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La cote 512

La cote 512

Titel: La cote 512
Autoren: Thierry Bourcy
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de Mérange, son frère ? C’est lui qui vous commanditait ?
    Une dernière fois, Kerivin acquiesça, puis son regard devint vitreux et il cessa de respirer.

Chapitre 12
LA PROMESSE
    Le 20 décembre 1914, le 134 e régiment d’infanterie fut transporté au nord-est de Reims pour y remplacer le 31 e dragons et le 11 e bataillon de chasseurs, épuisés et décimés par la bataille de la Marne. Quand les camions, après s’être enfoncés dans les lignes, se rapprochèrent à nouveau du front, Fontaine exprima très sérieusement le désir de visiter la cathédrale de Reims.
    — C’est là où étaient sacrés les rois, non ?
    — Eh ben toi, tu seras sacré le roi des cons ! affirma Flachon.
    À leur arrivée en première ligne, les hommes y découvrirent des tranchées plus propres, mieux aménagées dans la terre plus claire de la Champagne. Après les attaques et contre-attaques incessantes qu’ils avaient essuyées les semaines précédentes, ce fut pour eux comme un répit. La neige s’était remise à tomber, apaisante, recouvrant cadavres et matériels abandonnés, étouffant les coups de fusil dont les détonations sonnaient sèchement et s’éteignaient aussitôt. Un vieux sergent hirsute à la barbe grise expliqua, tout en faisant son baluchon, que les Boches d’en face n’étaient pas de si mauvais bougres.
    — Il n’y a qu’un point d’eau pour tout le monde, une source qui coule là-bas, au milieu du petit bois. Alors, plutôt que de se faire descendre à tour de rôle, on s’est mis d’accord pour y aller chacun notre tour, à des heures bien précises. Et puis quand d’aventure on se croise, ben dame, on fait semblant de ne pas se voir !
    Peuch qui, sans doute, était resté le plus militariste de la section, n’en revenait pas.
    — Alors, vous pactisez avec les Boches ?
    — Appelle ça comme tu voudras, bonhomme. C’est juste une façon de se rendre notre enfer un peu plus vivable.
    Flachon attrapa Peuch par le bras et lui fit signe de fermer sa gueule. Ils s’installèrent, se répartissant aux créneaux suivant les ordres de Doussac. Célestin fut le premier de corvée d’eau, il partit avec Germain Béraud. En suivant les instructions de leurs prédécesseurs, ils parvinrent à la source sans encombre. Ils remplissaient les derniers bouteillons quand un bruit dans les fourrés les fit se retourner. Célestin avait déjà pris son fusil lorsqu’un soldat allemand, béret sur la tête et chaudement emmitouflé dans une épaisse capote grise, les rejoignit. Il eut un moment d’hésitation en découvrant les deux Français qu’il ne connaissait pas puis se décida à leur sourire en sortant de sa poche un paquet de cigarettes.
    — Qu’est-ce qu’on fait, monsieur ? demanda Béraud, éberlué.
    — On fume, répondit Célestin, laconique.
    Les trois soldats allumèrent leurs cigarettes sans un mot puis l’Allemand leur demanda maladroitement s’ils étaient nouveaux. Célestin acquiesça puis, mal à l’aise, fit un signe à Germain. Ils ramassèrent leurs bouteillons, saluèrent leur « kamarade » et se hâtèrent de s’éloigner.
    — Est-ce qu’on va le dire aux autres ? interrogea Germain, effaré.
    — On le dira à ceux qui partiront en corvée. Pas la peine de crier sur les toits qu’on a causé avec un Boche.
    Cet incident devait vite s’oublier en comparaison des événements de Noël. Mis à part quelques duels d’artillerie et le survol de ces grandes saucisses d’observation que l’année allemande lançait au-dessus des lignes, le secteur était calme.
    — On doit pas intéresser ces messieurs de l’état-major, avait annoncé Fontaine, fin stratège.
    — Tant pis pour eux, tant mieux pour nous ! s’était réjoui Flachon.
    Le ravitaillement était régulier, on ne parlait toujours pas de permissions, mais le courrier et les colis arrivaient normalement avec, toutefois, un délai d’une bonne semaine. Il fallait seulement combattre le froid autour des braseros et même d’une cheminée que comportait l’un des abris. Même si, chaque jour, deux ou trois hommes laissaient leur vie dans un bombardement, une sorte de routine s’était installée. C’est dans cette ambiance étrange, à la fois rude et feutrée, qu’arriva le soir de Noël. Fontaine avait reçu un foie gras dans un colis, et Doussac offrit à ses hommes quelques bonnes bouteilles de vin. Il avait allégé la garde et trinquait avec la troupe en faisant le
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