des conditions dans l’espace où se trouve un homme, elle ne saurait être complète, car le nombre de ces conditions est infini, de même que l’espace est infini. Par suite, dès l’instant que les conditions qui agissent sur un individu ne sont pas toutes déterminées, il n’y a plus de nécessité absolue, et il reste une certaine part de liberté.
    2) Quoi que nous fassions pour allonger l’intervalle qui sépare le phénomène examiné du moment où on le juge, la période envisagée sera toujours finie, alors que le temps lui-même est infini ; par suite, sous ce rapport encore, il ne peut jamais y avoir de nécessité complète.
    3) Quelle que soit notre connaissance de l’enchaînement des causes ayant abouti à un acte, nous n’arriverons pas à sa complète connaissance, puisqu’il est infini, et, une fois encore, nous n’arriverons pas à la nécessité absolue.
    En outre, si, même en admettant un résidu infinitésimal de liberté égal à zéro, nous constations dans un cas quelconque, celui d’un mourant, d’un embryon, d’un idiot, l’absence complète de liberté, nous anéantirions la notion même de l’homme, car où il n’y a pas de liberté, il n’y a pas davantage d’homme. Voilà pourquoi se représenter une action humaine comme soumise à la seule loi de la nécessité, sans le moindre résidu de liberté, est aussi impossible que de se la représenter entièrement libre.
    Ainsi, pour considérer une action humaine comme soumise à la seule loi de la nécessité, nous devons admettre que nous connaissons la quantité infinie des conditions dans l’espace, la période infime du temps de durée, la série infinie des causes.
    Afin de nous représenter au contraire un homme complètement libéré de la loi de la nécessité, nous devons le considérer comme étant seul, en dehors de l’espace, du temps et de la causalité .
    Dans le premier cas, si la nécessité était possible sans la liberté, nous arriverions à une définition de la loi de nécessité par la nécessité elle-même, c’est-à-dire à une forme sans contenu.
    Dans le second cas, si la liberté était possible sans la nécessite, nous aboutirions à une liberté sans condition, hors du temps, de l’espace, de la causalité, liberté qui, par le fait même de n’être conditionnée ou limitée par rien, ne serait rien qu’un contenu sans contenant.
    Nous arriverions d’une façon générale à ces deux fondements de toute philosophie : l’essence inaccessible de la vie et les lois qui la définissent.
    Voici ce que dit la raison : 1° L’espace avec toutes les formes par lesquelles il s’est rendu visible, c’est-à-dire la matière, est infini et ne peut être conçu autrement. 2° Le temps est un mouvement infini sans un instant d’arrêt, et ne saurait être conçu autrement. 3° L’enchaînement des causes et des effets n’a ni commencement ni fin.
    La conscience dit : 1° Seule j’existe, et rien n’existe en dehors de moi, donc je renferme l’espace. 2° Je mesure le temps qui fuit par un moment immobile du présent, dans lequel seul j’ai conscience d’être vivante, donc je suis hors du temps. 3° Je suis en dehors de toute cause, car je me sens la cause de chaque manifestation de ma vie.
    La raison exprime les lois de la nécessité, la conscience exprime l’essence de la liberté.
    La liberté inconditionnée est l’essence de la vie dans la conscience de l’homme. La nécessité sans contenu est la raison humaine sous ses trois formes.
    La liberté est ce que l’on examine. La nécessité est ce qui est examiné. La liberté est le contenu. La nécessité est le contenant.
    C’est seulement en séparant ces deux sources de la connaissance qui sont l’une à l’autre ce que sont l’un à l’autre le contenant et le contenu, que l’on arrive à des notions qui s’excluent mutuellement et demeurent inconcevables sur la liberté et la
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